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Actualités - ANALYSE

Les messages d'une visite royale

Il n’y a pas qu’un seul message dans la visite et les diverses déclarations du prince héritier d’Arabie séoudite Abdallah ben Abdel-Aziz. Les signaux envoyés par l’émir sont adressés à Washington et à la Syrie, autant qu’à Israël. Sans avoir l’impact de la visite du président égyptien Hosni Moubarak, la présence au Liban de l’émir Abdallah ne le cède pas en importance à celle-ci, en raison tant du poids économique du royaume que de la nature des liens existant entre Ryad et Le Caire d’une part, Washington d’autre part. Cette visite de solidarité intervient à un moment où le processus de paix piétine. Elle pourrait servir plusieurs objectifs à la fois : faire comprendre à Israël – et accessoirement à Washington – que l’heure du «réalisme» a sonné, et aider la Syrie à comprendre que le facteur temps compte désormais. La mission de l’émir Abdallah, certains observateurs en sont convaincus, répond et correspond aussi aux désirs de Washington. Les États-Unis souhaitent en effet sortir la région de la situation de «ni guerre ni paix», qui risque rapidement de devenir malsaine et de conduire, de dérapage en dérapage, à une reprise des hostilités. Ces milieux soulignent que l’émir Abdallah a été chargé de rappeler que les contours de la paix n’ont jamais été aussi clairs entre Israël et la Syrie, et que, comme l’affirmait déjà le président Clinton annonçant la reprise des pourparlers, en décembre dernier, «beaucoup de terrain a été déblayé». (La Syrie l’a d’ailleurs indirectement confirmé, voici quelques jours, en faisant annoncer par ses visiteurs qu’une fois les frontières du 4 juin 1967 reconnues par Israël, tout se passerait très vite). Ainsi, entre la Syrie et Israël, ce n’est donc plus vraiment une question de quelques hectares qui se dresse en obstacle devant la paix, mais cette chose plus subtile qui se nomme confiance. Le message de l’émir Abdallah irait, en Israël même, dans plusieurs directions. Il s’adresserait notamment à l’opposition qui ne croit pas, comme le Premier ministre Ehud Barak, qu’avec la paix viendra la sécurité, mais continue de vouloir imposer la paix par la sécurité, cet autre nom de la violence, ce qui est moins évident. C’est la dérive en direction de la guerre, qu’Israël agite pour presser la Syrie de revenir à la table des négociations, qui aurait poussé l’émir Abdallah à lancer sa mise en garde : «Les Arabes ont atteint les limites des concessions qu’ils peuvent offrir. Quiconque croit pouvoir prendre davantage se fait illusion et se montre irréaliste…». L’avertissement ne s’adresse pas seulement à Israël, comme on peut le penser de prime abord, mais également aux États-Unis, le coparrain de la paix. Il faut faire vite, avant que les signes d’éclatement de la coalition gouvernementale en Israël ne se concrétisent, estime-t-on dans les milieux diplomatiques. Ce qui est certain, c’est que la visite et les déclarations de l’émir Abdallah sont de nature à consolider l’esprit de solidarité qui a présidé à la décisions de réunir, au Liban, le Conseil ministériel de la Ligue arabe, les 11 et 12 mars. Cette visite et ces déclarations augurent d’une réunion réussie, qui sera marquée du sceau de fermeté et de la cohésion possible. Les observateurs se montrent surpris de constater que cette solidarité, qui paraissait impossible voici quelques semaines, s’est réalisée et qu’il a suffi d’une action de résistance persévérante, souvent victorieuse, et d’une opération militaire panique de la part d’Israël, pour ressouder les rangs arabes et leur offrir, sur un plateau d’argent, une cause commune : le Liban est de nouveau au cœur du monde arabe. Certes, un Liban encore convalescent sur bien des points, mais un Liban qui se présente de plus en plus, désormais, comme acteur de sa propre histoire, après avoir été l’objet passif des sollicitudes verbales de ses frères arabes. Une passivité qui lui a porté un grand tort et que les pays arabes tentent, aujourd’hui, de racheter.
Il n’y a pas qu’un seul message dans la visite et les diverses déclarations du prince héritier d’Arabie séoudite Abdallah ben Abdel-Aziz. Les signaux envoyés par l’émir sont adressés à Washington et à la Syrie, autant qu’à Israël. Sans avoir l’impact de la visite du président égyptien Hosni Moubarak, la présence au Liban de l’émir Abdallah ne le cède pas en...