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Actualités - ANALYSE

Processus de paix - Le sommet Clinton-Assad passé au crible à Beyrouth Divergences de lecture entre les responsables locaux

Les dirigeants libanais ont naturellement suivi de très près la rencontre Clinton-Assad de Genève. Mais leurs interprétations respectives de l’événement sont loin d’être concordantes. Cela malgré les contacts intensifs entrepris avec Damas pour cerner les raisons exactes qui empêchent cette reprise des négociations que le sommet devait initier. Le président Sélim Hoss, qui est en même temps ministre des Affaires étrangères, s’est toujours montré extrêmement méfiant à l’égard d’Israël. Il soutient, avec une inaltérable constance, que l’État hébreu est animé de mauvaises intentions. Et n’utilise les canaux diplomatiques, pourparlers compris, que pour manœuvrer et atermoyer. Car, selon le chef du gouvernement, Israël n’a aucun intérêt à faire cadeau à un président américain en partance d’un cadeau aussi important que la réussite du processus. Ce qui implique la possibilité que le présent aille au futur, c’est-à-dire au prochain locataire, pour quatre ou pour huit ans, de la Maison-Blanche. Pour ménager les facteurs d’objectivité chers à son cœur d’économiste pédagogue, M. Hoss relève cependant que, concrètement, il subsiste une période de deux ou trois mois pendant lesquels on peut encore dégager le processus de l’ornière. S’il n’y a pas de redémarrage des pourparlers pendant ce laps de temps, les États-Unis seraient trop accaparés par leurs présidentielles pour entreprendre quoi que cela soit. Et l’éclaircie se ferait attendre jusqu’à la prise en charge du nouveau président américain. D’autres cadres locaux vont encore plus loin sur la voie du scepticisme. À leur avis, le président Clinton, qui est sur le départ, n’a plus assez prise sur les événements pour exercer des pressions efficaces sur le protagoniste régional qui entrave le jeu, à savoir Ehud Barak. Au contraire, ajoutent ces sources, M. Clinton doit ménager le lobby sioniste qui soutient Israël, pour ne pas désavantager le candidat de son parti, le vice-président Al Gore. Parallèlement, selon ces sources, le Premier ministre israélien, confronté à la fronde de deux membres de son Cabinet qui menacent de démissionner ainsi qu’à la mobilisation des colons, ne peut pas pour le moment ordonner un retrait total du Golan syrien. Il se retrouve aussi coincé que ses deux prédécesseurs travaillistes, Yitzhak Rabin et Shimon Peres. Le premier a été assassiné par un fanatique israélien et le deuxième a perdu les élections face à Benjamin Netanyahu. Barak se retrouve donc face à un dilemme : s’il cède le Golan, sa coalition intérieure et son gouvernement éclatent ; et s’il ne restitue pas ce territoire à la Syrie, le processus capote. C’est bien pourquoi, poursuivent ces responsables, le président Clinton a demandé aux Syriens «d’aider» Barak. Une requête un peu étrange, qui a été immédiatement rejetée. D’autant plus fermement que «l’assistance» sollicitée consiste à renoncer aux frontières du 4 juin 1967 et à accepter un tracé modifié plus favorable à la thèse israélienne qui s’accroche à la ligne de 1923. Mais d’autres dirigeants libanais veulent encore y croire. Selon eux, l’enjeu est trop important pour que le président Clinton puisse se permettre un échec définitif. Il ne pourrait ni entrer dans l’Histoire, comme faiseur de la paix au Moyen-Orient, ni briguer ultérieurement un nouveau mandat présidentiel ni assurer l’avantage des démocrates et d’Al Gore dans la compétition en cours. Ces officiels pensent donc que M. Clinton, loin de se décourager après Genève, va maintenant redoubler d’efforts. Et ils signalent que, dans ce cadre, M. Dennis Ross, coordonnateur du processus, a été immédiatement activé, tandis que le président Moubarak d’Égypte, grand médiateur régional, se trouve de nouveau mis à contribution pour tenter de colmater les brèches du côté arabe. Ces sources reconnaissent cependant que les pressions américaines doivent être équilibrées, afin d’arracher des concessions à chacune des parties en conflit et non à une seule. Il faut de la sorte, à leur avis, que le président Clinton fasse entrer dans la tête des Israéliens, une fois pour toutes, qu’il n’y a pas de paix dans la région sans la Syrie et qu’il n’y a pas de sécurité sans un règlement régional équitable. Ce qui implique une renonciation à des territoires spoliés par la force, dont le Golan. D’un autre côté, le président américain ferait valoir aux Syriens que le processus pourrait être retardé de plusieurs années, voire torpillé pour de bon, s’il n’aboutit pas sous son propre mandat, c’est-à-dire dans les prochains mois. Il soulignerait qu’en effet son successeur aurait besoin d’un an au moins pour dominer le dossier. Et qu’entre-temps on serait arrivé aux élections israéliennes, qui pourraient donner la victoire de nouveau au Likoud, hostile à la paix. Mais, comme le président el-Assad l’a déclaré à Genève, la Syrie tient à son droit entier. Et elle n’est pas pressée.
Les dirigeants libanais ont naturellement suivi de très près la rencontre Clinton-Assad de Genève. Mais leurs interprétations respectives de l’événement sont loin d’être concordantes. Cela malgré les contacts intensifs entrepris avec Damas pour cerner les raisons exactes qui empêchent cette reprise des négociations que le sommet devait initier. Le président Sélim Hoss,...