Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Exil - Réédition de l'incident de décembre 98 Gemayel empêché de regagner Beyrouth

Une fois de plus, les autorités libanaises ont «conseillé» au président Amine Gemayel de ne pas regagner le Liban. L’ancien chef de l’État devait arriver à Beyrouth hier en début d’après-midi, à bord de l’avion de la MEA, en provenance de Paris. Il avait décidé de passer par Beyrouth pour se rendre aujourd’hui, jeudi, à Damas afin de participer, à l’invitation de la présidence syrienne, à la cérémonie organisée à Qardaha pour le quarantième du décès de Hafez el-Assad. Le président Gemayel avait prévenu hier matin le palais de Baabda de sa décision de regagner le Liban. Mais une quinzaine de minutes avant d’embarquer sur l’avion de la MEA, il a été averti par l’ambassadeur du Liban à Paris Raymond Baaklini que le secrétaire général du palais Bustros Zouheir Hamdane l’avait contacté pour l’informer que l’invitation (syrienne) adressée au président Gemayel était une «erreur protocolaire» (syrienne) et qu’elle avait été annulée. M. Baaklini en a profité pour «conseiller» à l’ancien chef de l’Etat de ne pas se rendre à Beyrouth. L’avion de la MEA avait été, entre-temps, retardé pour éviter que le président Gemayel prenne place à bord de l’appareil. Il aura fallu faire attendre les passagers plus d’une heure afin de faire descendre les valises de l’ancien chef de l’État … Ce malheureux épisode a suscité de vifs remous dans les milieux locaux. En soirée, le chef du gouvernement (et ministre des Affaires étrangères) Sélim Hoss a réprouvé la démarche effectuée auprès du président Gemayel pour le dissuader de se rendre à Beyrouth. Dans un communiqué de presse publié à l’issue du Conseil des ministres d’hier soir et rapporté par l’Agence nationale d’information (officielle), M. Hoss a souligné que «ce qui s’est produit est le résultat d’un malentendu». «J’enquêterai à ce sujet et je prendrai les mesures qui s’imposent sur ce plan, a-t-il souligné. Je n’ai rien contre la venue de n’importe quel ressortissant libanais au Liban. Cela est son droit et nul ne peut l’en priver». La démarche entreprise auprès du président Gemayel est d’autant plus déplorable qu’il est difficile de comprendre suivant quelle logique un citoyen libanais, et a fortiori, un ancien chef de l’État, est empêché par des autorités responsables de regagner son pays sans raison et sans justification valable. Cette question avait d’ailleurs été soulevée il y a quelques jours par le député du Metn-Nord, Nassib Lahoud, qui avait déploré, dans une interview à la MTV, que le président Gemayel et le général Michel Aoun ne soient pas en mesure de rentrer au Liban. L’affaire survenue hier incite, en tout état de cause, à soulever plusieurs interrogations. Puisque le ministre des Affaires étrangères (M. Hoss) a dénoncé la démarche entreprise auprès de l’ancien chef de l’État, sur ordre de qui le secrétaire général des AE et l’ambassadeur du Liban à Paris ont-ils agi ? En outre, si l’on admet la thèse selon laquelle l’invitation adressée au président Gemayel par la présidence syrienne était une «erreur protocolaire» (comme l’a prétendu M. Zouheir Hamdane), suivant quel principe le palais Bustros a-t-il entrepris d’informer une personnalité libanaise d’une «erreur» commise par une autorité syrienne ? Les observateurs relèvent par ailleurs que cette affaire est particulièrement regrettable parce qu’elle intervient alors qu’il est de plus en plus question de nouvelle politique d’ouverture avec l’arrivée au pouvoir à Damas du président Bachar el-Assad. Ce court-circuitage de l’invitation adressée par la présidence syrienne au président Gemayel est également plus que fâcheux car il survient à un moment où des personnalités proches de Damas (à l’instar du ministre Négib Mikati et du leader du PSP Walid Joumblatt) réclament ouvertement un rééquilibrage des relations entre le Liban et la Syrie. Le communiqué de Gemayel Pour en revenir aux circonstances de cette affaire, elles