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Actualités - CHRONOLOGIE

DINARS IRAKIENS - Abou Darwiche, Mekattaf et Jreissaty remis en liberté, mais leurs passeports sont toujours confisqués Des commissions rogatoires à Bagdad et à Beyrouth pour complément d’enquête

Comme prévu, les trois personnes placées en garde à vue dans l’affaire des dinars irakiens ont été relâchées hier. Mohammed Abou Darwiche, Michel Mekattaf et Richard Jreissaty auront passé ainsi cinq nuits aux arrêts au Palais de justice pour les besoins de l’enquête. Mais s’ils sont désormais libres, leurs passeports sont toujours entre les mains de la justice et ils doivent se tenir prêts à se présenter à toute nouvelle convocation du parquet. Car l’enquête n’est pas encore close et ce sera à la commission de contrôle des banques de décider si le transfert de 19,5 milliards de dinars irakiens neufs de Bagdad à Beyrouth s’inscrit ou non dans le cadre du blanchiment d’argent. En attendant, les billets, rangés dans leurs caisses, resteront placés sous le contrôle de la justice. Comme à son habitude, le procureur général près la Cour de cassation, M. Adnane Addoum, a un débit rapide et répond aux questions par rafales, mais il n’en néglige aucune et n’est pas avare de son temps pour écouter les interrogations des citoyens, transmises par les journalistes. Le sujet du jour, c’est bien sûr l’avion privé venu d’Irak et transportant 21 caisses de dinars tout neufs (l’équivalent de 12 millions de dollars), en plus de ses trois passagers, MM. Mohammed Abou Darwiche, Michel Mekattaf et Richard Jreissaty. L’arrivée de tout cet argent, mercredi dernier à l’AIB, sans que les autorités douanières n’en aient été informées, avait attiré l’attention de la justice qui avait aussitôt décidé l’ouverture d’une enquête. Les trois hommes avaient été placés en garde à vue et toute la République s’était mobilisée pour connaître le fin mot de l’histoire, alors que certaines parties se demandaient si l’affaire n’était pas amplifiée pour régler quelques comptes avec l’ancien président de la République, M. Amine Gemayel, beau-père de M. Mekattaf et connaissant la famille de M. Abou Darwiche. Rumeur sur un complot... D’ailleurs, selon des sources judiciaires, les questions du parquet ont essentiellement porté sur l’identité des destinataires de la somme et le but de l’envoi de tant d’argent. Une rumeur circulait en effet au sujet d’un complot qui aurait été ourdi par certaines parties américaines avec la complicité de personnalités libanaises et l’argent ainsi envoyé aurait été destiné à lancer un vaste mouvement de contestation pour renverser le régime. Les premières déclarations du chargé d’affaires irakien à Beyrouth, M. Tayssir Alwane, vendredi, rapportées par le procureur Addoum, avaient ajouté au climat de suspicion, puisqu’il avait affirmé, toujours selon le procureur, que son gouvernement n’était pas au courant du transfert de fonds. Le lendemain, samedi, M. Alwane se serait rendu chez le président Gemayel et il aurait, entre-temps, reçu des documents envoyés par le ministre de l’Intérieur irakien, M. Nouri Badrane, attestant que les 19,5 milliards de dinars irakiens seraient destinés à être changés en dollars par le changeur Michel Mekattaf, afin d’acheter rapidement des équipements nécessaires pour assurer la sécurité à Bagdad. M. Alwane est alors revenu sur ses précédentes déclarations, affirmant que le transfert s’est opéré le plus légalement du monde et il a ajouté que des documents officiels irakiens seraient envoyés incessamment à Beyrouth pour confirmer ses propos. Il s’est d’ailleurs rendu dans la matinée d’hier au siège du ministère libanais des Affaires étrangères pour réitérer ses affirmations et annoncer que la confirmation du document envoyé par le ministère irakien de l’Intérieur devrait arriver au Liban dans les règles. Manifestation à Bagdad contre le ministre de l’Intérieur Pourtant, le procureur Addoum a préféré ne pas se contenter de ces déclarations. Pour lui, l’enquête ne sera close que lorsque les faits seront établis clairement et sans aucune possibilité de contestation. Aux journalistes qui l’interrogeaient, il a affirmé qu’il était tenu à une grande vigilance parce que la somme est très importante et que les autorités libanaises ne pouvaient considérer un fax du ministère de l’Intérieur irakien comme un document officiel. À la question de savoir si la manifestation de 200 Irakiens, hier, devant le siège du gouvernement transitoire à Bagdad, pour réclamer la démission du ministre de l’Intérieur, M. Nouri Badrane, accusé de corruption, pour avoir permis le transfert de 19,5 milliards de dinars vers Beyrouth, était considérée comme un nouveau développement dans l’enquête libanaise, M. Addoum a répété : « J’attends les documents officiels, envoyés par le ministère irakien des Affaires étrangères. » M. Addoum a ensuite précisé qu’il allait envoyer des commissions rogatoires à Bagdad pour connaître les dessous de l’affaire. M. Addoum a encore déclaré qu’il comptait adresser une copie du dossier et de l’enquête préliminaire à la Banque centrale afin que la commission spéciale chargée d’enquêter sur les crimes de blanchiment d’argent mène ses propres investigations sur la question, quitte à lever le secret bancaire sur les avoirs des personnes concernées. Ce n’est qu’après le résultat de cette enquête que l’on pourra annoncer des décisions définitives, si l’opération est claire et saine et décider si l’argent sera débloqué et remis à qui de droit. Sans le dire clairement, le procureur a nié toute implication politique dans cette affaire et a affirmé que la justice fait son travail, indépendamment de toute autre considération. « Le transfert d’une telle somme d’argent, et un changeur qui attend pour transformer les dinars en dollars, il y a là de quoi attirer l’attention des moins méfiants. Notre but est uniquement de veiller à ce qu’il n’y ait aucune fraude ou blanchiment d’argent », a-t-il martelé. MM. Abou Darwiche, Mekattaf et Jreissaty doivent donc attendre la fin de l’enquête pour se sentir réellement libres. Joint au téléphone, M. Jreissaty a déclaré à L’Orient-Le Jour qu’il avait été bien traité aux arrêts du Palais de justice, mais qu’il préférait ne pas trop s’étendre sur l’enquête avant que celle-ci ne soit clôturée. Il a répété qu’il travaille actuellement en Irak et qu’il connaît Abou Darwiche et Mekattaf, mais que lorsqu’il a pris l’avion, il ignorait tout de sa cargaison. M. Michel Mekattaf, lui, a été ramené chez lui par son beau-frère, le député Pierre Gemayel, qui s’est refusé à toute déclaration à la presse. Quant à M. Mohammed Abou Darwiche, c’est son père, Issam, qui l’accompagnait. Mais il a précisé à la presse que les documents officiels réclamés par les autorités libanaises doivent être transmis incessamment par le ministère des AE au parquet. L’affaire pourrait donc se terminer rapidement et tout devrait rentrer dans l’ordre le plus tôt possible. Mais l’alerte a été chaude et, dans le climat actuel en Irak et surtout au Liban, une telle opération ne pouvait passer inaperçue. Scarlett HADDAD
Comme prévu, les trois personnes placées en garde à vue dans l’affaire des dinars irakiens ont été relâchées hier. Mohammed Abou Darwiche, Michel Mekattaf et Richard Jreissaty auront passé ainsi cinq nuits aux arrêts au Palais de justice pour les besoins de l’enquête. Mais s’ils sont désormais libres, leurs passeports sont toujours entre les mains de la justice et ils doivent se...