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Actualités - CHRONOLOGIE

Théâtre - À la LAU du 13 au 16 janvier, à 20h30 précises «Amnesia 2025»: après le réveil, la révolution? (photo)

Dans leur note d’intention puis dans leur interprétation, les 22 étudiants de beaux-arts, de science et de communication de la LAU, encadrés par le metteur en scène Nagi Souraty, ont souligné qu’ils ont abordé l’élaboration d’Amnesia 2025 selon un processus de « destructuration ». Inspirés par des textes d’Etel Adnan, de Philippe Ducros et de Mohammed Kacimi, le spectacle de 75 minutes qu’ils présentent accuse ouvertement les intégrismes de tous bords, à commencer par celui, exercé au nom de la démocratie, par l’Administration américaine. Trois scènes composent l’espace de la salle Gulbenkian, exploitée pour l’occasion à son maximum : la première, à l’avant-scène, ronde et ponctuée de pylônes de tailles différentes ; la deuxième, derrière la première, en forme de boîte-vitrine avec, entre les deux espaces, une immense poutre les sépare dans le sens de la longueur ; la troisième, enfin, sous forme de passerelle suspendue au-dessus des deux autres, auxquelles les comédiens accèdent par des escaliers latéraux. D’une seule voix, affronter la vérité Amnesia 2025, c’est le recensement des guerres du Vietnam, de Serbie, d’Irak sans compter tous les morts et tous les viols de toutes les guerres des XXe et XXIe siècles. Celle du Liban, selon un choix clair, n’est évoquée qu’à travers la présence du dialecte libanais, mais il n’a pas été difficile au public autochtone d’identifier la souffrance de la population et son désir d’oubli. Car c’est bien d’amnésie dont il s’agit dans ce poignant et violent spectacle, mené avec intégrité et courage par les étudiants-comédiens de la LAU. La première chose à signaler, c’est qu’au Liban, régulièrement, le théâtre parle de guerre, le seul sujet qu’il faut évoquer, sans se cacher derrière les ronflantes reconstructions ou législatives. Dans des temps troublés et pleins d’espoir cependant comme ceux d’aujourd’hui, c’est un grand réconfort que de voir, encore, la génération née avec la guerre qui cherche à comprendre en affrontant la vérité, sans se cacher derrière les drogues, les nuits sans sommeil et les imitations de l’Occident inatteignable. D’une seule voix, celle qui rappelle les milices diverses qui ont fait trembler de peur – ou protégé, c’est selon – la population pendant 17 ans. Les chaussures et les vêtements des disparus, les armes à infrarouge, les extraits de téléfilms américains de série B, la calligraphie extrême-orientale, la musique techno : autant de symboles que connaissent les victimes et les spectateurs des guerres et qui sont montrés dans la pièce. Lieu-culte de l’oubli Amnesia 2025 aurait pu se passer des clichés ultradéfraîchis de la CIA, du FBI, des extraits de musique ou d’environnement sonore qui dépareillent quelque peu l’ensemble, mais les textes trilingues, les démonstrations physiques des comédiens (aussi éloquentes que la parole) sont à saluer. Les interruptions régulières accordées à l’évocation d’une boîte de nuit ne sont expliquées qu’à la fin de la performance et parlent directement de la jeunesse libanaise et du lieu-culte de l’oubli, créé par un Bernard Khoury obsédé par les signes dans son travail architectural: le B018, entièrement articulé autour des thèmes joints du caveau et du bunker, a été construit, ou plutôt creusé à l’endroit même où des réfugiés ont été massacrés par des miliciens, en 1976 – il s’agit en fait ici du réel intérêt du spectacle, de sa vraie particularité. Les créatures des nuits mondaines s’enfoncent trois mètres sous terre pour aller danser au niveau même des sépultures de fortune d’innocents immolés au nom de la guerre. À quoi pensent-elles quand elles remontent à la surface? Sans doute qu’un jour, au contact de la mort, elles se réveilleront d’un sommeil profond et criminel dénoncé par Amnesia 2025 et que la révolution pourra se mettre en marche. C’est ce qu’il reste à espérer. Diala GEMAYEL
Dans leur note d’intention puis dans leur interprétation, les 22 étudiants de beaux-arts, de science et de communication de la LAU, encadrés par le metteur en scène Nagi Souraty, ont souligné qu’ils ont abordé l’élaboration d’Amnesia 2025 selon un processus de « destructuration ». Inspirés par des textes d’Etel Adnan, de Philippe Ducros et de Mohammed Kacimi, le spectacle de...