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Actualités - INTERVIEWS

Interview Kourkoulas : Beyrouth a tout intérêt à signer rapidement

Pour le chef de la délégation de la Commission européenne à Beyrouth, Dimitris Kourkoulas, le Liban n’a aucune raison de craindre la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, bien au contraire. Bruxelles tient compte des difficultés spécifiques du Liban et souhaite l’aider et l’accompagner tout au long du processus, explique-t-il dans une interview à «L’Orient-Le Jour». - Les négociations sur un accord d’association entre l’Union européenne et le Liban sont suspendues depuis deux ans. Pourquoi ? Les contacts entre l’Union européenne et les autorités libanaises sont permanents. On ne peut parler de rupture, en revanche, il est vrai que les négociations formelles sur l’accord sont interrompues. La raison essentielle réside dans la structure du budget libanais qui dépend de façon excessive des droits de douanes (à 45 %). Le Liban avait besoin d’entamer une réforme fiscale pour instaurer davantage de taxes indirectes. Nous avons exprimé notre disposition à l’assister dans cette entreprise. - Dans une perspective régionale, quelle priorité la Commission de Bruxelles accorde-t-elle au Liban ? L’Union européenne attache une grande importance à la signature d’un accord avec Beyrouth. Le Liban est parmi les premiers à avoir entamé des négociations. Étant donné la tradition d’ouverture du pays qui facilite ses capacités d’adaptation, nous avions espéré aller plus rapidement. - Quelles sont selon vous les forces et les faiblesses du Liban dans le cadre du partenariat avec l’Europe ? Le Liban entretient depuis longtemps des relations étroites avec l’Europe dans le domaine culturel, politique, mais surtout commercial. Au cours des dernières années, la pression budgétaire a contraint le pays à augmenter ses droits de douane ce qui va à l’encontre de cette tradition d’ouverture et à l’encontre de l’objectif de création d’une zone de libre-échange. Le gouvernement a entamé les réformes fiscales nécessaires et nous sommes prêts à l’aider. - La perspective d’un démantèlement des barrières douanières suscite des craintes dans le pays... Je ne partage pas l’avis de ceux qui craignent un démantèlement tarifaire. D’abord parce que l’accord prévoit plusieurs clauses de sauvegarde qui permettront d’adapter le processus à l’évolution du pays. Ensuite, la période de transition est longue. Plusieurs années séparent la signature effective de l’accord et la réduction effective des barrières douanières. Enfin, il y a des pays beaucoup plus protectionnistes à l’origine qui se sont engagés avec succès dans des accords de ce type. La signature de l’accord est en soi un signal positif à l’attention des investisseurs qui se préoccupent tout autant du niveau des droits de douanes que de la situation juridique et institutionnelle du pays. - Quelles ont été les conséquences de l’accord au sein des pays signataires ? Il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’impact des accords signés dans le cadre du processus de Barcelone. En revanche, l’Union européenne a signé des accords d’association avec la Grèce, avant son adhésion, avec la Turquie ou Chypre par exemple. J’ai participé aux négociations chypriotes. Les autorités avaient les mêmes craintes pour leur industrie qu’au Liban aujourd’hui. Des adaptations ont certainement été nécessaires, mais globalement, le résultat est positif. - L’Union européenne prépare actuellement la deuxième phase du programme Meda. Le Liban peut-il compter sur une augmentation de l’enveloppe financière qui lui sera allouée ? Meda II, pas davantage que Meda I, ne définit d’enveloppe fixe par pays. Les allocations sont décidées par type de programme, il est donc impossible de les connaître à l’avance. Pour l’instant, même le budget total de Meda II reste à définir. Cependant, en collaboration étroite avec le Liban, nous avons déjà défini les projets prioritaires. Le premier concerne la modernisation industrielle et la promotion des exportations. Le deuxième volet est social, il porte notamment sur l’emploi. Le troisième est institutionnel. Enfin, la quatrième priorité est le développement du sud du Liban. - Le Liban se plaint d’être défavorisé par les critères d’allocation de l’aide financière du programme Meda, qu’en pensez-vous ? C’est normal que chaque pays veuille la plus grande enveloppe possible, mais je crois ce reproche injustifié, nous avons tenu compte de la spécificité du Liban qui est le plus grand bénéficiaire par tête d’habitant de l’aide européenne, après l’Autorité palestinienne. En termes de dons, Beyrouth a bénéficié de 180 millions d’euros entre 1996 et 1999 dans le cadre de Meda I, alors que la promesse initiale était de 100 millions d’euros. Par ailleurs, l’Union européenne est, de loin, le premier donateur du Liban, sans compter l’assistance de chaque État membre. - Comment évaluez-vous les problèmes de la bureaucratie européenne d’un côté, et les lenteurs de l’administration libanaise de l’autre ? Les lenteurs s’expliquent par le caractère ambitieux des programmes en question. Il ne s’agit pas d’une aide classique au développement, nous visons la création à terme d’une vaste zone de libre-échange, ce qui implique des réformes en profondeur. En ce qui concerne l’Union européenne la longueur des procédures est aussi la garantie du respect des règles et de la transparence. Leur nouveauté – le processus a réellement débuté en 1996 – a quand même provoqué des retards, c’est vrai. Pour nous aussi c’était une découverte. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase d’accélération, plusieurs nouveaux projets sont lancés ou en voie de l’être. Trente-huit millions d’euros ont été alloués à la réforme de l’administration, 25 millions à un fonds social, 50 millions d’aide budgétaire directe... - Dans quelle mesure la visite du commissaire européen pour les relations extérieures Chris Patten a-t-elle contribué à relancer le processus ? Chris Patten n’a pas abordé le contenu des négociations, mais il a réitéré le souhait européen de les reprendre de façon officielle. La meilleure solution est d’établir un état des lieux dans un premier temps puis de définir l’itinéraire à suivre. - La volonté est-elle similaire côté libanais ? Il faut poser la question aux autorités du pays, mais nous n’avons aucune raison d’en douter.
Pour le chef de la délégation de la Commission européenne à Beyrouth, Dimitris Kourkoulas, le Liban n’a aucune raison de craindre la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, bien au contraire. Bruxelles tient compte des difficultés spécifiques du Liban et souhaite l’aider et l’accompagner tout au long du processus, explique-t-il dans une interview...