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Actualités - OPINION

Hariri veut que toute la lumière soit faite

«Éloigne-toi du mal et chante-lui. » Ou encore, « la fuite, c’est les deux tiers de l’exploit viril ». Partisans de ces dictons populaires, et de Hariri, certains professionnels auraient souhaité un torpillage de la séance d’aujourd’hui, place de l’Étoile. Par crainte, sans doute, que l’interpellation du Front national de la réforme ne tourne à un vote débouchant sur une confiance étriquée. Qui serait un revers politique pour leur camp. Mais le principal intéressé ne l’entend pas de cette oreille. Hariri, indiquent ses proches, veut que toute la lumière soit faite sur le dossier du cellulaire, objet de l’interpellation. Ce n’est pas pour en découdre et remporter une victoire à la Pyrrhus face à une opposition minoritaire. Mais parce qu’il souhaite se débarrasser une fois pour toutes de ce boulet insupportable qu’est le portable. Il semble donc convaincu de pouvoir convaincre. C’est-à-dire qu’à ses yeux, ou à sa connaissance, le dossier susdit n’est entaché d’aucun vice, d’aucune malversation le concernant de près ou de loin. Dans l’ordre pratique des choses, le choix de Hariri paraît des plus raisonnables. Car les pôles du Front national de la réforme ont tout de suite fait un sort aux éventuelles tentatives de dérobade haririenne. En indiquant qu’en cas de report du débat, ils reviendraient à la charge, en usant de leur droit de demander la tenue d’une séance consacrée à la censure des actes du gouvernement. Autrement dit, en cherchant à esquiver le cellulaire, le cabinet se verrait harcelé sur beaucoup d’autres dossiers présentant des failles, des déficiences évidentes. Il aurait gagné un peu de temps, mais perdu beaucoup d’espace de défense efficace. Car, il l’avoue lui-même, sa gestion des affaires publiques est loin d’être parfaite. Et frise même parfois l’inconscience, ou l’impéritie totale, comme on l’a vu avec l’affaire de l’Isesco. Pour l’heure, les interpellants précisent que leur objectif n’est évidemment pas de faire sauter un gouvernement solidement protégé par les décideurs et par ses alliances parlementaires. Mais de discuter les troubles péripéties qui accompagnent l’histoire du cellulaire depuis le contrat d’exploitation signé en 1994. En réalité, les opposants centristes espèrent jouer sur les contradictions manifestes entre les deux ailes opposées de l’Exécutif. Qui se présente de la sorte devant l’Assemblée avec deux positions distinctes. Le ministre des télécommunications, Jean-Louis Cardahi, a rendu visite au président de la Chambre, Nabih Berry. Pour des précisions sur les mécanismes de la séance parlementaire, certes. Mais aussi, et surtout, pour exposer une première fois sa ligne de conduite. C’est-à-dire pour que Berry, qui dirige et régule les débats, ne soit pas surpris de voir Cardahi riposter aux remarques des députés et leur répondre point par point. En fait, et ce n’est un secret pour personne, c’est surtout aux insinuations éventuelles de certains de ses bons collègues du gouvernement que Cardahi envisage de faire face. Parce qu’il sait, comme tout le monde, qu’en réalité, ce n’est pas sa gestion propre (au double sens du terme) que les centristes opposants entendent mettre en cause. Mais les pratiques antérieures à sa prise en charge. Ce qui pourrait, donc, faire bouillir d’autres ministres qui tenteraient alors de se défausser sur l’actuel titulaire des Télécoms. Comme on voit, l’harmonie et la confiance règnent, côté climat. Et la trêve entre les lahoudistes et les haririens risque, aujourd’hui même, d’en prendre un sérieux coup. Même si cela ne doit les rapports entre les présidents, tous deux soucieux d’éviter une reprise de leurs anciennes querelles qui indisposerait les décideurs. Mais alors, pourquoi Cardahi se mobilise-t-il ? Parce que, répondent des sources informées, lors de son entrevue de franches explications jeudi dernier avec Hariri, force lui a été de constater que leurs vues chiffrées sont par trop différentes. Notamment en ce qui a trait aux rentrées du Trésor provenant du cellulaire après récupération du secteur et mandat provisoire d’exploitation décerné aux deux opérateurs locaux. Cardahi pense que les données numériques présentées par le camp d’en face sont pour le moins imprécises. Il n’aimerait pas qu’on les fasse passer à la Chambre comme étant exactes. Et il tient à mettre les points sur les « i », le cas échéant. Hariri est certes habilité à parler au nom du gouvernement. Mais Cardahi souligne qu’un ministre dont le département même fait l’objet d’une interpellation a le droit, le devoir même, de s’expliquer personnellement devant la Chambre. Ce qui promet deux sons de cloche gouvernementaux. Le cabinet comparaît donc en ordre dispersé devant le Parlement. C’est pourquoi Sleiman Frangié a annoncé, pour la toute première fois, qu’il n’assistera pas à la séance. Pour le fond du dossier, il partage l’avis de Cardahi. Mais il ne veut pas jeter de l’huile sur le feu dans un conflit qui déchire le pouvoir dont il fait partie. En outre, est-il besoin de le rappeler, Frangié n’est pas particulièrement intéressé d’apporter de l’eau au moulin de Karamé, de Harb ou de Mowad, ses adversaires au Nord, qui font partie du groupe interpellant. Il reste que d’autres ministres pourraient être tentés de suivre l’exemple du jeune leader zghortiote. D’autant que selon l’un d’eux, il est peu gratifiant de voir un président du Conseil et un titulaire de portefeuille concerné échanger des critiques, voilées ou pas, devant la Chambre. Il y a donc un certain risque d’absentéisme gouvernemental. Hariri a dès lors exhorté les membres du gouvernement à faire acte de présence. Et il en a fait autant, bien sûr, à l’adresse des députés de son bloc. Pour assurer le quorum, afin que personne n’aille dire qu’il s’est dérobé. En tout cas, Cardahi souligne que la séance n’aura aucun effet sur l’adjudication qu’il a préparée. Philippe ABI-AKL
«Éloigne-toi du mal et chante-lui. » Ou encore, « la fuite, c’est les deux tiers de l’exploit viril ». Partisans de ces dictons populaires, et de Hariri, certains professionnels auraient souhaité un torpillage de la séance d’aujourd’hui, place de l’Étoile. Par crainte, sans doute, que l’interpellation du Front national de la réforme ne tourne à un vote débouchant sur une...