ont été exposées en détail dans un communiqué publié hier par le président Gemayel. L’ancien chef de l’État a apporté à ce sujet les précisions suivantes : «Le vendredi 14 juillet, j’ai reçu de la direction du protocole à la présidence syrienne une invitation personnelle et officielle (n° 578) à assister jeudi 20 juillet à la cérémonie organisée à Qardaha pour le quarantième du décès du président Hafez el-Assad. Cette invitation a été envoyée à mon domicile de Sin el-Fil, avec une mention stipulant qu’elle devait être transmise à mon domicile à Paris. Après avoir pris connaissance du discours d’investiture du président Bachar el-Assad, dans lequel j’ai perçu un appel clair à élever les relations libano-syriennes au niveau requis, j’ai estimé qu’il était opportun et nécessaire, dans l’intérêt des deux pays, d’accepter l’invitation, d’autant que cette démarche était conforme à mes appels répétés en vue de suivre une politique d’ouverture, dans le cadre de la souveraineté du Liban et de la dignité de son peuple». «Dans la journée du mardi 18 juillet, a ajouté le président Gemayel, j’ai informé l’ambassadeur de Syrie à Paris Élias Nejmé que j’accueillais favorablement l’invitation et que j’y donnerai suite. Je lui ai indiqué que je comptais quitter pour Beyrouth le lendemain, soit mercredi 19 courant, pour me rendre à Qardaha jeudi 20 courant. L’ambassadeur syrien m’a remercié de cette initiative et m’a annoncé qu’il informerait Damas de ma décision d’accepter l’invitation». «À 8 heures du matin, ce mercredi (hier), et avant de me rendre à l’aéroport Charles de Gaulle à Paris, j’ai pris contact avec le bureau du président Émile Lahoud pour informer le chef de l’État de ma décision, a poursuivi le président Gemayel. À dix heures du matin, soit quinze minutes avant le départ de l’avion de la MEA pour Beyrouth, l’ambassadeur du Liban à Paris Raymond Baaklini est entré en contact avec moi pour m’indiquer qu’il avait reçu un appel du secrétaire général des AE, Zouheir Hamdane, l’instruisant de la nécessité de m’informer par tous les moyens, à l’aéroport, que l’invitation de la présidence syrienne avait été retirée du fait qu’il s’agissait d’une erreur protocolaire. L’ambassadeur Baabklini a usé en outre d’un langage diplomatique pour me conseiller d’annuler le voyage». Interrogé en soirée par L’Orient-Le Jour sur les dessous de cette affaire, le président Gemayel (qui a regagné son domicile parisien) a affirmé ne trouver «aucune explication logique» à ce qui est arrivé hier. L’Agence nationale d’information, par contre, a donné sa propre explication à cette affaire, indiquant que le président Gemayel a «tenté» de regagner Beyrouth et qu’après son arrivée à l’aéroport Charles de Gaulle, il est entré en contact avec l’ambassadeur du Liban pour s’assurer que les mesures protocolaires et sécuritaires avaient été prises pour son retour. «L’ambassadeur Baaklini, ajoute l’Ani, a informé le président Gemayel que l’ambassade du Liban à Paris n’avait reçu aucune instruction à ce propos. Il semble que la réponse de l’ambassade ait poussé le président Gemayel à renoncer à retourner (au Liban) dans l’attente d’autres circonstances». Notons sur ce plan que le président Gemayel avait déjà été empêché par le pouvoir en décembre 1998, peu après l’accession du général Lahoud à la magistrature suprême, de retourner à Beyrouth. Les circonstances avaient alors été quelque peu semblables. Le président Gemayel avait informé le palais de Baabda de sa décision de regagner le Liban, mais près d’une heure avant de prendre l’avion, l’ambassadeur du Liban à Paris l’avait contacté pour lui «conseiller» de renoncer à son voyage.
Une fois de plus, les autorités libanaises ont «conseillé» au président Amine Gemayel de ne pas regagner le Liban. L’ancien chef de l’État devait arriver à Beyrouth hier en début d’après-midi, à bord de l’avion de la MEA, en provenance de Paris. Il avait décidé de passer par Beyrouth pour se rendre aujourd’hui, jeudi, à Damas afin de participer, à l’invitation...