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Actualités - REPORTAGE

RÉFORME ADMINISTRATIVE - Des lois existent depuis… 1933 Une charte pour protéger le patrimoine

«La charte du citoyen ? C’est bien. C’est toutefois la charte du responsable qu’il faudrait élaborer », a déclaré hier le ministre de la Culture Ghazi Aridi, lors de la séance inaugurale du séminaire sur la charte du citoyen pour le patrimoine, organisé par le ministère d’État à la Réforme administrative. Fustigeant les méthodes obliques des gouvernants, mais aussi les infractions, agressions, négligences et abus qui ne se comptent plus, Ghazi Aridi avoue être paralysé dans son travail. Il y a toujours un contre-ordre qui émane des hautes sphères pour invalider toute mesure de répression. Quant à la Direction générale des antiquités (DGA), à court d’argent, neutralisée par la lenteur administrative et les intérêts privés qui s’immiscent dans les affaires politiques, elle ne peut même pas intervenir pour prévenir les formes de dégradation. Mettant en garde les responsables contre un laxisme qui peut mener à la perte de notre mémoire nationale, M. Aridi a également rappelé que les lois libanaises protégeant le patrimoine remontent à… 1933. Ajoutons par la même occasion que plusieurs projets de loi élaborés ces dernières années se perdent dans les dédales de l’Administration. M. Aridi a pris la parole lors du séminaire organisé, hier à l’Unesco, par le ministère d’État pour la réforme administrative, sur la « charte du citoyen pour le patrimoine ». Étaient présents outre le ministre Karim Pakradouni : M. Patrick Renauld, chef de la délégation de l’Union européenne, et un parterre composé d’une centaine de responsables gouvernementaux et acteurs sociaux, concernés par la mise en pratique de cette charte. Indiquant que le document est le quatrième du programme « Les chartes du citoyen », lancé en 2001 par l’ancien ministre Fouad es-Saad pour établir une politique éthique de relations « entre le citoyen et les administrations publiques », M. Pakradouni a annoncé que deux autres chartes sont en cours de préparation et seront débattues prochainement. Il s’agit de « La charte du citoyen pour l’argent public » et celle de « La sécurité publique ». En ce qui concerne le patrimoine, le document qui sera approuvé prochainement a été élaboré par une commission regroupant Antoine Messarra, coordonnateur général des « chartes du citoyen », Leila Badr, directrice du musée de l’Université américaine de Beyrouth, Elham Kallab, directrice adjointe du centre international des sciences de l’homme de l’Unesco à Byblos-Jbeil, Hareth Boustany, professeur à l’Université libanaise, et Frédéric Husseini, directeur général des Antiquités. L’objectif de la charte est de mener une campagne d’éveil pour sensibiliser les Libanais à leur héritage archéologique, architectural, naturel, culturel et intellectuel, à leurs us et coutumes, mais aussi à toutes les expressions de leur mémoire et de leur identité. Le document définit les obligations du citoyen, de la famille, des institutions scolaires et universitaires, des conseils municipaux, des ONG, de l’information et du rôle des médias pour faire parvenir le message. Elle met l’accent sur la préservation et la mise en valeur du patrimoine, véritable enjeu de développement économique. Le document qui est également centré sur les inventaires, le professionnalisme et la défense, la mondialisation et le particularisme, comprend aussi la mise en train du Centre des archives nationales, la création de musées régionaux et de comités de quartier. Mais le volontarisme de l’État est la condition sine qua non pour mener à bien cette opération et stopper l’érosion du patrimoine. Les auteurs comptent sur le pouvoir central pour que la charte ne reste pas lettre morte. Ils demandent à dépoussiérer une législation remontant à 1933 et à adopter un dispositif législatif moderne pour lutter contre la dégradation. Ce serait là le premier pas vers la solution. En bref, la conservation et l’entretien du patrimoine impliquent une participation et une solidarité multilatérales. Il est la responsabilité du citoyen et de l’État. Par ailleurs, les observations des participants sur les plans de la méthode et du contenu de la charte ont été nombreuses. Elles seront « retenues », promet la commission. « Les propositions et amendements, la synthèse des débats et la liste des participants et des institutions seront intégrés dans le texte final. De la sorte, la charte n’émanera pas seulement d’un ministère et d’une commission restreinte, mais constituera un document de référence émanant de la société civile et fondateur d’une réflexion éthique au Liban et dans le monde arabe. » May MAKAREM Pour inspirer le législateur Voici le discours, prononcé par l’ambassadeur Patrick Renauld, chef de la délégation de la Commission européenne au Liban, lors de la séance inaugurale sur le thème de « La charte du citoyen pour le patrimoine » : « Dans le cadre de son programme de soutien à l’administration et aux administrés (les citoyens), la Commission européenne a financé la publication d’un certain nombre de chartes. La charte des citoyens a été adoptée par le Conseil des ministres libanais en 2001. Celles concernant le citoyen et l’éducation, le citoyen et la santé, le citoyen et l’environnement ont été adoptées en 2002. Trois chartes sont en préparation : le citoyen et le patrimoine, l’argent public, et la sécurité publique. Je suis convaincu que, comme moi, la plupart d’entre vous pensent que ces chartes ne servent à rien. C’est du papier, une liste de bonnes intentions qu’on aura oubliées dans un tiroir dès demain. Ayant dit cela, je me demande pourquoi j’ai laissé dépenser ainsi l’argent du contribuable européen. Réfléchissons si vous le voulez bien un instant à ce que nous pourrions bien faire de toutes ces chartes. J’ai eu la curiosité de chercher dans le dictionnaire le sens du mot charte. Je lis : « La charte est une loi fondamentale (Charte des droits de l’homme). C’est un titre qui attribuait des intérêts, des privilèges accordés par le souverain et non par les représentants du peuple. » « Il s’agit donc bien de droits, de règles dont le citoyen peut se prévaloir et doit respecter. Cela d’autant que le Conseil des ministres libanais les a, lui-même, adoptés. J’en conclus que c’est à partir du travail que vous allez faire aujourd’hui que devra s’inspirer le législateur. J’en conclus que ce travail, ces chartes ne sont finalement pas une perte de temps et d’argent si on décide vraiment de les appliquer. Appliquer la loi. Mais quel intérêt ? J’en vois au moins deux en ce qui concerne le patrimoine : l’avenir économique du Liban et votre fierté nationale. »

«La charte du citoyen ? C’est bien. C’est toutefois la charte du responsable qu’il faudrait élaborer », a déclaré hier le ministre de la Culture Ghazi Aridi, lors de la séance inaugurale du séminaire sur la charte du citoyen pour le patrimoine, organisé par le ministère d’État à la Réforme administrative. Fustigeant les méthodes obliques des gouvernants, mais aussi les...