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Actualités - REPORTAGES

Partis politiques - Les élections ont compliqué une situation déjà difficile Mounir Hajj n'entend nullement démissionner

Comme on s’y attendait, les élections législatives qui se sont déroulées les 27 août et le 3 septembre, au lieu d’apporter un début de solution à la crise dans laquelle le parti Kataëb se débat depuis plusieurs années, ont plongé davantage cette formation, qui a vécu des jours fastes couronnés par l’élection de deux présidents de la République sortis de ses rangs, dans une inextricable confusion. Le chef du parti Mounir Hajj, bien qu’il n’ait pas réussi à se faire élire au Metn, a réaffirmé sa détermination à rester à son poste «malgré toute la campagne de pressions menée contre lui par ses détracteurs». Un membre du bureau politique, Maurice Saba, une des figures les moins problématiques du parti, également membre d’une commission de réconciliation formée au lendemain des législatives, a présenté sa démission «par dépit». L’élection de deux députés Kataëb aux législatives, Antoine Ghanem à Baabda et Nader Succar à Baalbeck, n’a pas réussi à introduire la moindre lueur. Enfin, ceux qui ont écouté l’ancien chef de l’État Amine Gemayel parler du parti sur les ondes de La Voix du Liban, sont restés sur leur faim, M. Gemayel n’ayant pas avancé la moindre proposition susceptible d’être considérée comme un début de solution. Tout le monde s’attendait le 28 août dernier, c’est-à-dire au lendemain du premier dimanche des législatives, à la démission de M. Hajj de la présidence du parti. Il n’en a rien été. Promettant de se prononcer sur la question pendant deux réunions consécutives du bureau politique et du conseil central les lundi 28 août et 4 septembre, ce n’est que le lundi 11 septembre qu’il a abattu ses cartes en «refusant de présenter sa démission» malgré toutes les pressions que ses détracteurs tentent selon lui d’exercer à son encontre. Il faut dire que M. Hajj n’innove pas en la matière. Déjà avant lui, l’ancien chef du parti, Georges Saadé, lui aussi candidat malheureux au Nord aux élections de 1996, avait fait de même. Après avoir annoncé, sur un coup d’humeur sa démission – résultat logique de son échec –, il n’a pas tardé à se rétracter dans l’espoir de se voir réhabiliter par ceux-là même qui ne l’ont pas aidé à passer, et est resté à son poste jusqu’à son décès, le 18 novembre 1998. Dans le cas présent on assiste presque au même scénario : on dirait que M. Hajj attend son salut d’ailleurs, cet ailleurs devant être la partie qui l’a aidé, non seulement à conquérir sa position de chef des Kataëb, mais aussi à se présenter aux élections sur une liste supposée être la plus sûre, celle du ministre de l’Intérieur Michel Murr. Les opposants à M. Hajj estiment, quant à eux, que le chef du parti se doit doublement de démissionner : d’abord parce qu’il a perdu les élections, et dans l’éthique politique cette démission doit aller de soi, et ensuite parce que son échec est précisément dû aux membres et sympathisants du parti, nombreux au Metn, qui ont préféré reporter leurs voix sur le petit-fils de l’ancien fondateur des Kataëb, Pierre Amine Gemayel, dont le succès a été interprété comme le signe de leur défiance envers celui qu’ils considèrent comme infidèle aux valeurs du parti. Les opposants considèrent que le vote-censure du 3 septembre est la conséquence d’une politique qui a été sanctionnée par les urnes et dont l’instigateur a perdu toute légitimité lui permettant de garder son poste. Deux députés et deux problèmes Contrairement à la Bérézina de 1996, les dernières élections ont permis au parti Kataëb de reconquérir deux sièges au Parlement, le premier avec Antoine Ghanem dans la circonscription de Baabda-Aley et le second avec Nader Succar à Baalbeck-Hermel. Mais, ces deux victoires, contre toute logique, n’ont pas réussi à recréer le moindre courant de cohésion au sein du parti. Les observateurs imputent ce fait à deux raisons : la première c’est que le parti ne peut ramener la réussite de M. Succar à une quelconque contribution de sa part. Depuis plusieurs années, le nouveau député maronite de Baalbeck a entrepris une vaste campagne de relations publiques auprès de plusieurs pôles d’influence. Ceci a été couronné par sa députation qu’il ne doit essentiellement qu’à ses efforts personnels. Son action lui a permis, non seulement de faire admettre sa candidature par le parti, mais aussi et surtout de se faire élire sur une liste forte avec comme principaux partenaires des membres du Hezbollah et du PSNS. Membre du parti, mais ne lui devant presque rien pour son élection, M. Succar est l’un des alliés de M. Hajj au service de qui il semble vouloir mettre sa grande capacité de manœuvre. Tel n’est pas le cas de M. Ghanem, très respectueux des principes du parti, mais aussi très proche de l’ancien chef de l’État Amine Gemayel qui commence à faire figure, depuis son retour d’exil, de rassembleur. Pris