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Actualités - REPORTAGES

Gastronomie - Indochine, restaurant vietnamien résolument authentique Empilement de saveurs (photos)

La princesse Minh Kim («or pur» en vietnamien), nièce de l’empereur Bao Daï, reçoit sa clientèle au restaurant Indochine de l’hôtel Phoenicia avec un français impeccable. «J’ai quitté mon pays pour la Suisse à 10 ans», raconte-t-elle. «Mes frères et sœurs et moi étions séparés de nos parents, et j’ai dû très vite travailler pour subvenir à nos besoins». Elle est pendant plusieurs années mannequin de la maison Carven, mais les défilés ne l’attirent pas. Elle aime passionnément cuisiner, et se souvient parfaitement des étapes «culinaires» de son enfance : «Avec nos gouvernantes, nous nous amusions parfois du côté de la cuisine, et cet endroit de la maison m’attirait déjà beaucoup». C’est sa famille qui goûte au premier plat qu’elle confectionne à 13 ans : «C’était du “pho” (prononcer comme «feu»), c’est-à-dire un potage à base de nouilles aux 5 parfums (cannelle, poivre noir, citronnelle, clou de girofle et fenouil), auquel on ajoute des oignons et du gingembre grillés». Apparemment, la famille a beaucoup apprécié. Mais Minh Kim, modeste comme seuls savent l’être les Extrême-Orientaux, s’empresse d’ajouter que c’est sa sœur aînée, élève d’une école hôtelière, qui lui a appris les rudiments de son futur métier. «Comme au Liban, les jeunes filles au Vietnam doivent être de bonnes cuisinières», affirme-t-elle. Mais rien ne se fait bien sans un profond amour, et spécialement la cuisine, qui n’aime pas les impatients. «J’aime bien manger, sinon je suis malheureuse», avoue-t-elle dans un sourire. Herbes aromatiques Comme tous les gourmets, Minh Kim considère que «manger est un art de vivre». Elle ne se contente pas de cuisiner, elle reçoit, s’assoit avec ses invités, qui en ont toujours redemandé : «Presque tous les soirs, je tenais une table ouverte, et mes amis, si mon dîner coïncidait avec un autre ailleurs, s’empressaient de décommander pour venir chez moi». En 1960, elle n’a pas encore trente ans lorsqu’elle crée, au sens propre du terme, sa propre improvisation de la salade : «Je l’ai confectionnée à partir des feuilles de bananier, dont la cuisine traditionnelle se débarrassait. J’y ai ajouté du sésame, des cacahuètes grillées, du nioc-mam, ingrédient essentiel de notre cuisine, et du citron vert». Minh Kim n’hésite pas à divulguer ses secrets : «Dans cette salade, j’ai remplacé le sucre par du miel». En 1962, elle épouse un Français et s’installe à Paris, où elle se lance dans la restauration. Treize ans plus tard, elle inaugure l’Imperial Select, rue Villon. Le succès arrive rapidement, comme l’ouverture de Princesse M.K., à Bruxelles. «Enfant, j’étais déjà très difficile à table : je n’aimais pas les goûts fades, je préférais l’aigre-doux et les contrastes», confie-t-elle. C’est ce qu’offre sa cuisine, tout en restant «authentique», au plus de la stricte tradition vietnamienne. «Notre cuisine n’est ni grasse, contrairement à la chinoise, ni piquante, comme la thaïlandaise : elle est simplement savoureuse, et sa confection est difficile, à cause du très grand nombre d’herbes aromatiques», dit-elle. Défi En 1988, elle publie son livre de recettes vietnamiennes, à la demande de sa clientèle et de ses amis cuisiniers (comme Guy Savoy, qui se charge d’introduire l’ouvrage). Et quelques-uns de ses secrets. La deuxième édition est parue l’année dernière et est disponible, comme plusieurs autres objets, à Indochine. Et, il y a quelques mois, la princesse a accepté de prendre en charge ce restaurant décoré par Tony Chi, designer très en vogue à New York. Bois clair, couleurs fraîches (beige et vert), cartes géantes du Vietnam avant son indépendance, bar ouvert sur la cuisine que le gourmet curieux peut aller visiter sans aucun scrupule. Minh Kim propose trois formules, selon les appétits, et encourage à la consommation : «Ces plats sont si légers que vous aurez faim dans quelques heures», assure-t-elle. Effectivement : les plats sont inventifs tout en restant très simples dans leur composition. Mais c’est l’empilement discret de saveurs qui confirme dans l’idée qu’Indochine a tout pour mériter son appellation de restaurant «gastronomique». Ce qui est plutôt rare par les temps qui courent.
La princesse Minh Kim («or pur» en vietnamien), nièce de l’empereur Bao Daï, reçoit sa clientèle au restaurant Indochine de l’hôtel Phoenicia avec un français impeccable. «J’ai quitté mon pays pour la Suisse à 10 ans», raconte-t-elle. «Mes frères et sœurs et moi étions séparés de nos parents, et j’ai dû très vite travailler pour subvenir à nos besoins»....