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Actualités - REPORTAGES

Affaire Gharios - L'Ordre des avocats se déclare en session ouverte Divergences au barreau sur l'opportunité d'une grève

Décevant, le communiqué du conseil de l’Ordre des avocats, stigmatisant l’agression sauvage contre un membre du barreau, Me Sélim Gharios, l’était pour de nombreux avocats qui espéraient une réaction plus soutenue : il était question de décréter la grève pour protester contre la brutalité dont leur collègue a été victime dimanche soir ; il n’y a eu qu’un communiqué, virulent il est vrai, faisant sursis à cette mesure pour donner aux autorités le temps de démasquer les agresseurs. «Notre principal souci est d’identifier les malfaiteurs et il appartient au conseil de l’Ordre d’apprécier une situation avant de décider s’il faut ou non décréter la grève», a déclaré pour sa part le bâtonnier Michel Lyan à L’Orient-Le Jour, répondant ainsi aux propos selon lesquels l’ordre de grève n’a pas été décrété à cause de pressions exercées par l’État. Présidée par le bâtonnier, la réunion extraordinaire convoquée lundi par le conseil de l’Ordre a duré un peu plus de cinq heures, de 9h 30 à 15h 15, en raison de divergences de vues sur le procédé à suivre pour exprimer l’indignation du barreau : un groupe d’avocats était favorable à l’adoption d’un communiqué au ton sévère tandis qu’un autre, soutenu par un vaste courant, voulait recourir sans tarder à l’escalade et décréter la grève. Pour ce courant, il est inadmissible, quels que soient les motifs de l’agression contre Me Gharios, que le barreau garde les bras croisés. Un avocat proche de l’opposition devait dans ce cadre rappeler que le conseil de l’Ordre avait, pour bien moins que cela, observé dans le passé une grève de deux jours. À l’époque, c’était à la suite de l’assassinat d’un avocat qui était impliqué dans une affaire de mœurs. Aujourd’hui, le problème se pose autrement et il est d’autant plus délicat que des considérations d’ordre politique semblent se greffer sur l’incident qui a failli coûter la vie à Sélim Gharios. Des avocats proches de Me Gharios ont en effet mis en cause un haut responsable de l’État qui aurait été vivement critiqué jeudi par l’avocat qui commentait en des termes très virulents l’arrestation de jeunes étudiants aounistes et dont les partisans se seraient répandus en menaces contre ce dernier. Le même récit est sur toutes les lèvres. Les avocats présents n’hésitent pas à établir un lien entre cette affaire et l’agression contre leur collègue, alors que le conseil de l’Ordre adopte une attitude plus nuancée. Le courant hostile à la grève au sein de l’Ordre estime en effet qu’il ne peut pas fonder sa décision sur de simples présomptions. Pour les autres, la liaison est indiscutable. Des efforts officiels Toujours selon les avocats proches de Me Gharios, un officier aurait été dépêché tôt le matin auprès du conseil pour prier ses membres de patienter avant de prendre une décision quelconque, le temps que les services de sécurité puissent démasquer les agresseurs de Gharios. Vers 13h, Me Lyan est sorti de la salle de réunion et n’est revenu que trois quarts d’heure plus tard. Favorable à un mouvement de protestation soutenu, Me Chakib Cortbawi, ancien bâtonnier, l’a suivi un peu plus tard, l’air maussade. Aux questions qui lui ont été posées, il s’est contenté de répondre : «Je suis dégoûté. Je m’en vais». Mais ses collègues l’ont persuadé de rester. On a appris plus tard, auprès de participants à la réunion, qu’un haut responsable de sécurité a pris contact avec le bâtonnier qui s’est rendu auprès de lui. Le responsable en question devait communiquer à Me Lyan les progrès réalisés au niveau de l’enquête et promettre que justice sera faite. À son retour, les débats devaient reprendre de plus belle. Les avocats favorables à une grève de protestation étaient dans la matinée au nombre de huit. Ils n’étaient plus que 3 dans l’après-midi : Mes Nouhad Jabre, Camille Toubia et André Chidiac. Et c’est donc à la majorité que le conseil de l’Ordre a voté en faveur de la publication d’un communiqué dans lequel il s’est déclaré notamment en session ouverte. Interrogé par L’Orient-Le Jour, le bâtonnier a rejeté les propos selon lesquels des pressions ont été exercées sur le conseil de l’Ordre pour l’empêcher de décréter une grève. «Notre souci est de démasquer les malfaiteurs. En tant qu’avocats, nous suivons de près l’enquête et les mesures légales adoptées pour les identifier», a-t-il déclaré. Mais une majorité ne s’est-elle pas dégagée en faveur de la grève ? À cette question, il a répondu : «Chaque circonstance impose sa propre logique. Le conseil de l’Ordre a le droit d’apprécier une situation avant de prendre une décision quelconque». Selon ses explications, les enquêteurs sont sur «une très bonne piste». Mais les collègues de Me Gharios qui attendaient impatiemment la décision du conseil de l’Ordre sont loin de partager son optimisme.
Décevant, le communiqué du conseil de l’Ordre des avocats, stigmatisant l’agression sauvage contre un membre du barreau, Me Sélim Gharios, l’était pour de nombreux avocats qui espéraient une réaction plus soutenue : il était question de décréter la grève pour protester contre la brutalité dont leur collègue a été victime dimanche soir ; il n’y a eu qu’un...