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Actualités - CHRONOLOGIE

Sérail Les activités de Hoss

Le camp de Aïn el-Héloué – le plus grand du Liban – est en ébullition. Depuis vendredi, il vit au rythme des territoires occupés, suivant minute par minute les développements à Gaza et en Cisjordanie. Jeunes ou vieux, femmes ou enfants, tout le monde est au courant des moindres détails et se montre impatient de connaître la suite. «La nouvelle intifada», comme on l’appelle ici, a très vite rétabli les liens entre les réfugiés sur leur propre sol et ceux qui se trouvent au Liban, plus que jamais unis face à un même destin. Les images des jeunes de là-bas, qui affrontent à mains nues les soldats israéliens, ont redonné de l’espoir à ceux d’ici. «Nous souhaitons organiser une marche pacifique jusqu’aux frontières avec la Palestine occupée», disent les réfugiés de Aïn el-Héloué. Mais les autorités libanaises, ne voulant pas assumer une telle initiative, font la sourde oreille, et pour l’instant, le colonel Mounir Maqdah, responsable des milices du Fateh, affirme qu’il n’est pas question de les défier. Les écoliers du camp de Aïn el-Héloué n’ont pas attendu ce matin pour commencer leur grève et leurs manifestations. À peine sortis de leurs écoles, dans l’après-midi d’hier, ils ont commencé à sillonner les rues étroites du camp, scandant des slogans de solidarité avec leurs compatriotes des territoires et des menaces contre les Israéliens. Ils sont surexcités et ne savent pas comment exprimer leur colère et leur révolte. Leurs aînés les laissent faire, conscients qu’il vaut mieux canaliser l’émotion des jeunes du camp plutôt que de la réprimer, prenant ainsi le risque de la voir exploser. Tous ont le cœur rempli des images fortes retransmises par toutes les télévisions du monde, et au-delà du sentiment d’injustice, c’est un formidable élan d’espoir qui les soulève. Les oubliés des solutions prévues par les accords d’Oslo estiment que les cartes sont de nouveau mélangées et que le chemin «des concessions sans limites» est en train de se bloquer. Des opérations contre les colons Le plus heureux est sans conteste le colonel Mounir Maqdah, ce combattant de la première heure, qui, depuis trente ans, porte les armes pas toujours contre la bonne cible, mais toujours pour la même cause : la libération de la Palestine. D’abord responsable au sein du Fateh, Maqdah a abandonné ses anciens compagnons après la signature des accords d’Oslo en 1993. Il s’est laissé tenter par l’islamisme et aujourd’hui, après de multiples réunions avec Farouk Kaddoumi (Abou Lotf), il est devenu depuis six mois le responsable des milices du Fateh, tout en gardant ses liens avec l’Armée populaire palestinienne et les unités du 13 Septembre noir. En d’autres termes, il est l’homme fort du camp de Aïn el-Héloué et la cible de plusieurs tentatives d’assassinat, dont la dernière remonte à quelques mois, lorsque «des inconnus» avaient versé un produit chimique fatal dans ses chaussures alors qu’il priait dans la mosquée. Sa maison ayant été atteinte de plein fouet par les hélicoptères israéliens en 1996, il vit désormais dans un ancien bureau du Fateh qu’il a lui-même réaménagé. Maqdah est heureux parce que les derniers événements semblent lui donner raison. Sept ans après les accords d’Oslo, les négociations sont bloquées et les Palestiniens se révoltent. «J’avais prédit tout cela, mais personne ne voulait me croire». Maqdah est prêt à prendre les armes, qu’il n’a jamais réellement abandonnées. Mais il estime que pour l’instant, ce n’est pas nécessaire. «Tant que nos frères là-bas tiennent bon, nous ne pouvons que les soutenir médiatiquement. Mais s’ils s’essoufflent ou si on les mate, nous reprendrons le flambeau». Des opérations à partir du territoire libanais ? «Nous commencerons par la Jordanie, la Syrie, puis le Liban». Même s’ils n’obtiennent pas l’accord des autorités ? «Le président Lahoud a lui-même déclaré à plusieurs reprises qu’il n’y a pas de sécurité pour Israël tant que le problème des réfugiés palestiniens ne sera pas réglé. En menant une action à partir du Liban, nous ne ferons que confirmer ses propos et il pourra alors dire à la communauté internationale : c’est votre responsabilité, faites quelque chose». Selon Maqdah, le Liban subit de très fortes pressions de la part de la communauté internationale visant à le pousser à désarmer les