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Actualités - REPORTAGES

Crise économique - L'Orient Le Jour rencontre Abou Rizk et Sarraf, deux jours avant la manifestation décidée par la CGTL Syndicats et patronat : le même cri

Ce n’est évidemment un secret pour personne. La crise socio-économique au Liban est aujourd’hui réellement prégnante. Les Libanais ont cru, plus ou moins fort, aux monts et merveilles que leur a promis le gouvernement Hoss, il y a un an et demi. Et il est évident que cette crise n’a pas été parachutée fin 98, cela fait cinq ans qu’elle dure. Sauf qu’ils ont maintenant la tenace certitude que tout va de Charybde en Scylla. Ils ont également attendu, plus ou moins patiemment, le retrait israélien qu’on leur promettait comme étant une des conditions majeures à un éventuel assainissement. Là encore, on ne pouvait décemment pas s’attendre à un chamboulement en deux mois. Aujourd’hui, à moins de deux mois des élections législatives, et donc de la formation d’un nouveau gouvernement, la récession, le marasme, et le gros malaise qui en découle, se muent de jour en jour en des signaux de plus en plus clairs, de plus en plus dangereux. Petit rappel. Il y a d’abord le prix de l’essence qui, en un an et demi, est passé de 10 500 à 17 000 LL, subissant ainsi une augmentation d’environ 62 %. «Il serait simpliste d’attribuer la crise économique à l’augmentation du prix de l’essence, la crise est beaucoup plus profonde que cela. Elle atteint tous les secteurs, et ses causes sont désormais connues de tous, à savoir les retombées des quinze années de guerre», avait déclaré il y a quelques jours le ministre du Pétrole, Sleiman Traboulsi, qui avait également souligné que «l’État n’a(vait) pas les moyens de soutenir les prix des carburants». Et au-delà de cette augmentation, ce sont les 6 000 LL de taxe directe qui fédèrent en un même refus population, CGTL et Association des industriels. À l’usine Eternit de Chekka, les 274 ouvriers sont en grève ouverte depuis plus d’une semaine : ils n’ont pas été payés depuis 14 mois. Même son de cloche au syndicat des enseignants, 3 000 d’entre eux menaçant d’être licenciés par les écoles privées. Et il n’y a pas que le secteur privé qui pâtisse de la crise : les revendications des employés de l’Office des eaux de Baalbeck se font de plus en plus nombreuses. Une étude sur la pauvreté au Liban, établie par Boutros Labaki, parle de la période actuelle, c’est-à-dire depuis 1995, et constate un ralentissement caractéristique de la croissance économique. De 7 % par an en 95, elle est passée à 3,5 % en 96, 3 % en 97, et entre 0 et 1 % en 98 et 99. Conséquence directe : un chômage et une émigration continuellement en croissance : entre 97 et 98, 350 000 Libanais quittent le pays, et le chômage, tombé à 7 % dans la première partie de la décennie, tourne actuellement autour des 22 %. D’autre part, un ensemble d’indicateurs confirme la détérioration du niveau de vie : des parents arrivent de moins en moins à scolariser leurs enfants dans les écoles privées payantes et se retournent vers les écoles publiques gratuites, entre 97 et 99, plus de 100 000 élèves ont ainsi basculé vers les écoles publiques. Au-delà de ces chiffres, la nécessité de refondre complètement l’enseignement au Liban, afin de niveler vers le haut le niveau entre les écoles privées et les écoles publiques, se fait impérieuse, et l’évidence de cette nécessité tombe sous le sens. Enfin, cette pauvreté a aussi un aspect régional : les régions périphériques du Liban, Békaa-Nord et Akkar, et les régions déplacées du Mont-Liban sont certainement les plus touchées. D’autre part, et paradoxalement, le rapport économique pour le premier trimestre 2000 parle d’une légère amélioration de la production industrielle et agricole, comme en témoignent les exportations, elles sont en progression de 25 % par rapport à leur niveau de la période équivalente de 99. Il n’empêche, il n’y a que 91 nouvelles entreprises industrielles qui ont été créées au premier trimestre 2000, contre 141 l’an dernier, soit une baisse de 29 %. Quant au secteur de la construction, il a continué sa régression, les permis de construire délivrés par l’Ordre des ingénieurs ayant diminué de 8,6 %. Enfin, les principaux indicateurs du commerce et des services, les importations, l’activité du port et de l’aéroport, soulignent l’atonie ambiante. Et la consommation des ménages a régressé, en termes réels, de près de 6 %. À la lumière de tout cela, et dans deux jours, une manifestation à l’appel (pressant) de la CGTL se déroulera, à l’heure où le Conseil des ministres sera réuni, entre la place Béchara el-Khoury et le Sérail. À cette occasion, les présidents de la CGTL et de l’Association des industriels, Élias Abou-Rizk et Jacques Sarraf, ont accordé, chacun de son côté, une interview à L’Orient-Le Jour, au cours de laquelle, en marge de leurs divergences fondamentales et nécessaires, les deux hommes ont mis en exergue de nombreux points, de nombreuses revendications communes. Le fédérateur et le porte-parole des ouvriers, ainsi que le patron des patrons sont au moins d’accord sur une chose, et pas des moindres, des plus essentielles : la politique socio-économique du gouvernement Hoss, qu’ils vilipendent tous deux presque d’une même voix. Face à face.
Ce n’est évidemment un secret pour personne. La crise socio-économique au Liban est aujourd’hui réellement prégnante. Les Libanais ont cru, plus ou moins fort, aux monts et merveilles que leur a promis le gouvernement Hoss, il y a un an et demi. Et il est évident que cette crise n’a pas été parachutée fin 98, cela fait cinq ans qu’elle dure. Sauf qu’ils ont maintenant...