Mais il n’y a pas de formule magique. La formation d’une nouvelle équipe obéit, forcément, à ces mêmes critères consensuels de départ, qui volent en éclats une fois le cabinet en place. C’est-à-dire qu’il doit s’agir d’une équipe composée en base d’un accord dit d’équilibrage, qui est en fait un partage des strapontins entre principales tendances taëfistes. On ressort donc, comme jadis, comme toujours, la devise salamiste du ni-ni : ni vainqueur ni vaincu.
Et Hariri, alors ? Il ne suffira pas, assure-t-on, de l’éjecter. Ce qui d’ailleurs pourrait s’avérer politiquement impossible, malgré la nécessité d’une meilleure entente entre les têtes de l’Exécutif. Il faut donc poser différemment l’équation : plutôt que de se focaliser sur les relations interprésidentielles, plutôt même que de s’entendre sur des noms déterminés, l’on doit se préoccuper de tracer une ligne bien claire que le gouvernement n’aura plus qu’à suivre. C’est-à-dire qu’il faudra, avant toute chose, élaborer une stratégie politique, économique, financière et sociale que toutes les parties s’engageraient à développer ensemble. Dans la foulée du projet de budget 2004 que le présent gouvernement est appelé à défendre devant la Chambre. Texte qui resterait d’ailleurs modifiable dans sa teneur pratique, en fonction des priorités que le prochain ministère se fixerait. Certains suggèrent même que, pour ne pas embrouiller ni compliquer les choses, le nouveau gouvernement soit formé avant l’adoption du budget. Qu’il pourrait récupérer pour le retoucher à sa guise. Mais cela signifierait, à coup sûr, que pour quelques mois on aurait à se rabattre sur la règle, pénalisante en termes de dynamique économique, du douzième provisoire.
Le ministre de l’Information Michel Samaha souligne, pour sa part, les aléas et les limites d’un changement ministériel. Il relève que tout dépend évidemment des circonstances. Mais que l’on est en droit d’attendre, si nouveau gouvernement il doit y avoir, une meilleure cohésion, un rendement accru. En laissant donc entendre que cela n’est pas acquis d’avance. D’autant que le départ des Trente et leur remplacement devraient s’effectuer sans secousse, en base d’un accord clair. Ce qui ne semble pas garanti non plus, peut-on logiquement déduire. En effet, il faudrait en passer par des négociations serrées. Pour obtenir l’accord de tous, (notamment des présidents et de la Syrie) sur la personnalité chargée de diriger le nouveau gouvernement. Puis par des pourparlers encore plus ardus pour choisir les ministres et distribuer les portefeuilles.
Il reste que si les Trente devaient partir, il semblerait normal d’attendre de leurs remplaçants une proclamation d’attachement à la Constitution, en son article 49. Autrement dit, la compensation serait que le pouvoir s’engagerait à ne pas ouvrir la voie à la reconduction. Le consensus tacite serait dès lors qu’on commencerait par Hariri un changement appelé à se généraliser, à tous les niveaux et dans tous les domaines étatiques. À travers, notamment, des élections législatives produisant, en 2005, un Parlement de vraie représentation.
Émile KHOURY
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