camps palestiniens et le Hezbollah et à demander le retrait des troupes syriennes. Il estime aussi que le report de la conférence des pays donateurs serait lié à ces pressions. «Mais le président Lahoud a prouvé qu’il était un homme de conviction et qu’il ne cédait pas facilement». On le dit lui-même assez proche des services de renseignements... Maqdah éclate de rire. Sa cause, c’est la Palestine, et sa ligne de conduite : la résistance. Il n’a que faire des rumeurs qui circulent à son sujet. Aujourd’hui, il est heureux de voir le réveil de son peuple, que toutes les tentatives de compromis ne parviennent pas à tuer. Mais que se passera-t-il si, demain, la rébellion se calmait et Arafat et Barak se retrouvaient pour un nouveau round de négociations ? «Il y aura alors des opérations contre les juifs et notamment contre les colons. Il ne sera pas facile d’éteindre le feu allumé par l’oppression et l’injustice. Et même si cela devait arriver, nous prendrons la relève jusqu’à ce que la révolte des territoires se réveille à nouveau». L’impossible coexistence Cela se terminera-t-il un jour ? «Oui, lorsque l’État d’Israël disparaîtra. Ce n’est pas un rêve, mais une certitude pour moi. Cela prendra le temps qu’il faudra, mais c’est inéluctable». Selon lui, la coexistence avec les juifs est impossible et ces derniers ne comprennent pas le langage du dialogue. «La première “intifada” les a obligés à reconnaître une partie de nos droits, la résistance au Liban-Sud les a contraints à se retirer et seule la révolte peut les pousser à faire des concessions». Comment voit-il l’évolution de la situation dans les territoires ? «Pour l’instant, Arafat contrôle la situation à 80 %. Si la révolte se poursuit, les proportions pourraient s’inverser et il faudra alors que toutes les composantes palestiniennes entament un dialogue sérieux sur la politique à suivre en Palestine et avec les pays arabes, qui ne peuvent plus continuer à se taire, car leurs régimes y seront menacés sous la pression populaire». Maqdah ajoute qu’il y a des contacts «avec les autorités pour organiser une marche pacifique jusqu’aux frontières de la Palestine. Le Liban pourrait aussi en profiter». Maqdah, qui dispose «de plusieurs milliers de combattants» (il refuse de donner un chiffre précis), déclare qu’il ne peut envoyer ses hommes en Palestine car ils n’ont aucune chance d’obtenir une autorisation des Israéliens. Par contre, Sultan Aboul Aynayn (représentant officiel de Arafat) disposerait de plus de facilités à partir du camp de Rachidiyé. En tout cas, Maqdah affirme avoir de nombreux liens avec les Palestiniens des territoires et son téléphone d’ailleurs n’arrête pas de sonner, ses hommes là-bas le tenant informé des derniers rebondissements. «Nous avons toujours pensé, dit-il, que Jérusalem et la question des réfugiés sont des lignes rouges. Ce qui se passe montre que nous avons raison. Il y a un million et demi de réfugiés palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, et les Israéliens souhaitent les pousser à l’exode. Selon leur plan, un million devrait être installé en Irak et le reste dans les autres pays arabes. Le Liban devrait garder au moins 150 000 Palestiniens. Ce qui est inacceptable, aussi bien pour les Libanais que pour nous. Il faut donc que la communauté internationale trouve d’autres solutions. Elle a mis tout son arsenal militaire au service du retour des réfugiés du Kosovo. Pourquoi n’exercerait-elle pas des pressions sur Israël afin d’obtenir l’application de ses propres résolutions ?» Dans la rue, le ton monte. La manifestation officiellement prévue pour ce matin a déjà commencé spontanément et les allées étroites du camp grouillent de monde. Chacun veut hurler sa colère et exprimer sa solidarité avec les frères en Palestine. Maqdah surveille de près les mouvements de la foule, craignant un éventuel dérapage. Face à la tension ambiante, il veut rester calme. Mais la responsabilité est grande et le camp de Aïn el-Héloué n’est plus qu’attente, angoisse et excitation...
Le camp de Aïn el-Héloué – le plus grand du Liban – est en ébullition. Depuis vendredi, il vit au rythme des territoires occupés, suivant minute par minute les développements à Gaza et en Cisjordanie. Jeunes ou vieux, femmes ou enfants, tout le monde est au courant des moindres détails et se montre impatient de connaître la suite. «La nouvelle intifada», comme on...