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Actualités - OPINION

Un article de Gémayel dans le Monde : évitons un Kosovo libanais !

Sur un ton très alarmiste, l’ancien chef de l’État Amine Gemayel a lancé, dans un article publié par le journal Le Monde d’hier, mardi 9 mai, un appel en faveur d’une amnistie au Liban-Sud. Seule une mesure de cet ordre peut, selon lui, «recoudre le tissu national et priver les factions armées d’un prétexte à épuration sanglante». Voici le texte de cet article : «Vingt-deux ans après en avoir été sommé par la communauté internationale, Israël se prépare enfin à quitter le sol du Liban. L’envahisseur annonce son intention de claquer la porte sans égard à toute autre considération que son tardif désir de rentrer chez lui. Le seul pays à avoir, des décennies durant, été le champ clos du duel israélo-arabe et attiré l’attention du monde entier sur une interminable guerre revient à l’avant de la scène. Nous autres Libanais devrions éprouver, à l’idée que notre pays va recouvrer l’intégralité de son territoire, une satisfaction sans mélange. Pourquoi n’en est-il rien ? Pourquoi, au lieu de cris d’allégresse, n’entendons-nous que la rumeur angoissée qui monte de populations en proie à une sorte de panique ? La raison en est simple. La libération de notre sol longtemps et cyniquement renvoyée aux calendes grecques est concédée par l’occupant dans le cadre d’une politique de la terre brûlée lourde de nouveaux malheurs pour toute la région. À Washington, Paris, Tel-Aviv ou Damas, on se concerte et se consulte à propos du Liban. Seul manque à l’appel le gouvernement libanais, neutralisé et réduit au silence par son tuteur syrien. Or, la Syrie se sert de la situation au Liban-Sud comme d’une monnaie d’échange dans le marchandage engagé avec Israël à propos de la restitution du Golan. Elle avait d’ailleurs, depuis longtemps, mis le Liban-Sud au service exclusif de sa stratégie, en y modulant la tension par alliés interposés afin de peser sur l’État hébreu. Les diverses arrière-pensées des protagonistes empêchent de prendre conscience de la gravité de la situation au Liban-Sud. La résolution 425 de l’Onu, outre l’exigence du retrait israélien et de l’installation d’une force des Nations unies (Finul), se proposait d’assurer la sécurité et la paix dans la région frontalière. Nous en sommes plus éloignés que jamais. Le Liban-Sud est détaché depuis plus de trente ans de la nation libanaise. Les Palestiniens y avaient installé leur souveraineté, au point que la région fut surnommée le “Fathland”. Puis vinrent les Israéliens, qui obligèrent les Libanais à s’accommoder de leur présence. Les emplois, les hôpitaux, l’aéroport etc. étaient, en effet, de l’autre côté de la frontière. La population, coupée de Beyrouth et des autorités légales, se vit contrainte à passer des compromis avec l’occupant. Aujourd’hui, l’État libanais, qui avait abdiqué son devoir de protection de ses citoyens du sud, s’arroge le droit de châtier leur prétendue “trahison”. Des milliers de poursuites sont ouvertes devant les tribunaux militaires. La population de la zone frontalière, livrée à la vindicte du Hezbollah est “criminalisée” par son propre gouvernement, dont le premier souci devrait être de lui ouvrir les bras pour la réintégrer dans la communauté nationale. Comment éviter le drame qui de toute évidence se prépare, quel que soit dans le proche avenir l’issue des négociations syro-israéliennes ? Il faut, avant tout, prendre conscience de la gravité de la situation et de l’incapacité où se trouve le gouvernement libanais d’y faire face de façon efficace, du moins aussi longtemps qu’il sera vassalisé. Un problème politique et humanitaire de première grandeur se pose à l’Onu et, plus particulièrement, aux États-Unis, parrains du processus de paix, et à la France, puissance très active dans la Finul. Les concertations internationales en cours à propos du Liban-Sud doivent nécessairement apporter une série de mesures liées, et principalement que soit proclamée à Beyrouth une amnistie générale inconditionnelle et irrévocable en faveur des Libanais accusés d’avoir coopéré avec l’occupant israélien. Seule l’amnistie, en effet, peut recoudre le tissu national et priver les factions armées d’un prétexte à épuration sanglante. Il faut, en outre, lancer un grand projet de reconstruction de la région frontalière qui, après le départ des Israéliens et la disparition de l‘économie vassale qu’ils y avaient installée, va se trouver en proie à un chômage et à des difficultés économiques considérables. Amnistie et reconstruction devront être accompagnées de mesures draconiennes de sécurité prises dans le cadre de l’Onu et impliquant un renforcement de la Finul dotée d’une mission précise et impérative. Faute de ces décisions, nous ne savons que trop ce qui va se passe au Liban-Sud. Dans une orgie de violences et de vengeances, nous verrons bientôt sur nos écrans de télévision des Casques bleus impuissants, encerclés dans leurs cantonnements ou réduits à escorter les longues colonnes de Libanais quittant leur pays pour manger le pain de l’exil en Israël ou ailleurs, à supposer qu’il leur soit accordé. Amère et terrible perspective ! Il est encore temps d’éviter que se crée, par l’effet d’un pragmatisme cynique, un Kosovo libanais».
Sur un ton très alarmiste, l’ancien chef de l’État Amine Gemayel a lancé, dans un article publié par le journal Le Monde d’hier, mardi 9 mai, un appel en faveur d’une amnistie au Liban-Sud. Seule une mesure de cet ordre peut, selon lui, «recoudre le tissu national et priver les factions armées d’un prétexte à épuration sanglante». Voici le texte de cet article :...