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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE - Le régime serait-il sur le point de sacrifier sa colonne vertébrale juridico-sécuritaire ?

Le n° 1 de l’État a attendu quarante jours après l’assassinat de Rafic Hariri pour envisager – sans pour autant le faire officiellement et directement – de recourir à des instances internationales « et arabes » afin d’établir la vérité, toute la vérité, sur le « crime ignoble » (et non plus la « vilaine chose ») perpétré(e) le lundi 14 février. Pourquoi Émile Lahoud a-t-il attendu quarante jours pour joindre sa voix à celle de la quasi-totalité des Libanais, de l’ensemble de l’opposition, de la famille du défunt, et de toute la communauté internationale ? Quels détours, quels chemins de traverse, sa réflexion a-t-elle empruntés pour aboutir, avec un retard que lui seul pourra expliquer un jour, à cette évidente et incontournable décision que le simple bon sens a dû pourtant lui suggérer fermement d’adopter au soir de ce 14 février ? Qu’est-ce qui a poussé ce président de la République, en qui les Libanais avaient placé presque tous leurs espoirs il y a 7 ans et qui, emmuré aujourd’hui dans un sidérant « no hear no see », ne reçoit plus que quelques ministres démissionnaires, les patrons des services dont la démission, la révocation, la mutation ou le jugement sont réclamés par les citoyens, qu’est-ce qui l’a donc poussé à remplir, ne serait-ce que pour la forme, son devoir, quelques heures à peine avant la publication du rapport Fitzgerald ? Un rapport qualifié par un responsable onusien cité par l’agence Reuters sous le couvert de l’anonymat comme étant « l’un des plus retentissants jamais compilés par les Nations unies ». Est-ce que le locataire de Baabda, imposé une nouvelle fois en septembre dernier à la tête de l’État, anticonstitutionnellement et contre la volonté planétaire, par le tuteur syrien, a décidé de son propre chef, spontanément, impulsivement, de rendre public le communiqué d’hier, ou l’a-t-il fait après concertations avec les dirigeants syriens ? Quelles que soient les réponses à ces questions, une chose reste claire : en appelant à l’aide la communauté internationale et arabe, Émile Lahoud reconnaît de facto, bon gré mal gré, l’inaptitude de l’État libanais à mener l’enquête, désavouant ainsi les services juridico-sécuritaires pour lesquels il a toujours montré un attachement frôlant l’exclusive. Plus encore : en affichant clairement sa disposition « à châtier les auteurs, les commanditaires, les partenaires, les complices et les incompétents » responsables de près ou de loin de cet assassinat, Émile Lahoud serait-il donc prêt à sanctionner, à se débarrasser de la colonne vertébrale de son régime : les services de sécurité et de renseignements, coupables au minimum de ne pas avoir réussi à protéger un homme d’État du calibre de Rafic Hariri ; coupables, donc, de négligence, c’est-à-dire d’ « incompétence » ? Tout cela se produit en outre au moment où des rumeurs persistantes, répétées dans des milieux opposants aussi bien que loyalistes prosyriens, se multiplient à propos d’un « deal » sur lequel serait en train de plancher la Syrie et qui touche en premier lieu le chef de l’État. Damas serait ainsi prêt, pour garantir un tant soit peu ses intérêts stratégiques et la libanisation du dossier Hezbollah, à « sacrifier » Émile Lahoud au profit d’un présidentiable qui serait d’abord agréé par l’opposition et qui recevrait également l’aval syrien, ainsi que celui du Hezbollah. Dans tous les cas, Émile Lahoud, qui a reçu hier en milieu de soirée un appel téléphonique du secrétaire général de l’Onu au sujet du rapport Fitzgerald, a insisté auprès de Kofi Annan, selon un communiqué publié par Baabda, sur sa volonté personnelle de voir l’Onu faire tout ce qui est nécessaire pour parvenir à la vérité. Le chef de l’État sait pertinemment ce que ses propos sous-entendent, et il a décidé, visiblement, de les assumer jusqu’au bout, jusqu’à un éventuel Tribunal pénal international. Est-ce une volonté désespérée de récupérer un minimum de crédibilité, peut-être de popularité ? Est-ce un moyen détourné pour permettre au chef de l’État de démissionner « honorablement », de mettre un terme positif à un mandat imposé ? Ziyad MAKHOUL
Le n° 1 de l’État a attendu quarante jours après l’assassinat de Rafic Hariri pour envisager – sans pour autant le faire officiellement et directement – de recourir à des instances internationales « et arabes » afin d’établir la vérité, toute la vérité, sur le « crime ignoble » (et non plus la « vilaine chose ») perpétré(e) le lundi 14 février.
Pourquoi Émile Lahoud...