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Actualités - CHRONOLOGIE

Téléphonie Mobile - Pas de chiffres officiels sur le taux de participation Le mouvement de boycottage bien suivi dans l’ensemble(photo)

Avoir un cellulaire opérationnel hier était presque considéré comme politiquement incorrect. Si l’on en croit certains micro-trottoirs réalisés par la presse et les premiers résultats du sondage sur « téléphone fixe » effectué par les organisateurs, la campagne nationale de boycottage du cellulaire semble avoir été bien suivie. Placés devant le défi, les Libanais devaient absolument faire preuve de civisme et de solidarité sociale autour d’une cause qui, pour une fois, transcendait le politique aussi bien que le confessionnel pour rallier toutes les catégories socioprofessionnelles. En cherchant à exprimer un ras-le-bol économique et social, les Libanais ont décidé de sacrifier, un jour durant, ce qu’ils ont de plus cher, la parlote sur portable. Un effort d’autant plus louable que cet accessoire est presque devenu indissociable du train de vie libanais. Objectif visé par cette campagne : forcer le gouvernement à baisser ses prix quitte à prévoir une escalade en cas de fin de non-recevoir. Plus concrètement, les organisateurs ont réclamé la comptabilisation des communications à la seconde et non plus à la minute, la baisse des tarifs de 30 %, une baisse de 50 % pour les communications nocturnes, l’abolition des 25 dollars d’abonnement mensuel et des cartes prépayées moins chères avec une échéance prolongée. S’il est encore tôt de parler de succès de cette opération, on peut toutefois déduire, au lendemain de ce test de protestation, que le mouvement a quand même réussi à rallier une bonne partie des mécontents, même si tous les usagers n’ont pas suivi la consigne à la lettre. Plusieurs parmi ceux qui ont été interrogés affirment n’avoir pas pu se passer de leur portable, mais estiment que l’idée du « boycottage est excellente », précisant que si elle ne produit pas tous ses effets dès la première fois, elle devrait être réitérée une seconde et une troisième fois, jusqu’à ce qu’elle aboutisse. Les représentants des associations professionnelles ont tenu une réunion au siège de l’Ordre de la presse où a été installée une chambre d’opération pour suivre de près le mouvement. Plusieurs activistes se sont relayés au téléphone fixe pour effectuer un sondage privé permettant de mesurer l’ampleur du boycottage. « Le ministère des Télécommunications ayant refusé de mettre ses services de contrôle à notre disposition, nous avons demandé à la vingtaine d’associations qui nous soutiennent d’appeler au hasard les abonnés pour voir s’ils ont déconnecté leur téléphone », indique Zouheir Berro, président de la principale association de défense du consommateur. C’est par les responsables politiques qu’ils ont commencé. « Sur les 128 députés et 30 ministres appelés sur leur mobile, 70 % ont répondu », a indiqué un des opérateurs sur place. Vingt mille autres abonnés sur un total de 850 000 devaient également être appelés à partir des 15 centres mis à la disposition des activistes par les associations professionnelles. Toutefois aucun chiffre précis ne pouvait être communiqué hier soir, les organisateurs ayant préféré attendre avant de se réunir à nouveau aujourd’hui, pour annoncer un chiffre global sur le taux de participation. Entre-temps, plusieurs pourcentages ont été avancés avec des écarts parfois très importants. Pour Fouad Haraké, un membre de l’Ordre de la presse qui supervisait la chambre des opérations, le pourcentage des grévistes recueilli au siège de l’Ordre à 18 heures était de 60 %. D’autres sources ont fait état d’un taux de participation nettement moins élevé, se situant autour de 34 %. Ces sources en déduisent que la grève a échoué. Cependant une telle conclusion paraît pour le moins hâtive, car même si la participation était autour de 30 % – un taux qui se traduit par plus de 250 000 abonnés –, elle reste importante par rapport aux expériences passées de grève dans un pays comme le Liban. Dans les rues de la ville plusieurs usagers trouvaient une certaine fierté à dire qu’ils se sont séparés, dès les premières heures de la matinée, de leur portable. « J’ai décidé d’éteindre mon cellulaire durant les 24 heures, tout en sachant que cela me coûtera cher dans la mesure où mon travail dépend étroitement des appels que je reçois », souligne Raed, qui craint toutefois que le mouvement ne soit, une fois de plus, « récupéré par ceux-là mêmes qui sont à l’origine de nos misères ». « Cela ne m’étonnerait pas d’apprendre que Fouad Siniora a décidé, lui aussi, de boycotter », ajoute le jeune entrepreneur. Même ceux qui ne pouvaient absolument pas éteindre leurs appareils – pour des raisons professionnelles ou pour des motifs d’urgences, comme ils disent, ont affirmé avoir limité au strict minimum leurs appels, l’objectif ultime étant de faire perdre un maximum aux opérateurs. « Je ne l’ai utilisé qu’une seule fois depuis ce matin, pour répondre à ma fille », témoigne une dame, qui assure que toute la famille a suivi le mouvement. « Même mon mari, qui est diplomate, m’en a voulu de lui avoir fait un appel en absence (missed call) », dit-elle. Pour ce propriétaire de restaurant en plein centre-ville, il n’est pas question de se déconnecter : « sinon comment pourrais-je gérer mes affaires ? Je ne suis pas prêt à perdre de l’argent », dit-il. Même le syndicat des employés des compagnies de téléphonie mobile s’est mis en grève. « J’ai déconnecté mon portable, parce que je suis une citoyenne comme les autres qui souffre de la cherté de vie et de la carence de nos gouvernants », affirme Leila, une salariée. Les tarifs au Liban sont les plus élevés de la région et probablement du monde, soulignent les organisateurs. « Si vous déconnectez votre téléphone durant un mois, vous devrez quand même payer 37 dollars au Liban alors qu’il vous en coûterait 12 USD en Jordanie, 11,7 USD en Syrie, 8,5 USD à Chypre et 5,5 USD en Égypte et aux Émirats arabes unis », a précisé M. Berro. 500 minutes de communications coûtent 121 USD au Liban, contre 65 USD en Syrie, 66 USD en Jordanie, 47 USD à Chypre, 42 USD en Égypte et 39 USD aux Émirats, ajoute-t-il. Les 850 000 lignes de téléphonie mobile, pour 4 millions d’habitants, sont gérées au bénéfice de l’État par MTC, un groupe de télécommunications koweïtien, et la firme allemande Detecon, qui versent chacun en contrepartie au gouvernement 4 millions USD par mois. » Le réseau génère 800 M USD par an au gouvernement pour combler son déficit budgétaire », qui s’élève à près de 3 milliards USD, a affirmé M. Berro. La moitié du prix d’une communication est taxée par le Trésor, rappelle-t-on. Jeanine JALKH

Avoir un cellulaire opérationnel hier était presque considéré comme politiquement incorrect. Si l’on en croit certains micro-trottoirs réalisés par la presse et les premiers résultats du sondage sur « téléphone fixe » effectué par les organisateurs, la campagne nationale de boycottage du cellulaire semble avoir été bien suivie. Placés devant le défi, les Libanais devaient...