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Actualités - OPINION

Le journaliste français d’origine libanaise explique les véritables raisons de la guerre contre l’Irak Un axe irano-turc pourrait stabiliser le Moyen-Orient, affirme André Bercoff

Dans le cadre des activités de l’Académie des hautes études diplomatiques et des relations internationales, l’écrivain et journaliste français d’origine libanaise André Bercoff a été invité à donner un séminaire de formation au Collège antonin de Baabda. M. Bercoff a voulu dès le début de la conférence sortir du cadre du conflit israélo-palestinien, pour parler du Moyen-Orient en général, dans un essai d’analyse des perspectives à venir dans la région. Connu pour avoir publié une trentaine d’ouvrages, où il expose ses prévisions basées sur les tendances géopolitiques actuelles, André Bercoff travaille avec un groupe de chercheurs sur les rapports de force qui, selon lui, sont en pleine mutation dans cette région du monde. M. Bercoff commence par la guerre américaine en Irak qui est, selon lui, le résultat des attaques du 11 septembre 2001. Il considère que « les Américains voulaient frapper le monde arabe », qui, selon les néoconservateurs de l’Administration Bush, éprouve beaucoup de sympathie pour le réseau Ben Laden. Pourquoi Saddam Hussein ? Car Saddam a été « le seul dirigeant à se réjouir publiquement des attentats du 11/9 ». Renverser le maître de Bagdad révèle donc beaucoup plus du symbolisme que d’une affaire de pétrole ou d’ADM. L’Administration US voulait montrer qu’« on ne peut toucher impunément au territoire américain » . Ainsi, selon M. Bercoff, « le pari des Américains qui consistait à introduire le facteur de la peur a réussi », cependant, « ils ont manqué l’opportunité d’introduire les germes de la démocratie dans la région ». Les difficultés américaines en Irak ont toutefois montré l’émergence d’un pôle chiite qui contrebalance l’islamisme wahhabite de Ben Laden, et qui pourrait jouer un rôle important dans la stabilité de la région. « Incontestablement, il y a quelque chose qui se passe de ce côté-là, qu’il faut suivre de près », affirme M. Bercoff. D’une part, les Iraniens, contrairement à Saddam, ont cédé face aux menaces américaines, en acceptant les inspections de leurs sites nucléaires. D’autre part, les Américains commencent à voir dans le régime iranien un possible partenaire fiable, malgré les réticences de l’État hébreu. M. Bercoff considère donc qu’un axe turco-iranien devrait naître d’ici à quelques années, avec un islam modéré, sunnite et laïque déjà en Turquie, et chiite et réformateur en Iran. En effet, M. Bercoff, qui vient de passer trois semaines en Iran, affirme vigoureusement que les choses bougent. « Les Iraniens aspirent à une séparation entre l’État et la religion », affirme-t-il. Tout dépend donc de la résistance du régime des mollahs aux pressions US et la capacité de ceux-ci de prendre la bonne décision au bon moment. À partir de là, on verra « quelle direction prendra le monde arabe avec un éventuel axe Turquie-Iran ». Répondant à une question sur le rôle de l’Europe dans ce processus, M. Bercoff affirme que « l’Europe n’existe pas » à ce niveau. Tant qu’il n’y a pas de volonté politique, pas d’unité sur la politique étrangère, « l’Europe ne peut pas peser » dans les circonstances actuelles, ajoute-il. Quant au Liban, et malgré ses critiques sur une reconstruction sauvage « déséquilibrant » la nature et l’environnement, M. Bercoff semble doublement optimiste. D’abord sur le plan interne, il note que le Liban a su dépasser la guerre et reste un pays « mélange, métis » avec sa double culture arabe et occidentale. Ensuite, bien que le pays du cèdre reste tributaire d’une solution régionale, M. Bercoff trouve qu’il est aujourd’hui difficile de sacrifier le Liban sur l’autel de la paix. Enfin, M. Bercoff a refusé de s’immiscer dans la politique intérieure libanaise. Mais il a quand même fait allusion à la controverse sur l’échéance présidentielle, affirmant que de vraies réformes devraient venir du peuple. Ainsi, les Libanais pourront s’exprimer par des moyens démocratiques, en manifestant, par exemple, contre une éventuelle prorogation. Antoine AJOURY
Dans le cadre des activités de l’Académie des hautes études diplomatiques et des relations internationales, l’écrivain et journaliste français d’origine libanaise André Bercoff a été invité à donner un séminaire de formation au Collège antonin de Baabda.
M. Bercoff a voulu dès le début de la conférence sortir du cadre du conflit israélo-palestinien, pour parler du...