entre ces deux allégeances : la présidence du parti à qui il doit partiellement son élection – certaines sources concordantes affirment que l’intervention de M. Hajj auprès du chef du PSP Walid Joumblatt a été déterminante pour l’acceptation de M. Ghanem sur la liste joumblattiste – et son amitié envers M. Gemayel, le nouveau député de Baabda voit sa marge de manœuvre réduite de façon sérieuse, ce qui prive le parti des effets bénéfiques de ce succès électoral. Ainsi, ces deux nouvelles députations, dont le parti espérait pouvoir tirer des dividendes politiques logiques, ont, contrairement à ce qu’on attendait d’elles, contribué davantage à l’enlisement du parti dans ses nombreuses contradictions. Blocages et démissions Depuis plusieurs mois, le bureau politique du parti se réunit amputé d’une bonne moitié de ses membres, qui ont préféré adopter la politique du boycottage pour amener le chef du parti, soit à démissionner, soit à engager les réformes qu’ils jugent indispensables pour une relève possible. Cet absentéisme s’est même aggravé depuis les législatives. Une telle faille dans la marche strictement administrative du parti est doublée d’une nette divergence de vues entre le secrétaire général Antoine Chader et le chef du parti, au point même que certains communiqués contradictoires, publiés par les deux hommes, sont parvenus à la presse. Mais le dernier événement à signaler dans cette cacophonie c’est la démission de Maurice Saba, membre du bureau politique et premier trésorier du parti. Des sources qui lui sont proches ont révélé que ce dernier entendait par son geste «provoquer une réaction bénéfique qui amènerait toutes les parties à une prise de conscience salutaire pour le parti». Ces mêmes sources rapportent par ailleurs que M. Saba «refuse de jouer les faux témoins», excédé qu’il est par la volonté de M. Hajj de poursuivre sa politique, alors qu’il est, numériquement et moralement, minoritaire au sein du parti. En démissionnant, M. Saba, toujours d’après ses proches, tente d’exprimer aussi bien le ras-le-bol d’une importante tranche de partisans, qui souffrent de voir leur parti sombrer à cause de la querelle des chefs que leur désarroi face à une situation de plus en plus complexe. Au lendemain des législatives, M. Saba avait formé, avec quatre de ses collègues, un comité de bons offices qui a entrepris une vaste campagne de contacts pour tenter de dégager un consensus qui mettrait le parti à l’abri, au moins provisoirement, d’une grande crise. Constatant l’ampleur des blocages, qui rendent tout sursaut impossible, M. Saba a préféré démissionner, indiquant par là son refus d’assister, en spectateur passif, à la fin d’un parti auquel plus d’un continue à croire. Espoir et incertitudes Indéniablement, le retour du président Gemayel après 12 ans d’exil forcé a soulevé un enthousiasme certain, notamment au sein d’une partie du camp chrétien. Les résultats ne se sont pas fait attendre : son fils Pierre l’a emporté au Metn, et une partie des militants Kataëb n’ont pas hésité à venir faire acte d’allégeance à Bickfaya. Les visites échangées entre MM. Gemayel et Joumblatt ont contribué à donner à ce retour un air de victoire sur l’adversité. Tout ceci n’est pas pour faciliter la tâche du chef du parti qui, outre le fait qu’il s’est vu privé de son siège de député constate avec amertume que beaucoup de partisans ont opté pour une certaine légitimité de la famille Gemayel, plutôt que pour la légalité, maintes fois bousculée et maintes fois invoquée pour le secours des uns et des autres. Ce tableau plus qu’alarmant pour les Kataëb, M. Gemayel n’a pas manqué de l’évoquer lors d’une récente interview à La voix du Liban, en s’abstenant toutefois d’avancer des propositions concrètes, ce qui n’a pas manqué de décevoir ceux qui attendaient de le voir s’exprimer sur un plan de sauvetage. En outre, le retour de M. Gemayel ne fait pas l’unanimité au sein des différentes fractions du parti. Si certaines préfèrent encore attendre avant de choisir leur camp, d’autres ont déjà affirmé leur refus de voir le parti basculer d’un camp à l’autre sans autre forme de procès. Mais avec les slogans populaires entendus lors des deux cérémonies d’Achrafieh et de Mayfouk les 4 et 17 septembre, et avec le communiqué des prélats maronites du 20 septembre, c’est l’ensemble du parti Kataëb, avec ses différentes composantes, et l’ancien président aussi, qui se retrouvent piégés face à une rue chrétienne qui se rallie aux thèses les plus extrémistes. D’autant que cette radicalisation rend pâle la bataille des chefs pour la domination du parti Kataëb.
Comme on s’y attendait, les élections législatives qui se sont déroulées les 27 août et le 3 septembre, au lieu d’apporter un début de solution à la crise dans laquelle le parti Kataëb se débat depuis plusieurs années, ont plongé davantage cette formation, qui a vécu des jours fastes couronnés par l’élection de deux présidents de la République sortis de ses rangs,...