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Actualités - CHRONOLOGIE

Un dénouement moins dramatique de la crise de Beslan était possible, affirme, à Beyrouth, le chercheur Anton Koslov Terrorisme et corruption, deux défis cruciaux pour la Russie de Poutine

De passage à Beyrouth lors d’un cycle d’interventions à l’Université de La Sagesse, Anton Koslov, directeur de recherches au Cadmos (Centre d’études sur les différends et leurs modes de solution) et professeur à l’Université Paris-Sud ainsi qu’à l’Université américaine de Paris, a donné mercredi soir une conférence sur le thème suivant : « Quel avenir pour la Russie de Poutine ? » Au menu de son intervention : la Russie face au terrorisme, notamment tchétchène, les relations entre Moscou et les oligarques, et la place du pays dans les nouvelles relations internationales. La question tchétchène est, selon M. Koslov, un enjeu crucial pour la Russie d’aujourd’hui. Le terrorisme auquel Moscou fait face est, selon l’expert, ancré en Tchétchénie et financé par des réseaux externes essentiellement wahhabites. Les ramifications d’el-Qaëda dans le Sud-Est asiatique ont également leur influence sur le terrain, et l’on ajoute le rôle joué par l’Afghanistan sous le régime taliban lors des années 1990. Pour cet expert, le conflit tchétchène est une « guerre entre mercenaires », un conflit « sale » dans lequel les belligérants, aussi bien Moscou que les indépendantistes et les islamistes, « ne peuvent prétendre combattre pour une cause ». Le conflit se réduit dès lors à ce que M. Koslov a nommément qualifié de « conflit d’intérêts ». L’expert précise néanmoins que Moscou ne peut se permettre la moindre tolérance vis-à-vis du séparatisme tchétchène car elle sonnerait comme une « atteinte à la fédération de Russie. C’est une option inconcevable dans la logique de la politique étrangère menée par le président Poutine et son équipe ». Tout en affirmant comprendre les inquiétudes russes quant au risque de désintégration de la fédération, M. Koslov tient toutefois à préciser qu’il lui arrive d’être souvent en profond désaccord avec le mode de gestion, par Moscou, du dossier tchétchène. Il cite ainsi la prise d’otages de Beslan, en affirmant que « plus de patience aurait mené à un dénouement moins dramatique de la crise ». M. Koslov précise en outre que la Russie est particulièrement exposée aux risques du terrorisme globalisé, en raison de la « perméabilité des anciennes républiques de l’URSS, souvent réceptives aux thèses islamiques ». Le chercheur estime en revanche qu’une menace islamiste endogène ne peut voir le jour en Russie en raison de facteurs « sociaux, culturels et religieux ». Lors de son intervention, Anton Koslov a également retracé l’équation politique interne de la Russie à travers la personnalité du président Poutine et sa relation avec les oligarques. M. Koslov a ainsi mis l’accent sur l’état de corruption qui régnait en Russie avant l’accession de Vladimir Poutine à la magistrature suprême. Alors que pendant les années 1990, la fuite de capitaux russes s’élevait à 25 milliards de dollars par an, actuellement, elle ne représente que 4 à 6 milliards, selon M. Koslov. Une amélioration due, selon l’expert, à une série de réformes fiscales ainsi qu’à la personnalité même de M. Poutine, un ancien agent du KGB... Quant à la relation du président avec les oligarques, M. Koslov insiste surtout sur l’affaire du géant pétrolier Ioukos et les poursuites contre son PDG Mikhaïl Khodorkovsky. Cette affaire représente une détermination de la part de Poutine à combattre la corruption. En rendant à l’État sa part de richesse, M. Poutine entend en effet restituer au Trésor public ce que le président Boris Eltsine avait cédé aux oligarques en 1995 pour barrer la route à un éventuel retour des communistes. Cependant, le « timing » de l’ouverture de l’affaire Ioukos revêt une signification stratégique. Pour Anton Koslov, il ne s’agissait pas pour Vladimir Poutine d’en finir avec Khodorkovski comme un éventuel concurrent politique, mais de contrer une ouverture du capital de Ioukos à la compagnie pétrolière américaine Mobil, une opération qui aurait mis en péril les intérêts stratégiques et énergétiques de la Russie. Malgré tous les problèmes auxquels elle est confrontée, la Russie cherche toujours, selon M. Koslov, à préserver son intérêt national en agissant d’abord dans sa sphère d’influence surtout après l’élargissement de l’Otan à une bonne partie des pays de la région. La Russie ne cherche plus, souligne toutefois Anton Koslov, « à se doter d’un statut de superpuissance dont elle ne peut assumer le coût ». Conscientes du caractère multipolaire des relations internationales, les autorités russes agissent désormais en fonction des paramètres géopolitiques actuels, tout en évitant d’exposer l’intérêt national de la Russie aux dangers qui menaceraient la viabilité de la fédération. Bachir EL-Khoury
De passage à Beyrouth lors d’un cycle d’interventions à l’Université de La Sagesse, Anton Koslov, directeur de recherches au Cadmos (Centre d’études sur les différends et leurs modes de solution) et professeur à l’Université Paris-Sud ainsi qu’à l’Université américaine de Paris, a donné mercredi soir une conférence sur le thème suivant : « Quel avenir pour la Russie de...