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Actualités - ANALYSE

Les partisans de la loi électorale se retournent contre elle

Dans les cercles politiques, on s’émerveille aujourd’hui de voir le président de la Chambre pousser le culte de la démocratie jusqu’à l’autocritique la plus virulente. En effet, M. Nabih Berry se déchaîne maintenant contre une loi électorale qui aurait difficilement passé sans son assentiment. Et qu’il a du reste défendue bec et ongles, en ce qui concerne le chapitre Sud. Aujourd’hui, il impute à ce texte le climat de «Asfourieh», entendre de démence, qui marque les présentes élections. Avant de conclure en exhortant la prochaine législature à rectifier le tir, en modifiant le découpage de circonscriptions dès son entrée en fonctions et non pas la dernière année. «Il y a là, note un professionnel, un revirement tout à fait remarquable. Car le président Berry a été le plus chaud partisan de ce découpage électoral discriminatoire. L’important bloc parlementaire qu’il dirige n’a pas peu contribué à faire passer le texte haut la main, place de l’Étoile. Nul n’ignore que M. Berry a de la sorte obtenu un privilège politique exorbitant : le maintien de l’unité électorale des deux mohafazats du Sud, même après le retrait israélien. De la sorte, le président de la Chambre a pu reconstituer la liste «bulldozer» de 1996, susceptible d’écraser sur son passage toute velléité de représentation de la vraie volonté populaire. En effet, si l’on avait adopté le caza, qui produit une représentation de proximité pointue, Jezzine, par exemple, aurait pu choisir librement ses députés. Ce qui n’est plus le cas, du moment que les voix de la région s’engloutissent dans un ensemble trop grand». Abondant dans le même sens, une autre personnalité politique juge qu’il est «tout simplement honteux que chaque pouvoir adopte une nouvelle loi électorale à sa convenance. Et que le découpage soit arrangé en fonction des loyalistes du moment. Ce qui donne des législatures en rupture de ban par rapport aux composantes du pays social ou politique. Le cas présent est d’autant plus déplorable qu’au départ, le président de la République avait plaidé pour une loi équilibrée, assurant l’égalité entre tous, à travers des critères de découpage unifiés. Comme on ne le sait que trop, il n’en a rien été du tout. On n’a suivi aucune règle, ni le mohafazat, ni le caza, ni une subdivision ou une multiplication uniforme de l’un ou de l’autre. Certes, le chef de l’État n’a pas commenté favorablement la nouvelle loi lors de sa parution. Il a alors relevé qu’elle n’est ni juste ni équilibrée, mais en ajoutant que c’est le confessionnalisme qui en est cause. Si le président de la République avait renvoyé le texte à la Chambre, le président Berry et la majorité des parlementaires auraient insisté pour son maintien tel quel. Le régime a donc préféré éviter le risque d’une confrontation entre les pouvoirs, car la date des élections était devenue trop proche». D’autres sources doutent qu’il n’y ait pas eu un accord préalable entre les institutions concernées. Toujours est-il que les opposants traditionnels ne voient pas dans le revirement de M. Berry un ralliement à leur cause. «En effet, souligne l’un d’eux, le président de la Chambre est toujours partisan, car il y trouve son intérêt électoral, de la formule du mohafazat. Or une circonscription aussi élargie n’assure pas la représentation authentique des différentes collectivités qui peuplent une région. Surtout en l’absence d’un taux de proportionnelle. De plus, le mohafazat est un moyen commode pour les parachutages de nantis qui paient leur ticket ou de gens souhaités par les décideurs et qui n’ont rien à voir avec les habitants. Sans compter que, dans ce que l’on appelle le brassage, on ouvre la voie à des affrontements confessionnels. En effet, au niveau du caza, ce sont généralement des candidats qui appartiennent à une même communauté qui entrent en compétition entre eux. Tandis qu’au niveau du mohafazat, les postulants se mesurent aussi aux autres communautés, ce qui provoque des tensions. On peut de la sorte rappeler qu’en 1996, lorsque la Békaa était unifiée, Zahlé et Baalbeck se sont retrouvées à couteaux tirés, alors qu’elles vivent en bonne intelligence quand on ne les mélange pas. De même aujourd’hui, dans le Nord unifié, on voit Zghorta et Tripoli s’entr’accuser de confessionnalisme». Tournant ensuite leurs armes contre le gouvernement, les opposants relèvent qu’il se montre «tout à fait inconséquent : il se plaint du pouvoir de l’argent comme de l’anarchie médiatique. Alors que c’est lui-même qui avait renoncé à soumettre à la Chambre un projet de loi réglementant tout cela. Les dirigeants se tournent tantôt vers la justice, qui n’en peut mais, tantôt vers le Conseil supérieur de l’information, qui n’y peut rien non plus. Et pour couronner le tout, on voit le Conseil des ministres admettre son incapacité à arranger les choses. Il laisse dès lors les médias officiels continuer à se comporter comme s’ils étaient le bien personnel de certains, en attaquant sans vergogne, en diffamant même, des candidats déterminés. Et avec cela, le chef du gouvernement se lamente sur le niveau extrêmement bas atteint par les pratiques électorales, notamment sur le plan des médias ! S’il veut que le ménage soit fait, qu’il commence donc par balayer devant sa propre porte en rappelant à l’ordre les médias officiels».
Dans les cercles politiques, on s’émerveille aujourd’hui de voir le président de la Chambre pousser le culte de la démocratie jusqu’à l’autocritique la plus virulente. En effet, M. Nabih Berry se déchaîne maintenant contre une loi électorale qui aurait difficilement passé sans son assentiment. Et qu’il a du reste défendue bec et ongles, en ce qui concerne le chapitre...