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RENCONTRE Richard Kandalaft : Le violon, instrument des anges et roi des instruments (photo)

Chemin tortueux et dédale difficile que de maîtriser le violon dans ses poussées orientales. C’est comme un superbe et farouche alezan qu’on ne dompte qu’à un prix inestimable… Langage particulier de cet instrument qui peut être torrent de larmes, chant de rossignol, déchirante complainte ou rire perlé. Instrument rebelle et particulièrement ardu, le violon n’en est pas moins « l’instrument des anges et le roi des instruments » pour Richard Kandalaft, premier violon (ils sont seize) de l’Orchestre national arabe oriental, qui a fait depuis l’an 2000 (date de sa fondation) les belles soirées à Beyrouth des mélomanes férus de musique traditionnelle levantine. Drôle d’histoire (il y a toujours de l’amour fou et de la passion) dans une carrière où la musique est en jeu. À quarante-deux ans, père de quatre enfants, la moustache à ras de poil, épris de son archet qu’il traite comme la prunelle de ses yeux, Richard Kandalaft parle du violon avec déférence et… amour. Une histoire qu’il aurait voulu davantage ancrée dans sa prime enfance. Mais on ne revient pas sur ses pas, n’est-ce pas, et c’est pour cela que ce musicien, qui aime tout autant Mozart ou Bach que Andalib ou Abdel-Halim Hafez, déclare avec philosophie et humour, dans un éclat de rire mi-nerveux, mi-libérateur : « Mieux vaut tard que jamais ! Pour être violoniste professionnel bien entendu ; ce qui coûte en efforts, travail, souffle, ténacité et volonté», souligne-t-il. Et de la volonté il en a eu beaucoup Richard Kandalaft pour surmonter toutes les difficultés et les épreuves et ajuster son coup d’archet aux improvisations inévitables dans toute expression musicale arabe orientale. Pourtant son rêve secret est qu’il fût violoniste soliste. Un peu à l’image de Abboud Abdel-Aal. Et il n’hésite pas à confier : « Si j’avais commencé plus tôt, j’aurai aimé être plus performant. En Occident, un violoniste interpréte ce qu’il a étudié. En musique orientale, on joue des airs non tracés sur des partitions ; la part d’improvisation est certes intéressante mais aussi surprenante… D’où l’on peut même parler d’un certain sens de la débrouillardise. De toute façon, je me suis bien battu pour arriver là où je suis. »
En effet, lui aussi, en plus aujourd’hui d’une carrière stable à l’Orchestre national, lui qui joue sur une copie de Stradivarius, a accompagné les vedettes arabes tels Ragheb Alamé, Nawal el-Zoghbi, Saber el-Roubahi, pour ne citer que ceux-là.
Que de chemin parcouru pour ce jeune homme qui voulait devenir ingénieur civil et qui finit dans les sanglots longs du violon ! Bien du chemin aussi sépare cet adolescent qui voyait son père se délecter du chant du oud et des envolées de la musique arabe, tandis qu’il s’efforçait de rendre toute sa netteté au son du violon sous les directives de Hassan Salfiti, Joseph Chamaa et, plus récemment, Hagop Emeyian. Images du passé qui ressurgissent soudain, et avouer que c’est par le violon «classique» que tout a commencé. Regret de n’avoir pas étudié la musique orientale ? Humilité de confesser la difficulté d’accorder le violon ? Désir de sauvergarder sa famille par le biais de son coup d’archet, et priorité de l’une et non de l’autre ? Rêve d’être chef d’orchestre quand le son de ses cordes se confond à l’ensemble des violons qui jouent à l’unisson ?
Inextricable musique qui perd de plus en plus son identité car l’oriental est actuellement turc ou grec alors qu’il fut pour un bon bout de temps égyptien. Mondialisation qui emboîte le pas même aux notes les plus volatiles.
Dernier aveu de Richard Kandalaft, presque constamment aux aguets de cet instrument que nul ne maîtrise impunément : « Oui, en effet, plus on étudie le violon, plus les difficultés et les secrets sont innombrables. » On sait que l’art est difficile. Dernier coup d’archet, maestro, pour mieux rêver et s’envoler…

Edgar DAVIDIAN
Chemin tortueux et dédale difficile que de maîtriser le violon dans ses poussées orientales. C’est comme un superbe et farouche alezan qu’on ne dompte qu’à un prix inestimable… Langage particulier de cet instrument qui peut être torrent de larmes, chant de rossignol, déchirante complainte ou rire perlé. Instrument rebelle et particulièrement ardu, le violon n’en est pas moins «...