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Actualités - OPINION

Le testament de Louis XVI

« Je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe jamais sur la France. » Tels furent les derniers mots de Louis XVI, allant vers son destin, à l’abattoir, quelques secondes avant que le couperet de la guillotine ne vienne mettre un terme à l’existence de ce roi au sort tragique. Tout aussi tragique, le sort de Rafic Hariri, quittant la place de l’Étoile vers son destin. Hariri qui confiait « le Liban à son bon peuple et à Dieu » après son départ du pouvoir. Victime d’un acte d’une barbarie inqualifiable, l’ancien Premier ministre livre, à travers sa mort, le même testament posthume que Louis XVI. Étranges coïncidences. Rafic Hariri, définitivement transfiguré dans la mort en martyr de la souveraineté, en ce Riad el-Solh de l’indépendance qu’il était fatalement voué à devenir un jour. « Deviens ce que tu es. » La maxime nietzschéenne n’aura jamais paru plus cynique. « Je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe jamais sur le Liban. » S’il avait pu dire ces mots-là à ses assassins, dans l’ultime requête de l’homme providentiel qui a accepté d’assumer jusqu’au bout son destin, Rafic Hariri aurait par là même adressé une supplique similaire à la communauté internationale, bien en deçà de l’ampleur du désastre. Une communauté internationale jusqu’à présent trop inhibée, qui refuse de se rendre à l’évidence, qui paraît en décalage par rapport au pouls de l’opposition nationale libanaise. « Le Liban est une nation captive », ont lancé, d’une même voix, des opposants définitivement liés par une conscience commune, à leurs leaders nationaux abattus comme du bétail au fil des années, et qui ont pour noms, entre autres, Kamal Joumblatt, Béchir Gemayel, René Moawad, Sobhi el-Saleh, Riad Taha, Sélim Laouzi, Hassan Khaled, Mahdi Amel, Nazem Kadri, Rafic Hariri... « Le régime libanais est terroriste et assassin », a asséné Walid Joumblatt. « Le Liban est devenu un abattoir », a souligné Michel Aoun. En faut-il plus pour que la communauté internationale saisisse le message ? Combien de temps faut-il encore pour que ce peuple maudit continue à payer de son sang avant que le monde agisse ? Suffit-il que Kofi Annan et Terjé Roed-Larsen appellent Walid Joumblatt pour lui demander de veiller à sa propre sécurité ? Le sang de Joumblatt et de chacun des membres de cette opposition nationale ne relève-t-il pas désormais de la responsabilité du monde entier, à commencer par l’Onu ? Les opposants libanais sont tous des pharmakon, des cibles potentielles, des victimes de sacrifices propiciatoires en puissance, comme Rafic Hariri, tant que la communauté internationale n’aura pas décidé de leur assurer la protection qui devrait leur revenir de droit, par la fin de l’occupation du Liban. La résistance de ces opposants a un prix. Marwan Hamadé et Bassel Fleyhane l’ont payé dans leur chair, Rafic Hariri y a laissé sa vie. La communauté internationale ne peut plus l’ignorer. Ce serait là rien moins qu’un crime, une non-assistance à pays en danger, qui pèsera sur la conscience du monde entier. Michel HAJJI GEORGIOU
« Je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe jamais sur la France. » Tels furent les derniers mots de Louis XVI, allant vers son destin, à l’abattoir, quelques secondes avant que le couperet de la guillotine ne vienne mettre un terme à l’existence de ce roi au sort tragique.
Tout aussi tragique, le sort de Rafic Hariri, quittant la place de l’Étoile vers...