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Actualités - ANALYSE

L'Etat hébreu brouille les cartes par des indications contradictoires

Retrait unilatéral ou arrangé ? Et d’ailleurs, retrait total ou simple redéploiement ? Les indications fournies par les responsables israéliens, dirigeants politiques ou cadres militaires, sont à ce jour truffées de contradictions. Sans doute à dessein, pour multiplier les écrans de fumée, brouiller les cartes et déstabiliser psychologiquement autant la Syrie que le Liban ou le Hezbollah. Ainsi, le Premier ministre travailliste, M. Ehud Barak, proclame qu’il va restituer tout le territoire libanais occupé. Mais son propre chef d’état-major, le général Shaoul Mofaz, annonce qu’il va garder des postes d’observation en territoire libanais. Les deux hommes ont en commun d’avoir assumé le commandement de la région nord, englobant le Liban-Sud occupé, avant de prendre la tête de l’armée israélienne. D’autres officiels israéliens évoquent un rétrécissement plus ou moins consistant de ce qu’ils appellent «la ceinture de sécurité». Ou lancent des ballons d’essai au sujet d’une modification du tracé frontalier qui serait synonyme d’annexion. À Beyrouth, on suit avec attention ces fluctuations, visiblement tactiques, dans les déclarations d’intention israéliennes. Les responsables libanais estiment du reste qu’Israël s’est habilement servi de ce projet de retrait du Sud pour faire pression sur les Américains. Et amener le président Clinton, qui s’est prêté à la manœuvre sans doute pour des raisons électorales, à défendre devant le président Assad les thèses israéliennes plutôt que de présenter une initiative bien de son cru. Cette pusillanimité US vient aggraver les inquiétudes de nos dirigeants. Ils notent cependant qu’en ce qui concerne le Sud, Washington ne prend pas entièrement fait et cause pour Israël, comme c’est le cas pour le Golan. Ou du moins pas encore. En effet, jusqu’à présent, les Américains continuent à travailler pour un retrait arrangé. Car ils savent qu’un retrait sans accord peut tout faire exploser dans la région. L’escalade dans la violence qu’il entraînerait pourrait aller jusqu’à provoquer une guerre israélo-syrienne. Pour se faciliter les choses, l’Administration Clinton tente d’inclure le retrait israélien dans le cadre du règlement global et de le retarder jusqu’à la reprise des bilatérales. Ce qui permettrait de négocier, en passant, un accord spécifique basé sur la 425 et sur la 426. Dans cette perspective, les Américains ont beaucoup dialogué ces derniers temps avec les parties concernées. Aux Libanais, ils ont posé une série de questions pointues. En répétant inlassablement ce leitmotiv : pourquoi la Résistance ne met-elle pas une sourdine à ses actions, maintenant qu’Israël s’engage à se retirer avant le mois d’août ? La réponse qui leur a été opposée, toujours aussi claire, se résume comme suit : pas question de trêve tant que l’occupation subsiste. Cependant, les Américains se disent certains qu’Israël va effectivement se conformer à la 425 qui, comme on le sait, ordonne un retrait aussi inconditionnel que total (mais aussi immédiat, terme qu’en 22 ans on a eu le temps d’oublier). Les responsables libanais sont loin pour leur part d’être aussi confiants dans les intentions israéliennes. D’autant que les indices sur le terrain même ne sont guère rassurants. Ainsi, Israël a établi au Sud une ligne, parallèle à la frontière, pénétrant en territoire libanais sur une profondeur allant de 200 à 1 500 m, selon la proximité des premiers kibboutz. Les Israéliens ont tout l’air donc de vouloir s’installer dans cette poche et d’imposer une enclave de fait accompli. Ils y concentreraient massivement des troupes, pour bien verrouiller le secteur et prévenir les infiltrations. Certaines sources israéliennes vont jusqu’à évoquer la possibilité de ressusciter l’État du Liban libre de Saad Haddad, enclave soi-disant libanaise, confiée aux hommes de Lahd et d’où les forces israéliennes seraient absentes physiquement, comme c’était le cas antérieurement à Jezzine. Un projet qui semble toutefois chimérique, car l’ALS n’est pratiquement plus qu’un fantôme. Il n’en reste pas moins que, selon des indications diplomatiques fiables parvenues à Beyrouth, le général Mofaz aurait récemment présenté à M. Barak un rapport dans lequel il recommande fortement le maintien d’une poche de sécurité en territoire libanais, pour la bonne protection de la Galilée. Ceci en cas de retrait unilatéral, sans accord préalable. Le général israélien suggère, selon ces sources, qu’Israël garde au Sud 14 postes fortins.
Retrait unilatéral ou arrangé ? Et d’ailleurs, retrait total ou simple redéploiement ? Les indications fournies par les responsables israéliens, dirigeants politiques ou cadres militaires, sont à ce jour truffées de contradictions. Sans doute à dessein, pour multiplier les écrans de fumée, brouiller les cartes et déstabiliser psychologiquement autant la Syrie que le Liban...