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Actualités - BIOGRAPHIE

PORTRAIT - Le nouveau député indépendant de Jbeil parle de ses débuts et de ses aspirations Abbas Hachem plaide pour un nouveau système de partis

Abbas Hussein Hachem, nouveau député élu au seul siège chiite de Jbeil, affiche d’ores et déjà sa volonté de contribuer à un changement en profondeur du paysage politique libanais : d’une part, la nécessité du retour en force des vraies valeurs, fondement de toute politique et qui, selon lui, font aujourd’hui défaut. D’autre part, l’instauration d’un nouveau système politique basé sur des partis non confessionnels. Cet indépendant invétéré, qui ponctue invariablement ses fins de phrase par un sourire, définit clairement ses objectifs, et ses explications montrent une parfaite connaissance des dossiers et une philosophie politique particulièrement aiguisée. Abbas Hachem est le père de quatre enfants (dont les âges varient entre quatre et vingt-deux ans). Il a suivi une formation en gestion des entreprises et a longtemps travaillé en Arabie séoudite, ne regagnant son pays d’origine qu’en 1990. Il a contribué à la fondation de plusieurs entreprises libanaises, notamment dans le domaine de la construction. C’est le hasard, raconte le nouveau député de Jbeil, qui l’a propulsé dans le monde de la politique. «Je n’avais jamais eu l’ambition de me lancer en politique, mais c’était mon destin de me retrouver dans le domaine public, souligne-t-il. Personne, dans toute l’histoire de ma famille, ne s’était mêlé de politique. Nous avons reconstitué notre lignée qui remonte à quatre cents ans et n’avons repéré aucune figure politique. La seule activité publique dans laquelle ma famille s’est illustrée dans le passé est celle de la médiation entre les clans en vue de leur réconciliation». C’est ainsi, explique M. Hachem, que sa famille a préservé sa neutralité. C’est peut-être aussi pourquoi il tient à ce qu’il appelle son indépendance politique. Ce qui ne l’a pas empêché de faire son entrée sur la scène publique. «Depuis 1995, j’ai commencé à sentir que la représentation de notre région au Parlement n’était pas à la hauteur de son importance culturelle, poursuit M. Hachem. Traditionnellement, la représentation de cette région se faisait autour de deux courants de pensée (à l’échelle nationale, non seulement régionale) qui sont les destouriens et le Bloc national. Chacun de ces deux courants regroupait des sympathisants de différentes confessions». Selon lui, c’est quand il a remarqué, dans le courant des années 90, que cette région n’était plus vraiment incluse dans la géographie politique du pays comme par le passé qu’il a décidé d’agir. «Nous nous sommes alors mis d’accord avec le juge Adib Allam, un des notables de la région, pour œuvrer en vue de remédier à ce manque, raconte M. Hachem. Le juge Allam m’a alors surpris, trente-deux jours avant les élections législatives de 1996, en proposant ma candidature». Même s’il persiste à déclarer que son introduction dans l’univers de la politique tenait du destin, M. Hachem n’en reconnaît pas moins qu’il est plus facile d’intégrer ce monde que d’en sortir. « Comprendre la souveraineté de la même manière » Qu’entend-il faire personnellement dans le cadre de son travail parlementaire et dans celui de sa région ? «J’ai une conviction : celle que nos malheurs proviennent de la disparition des valeurs en politique, déclare-t-il. Durant les événements qui ont secoué le Liban, les lois n’étaient plus appliquées. Comment avons-nous alors évité le chaos absolu ? Il existait une loi très particulière toujours en vigueur, un certain code d’honneur : un fils de famille ne se permet pas d’actions malhonnêtes dans la région où il est connu. Sa fierté l’en empêche». La politique selon M. Hachem ? Une activité guidée par un sens des valeurs, de l’éthique, des principes, non pas «l’art du possible», comme elle est généralement conçue. «C’est en privilégiant les valeurs que le dialogue pourra de nouveau s’instaurer», affirme-t-il. Un dialogue avec qui ? «Avec tous ceux qui partagent les mêmes idées», répond-il. Ayant appartenu, dans la période qui a précédé les derniéres élections, à la liste présidée par l’ancien ministre Farès Boueiz et dont deux autres membres ont été élus au Kesrouan, pense-t-il pouvoir former un bloc avec les autres députés, ayant mené campagne dans la coalition de l’ancien ministre Georges Frem ? «Nous sommes acculés à coopérer pour améliorer la situation des régions déshéritées que sont Jbeil et le jurd du Kesrouan, fait remarquer M. Hachem. Les luttes politique et idéologique n’ont plus de place face aux considérations géographiques. Si nous ne nous entendons pas sur le plan politique, nous devons œuvrer ensemble pour assurer le développement et les services après avoir défini les priorités dans la région». Quel nouveau projet compte-t-il présenter au Parlement ? «Mes priorités sont l’entente nationale et la souveraineté», répond-il, laconique. Cela signifie-t-il qu’il pense que la souveraineté n’est pas totalement acquise ? «Si, mais il faut donner au concept un sens unique, compréhensible par tous de la même manière, sans que chacun de nous lui accorde la signification qu’il veut», dit-il sans détours. Quelle serait cette signification selon lui ? «La notion de souveraineté, diffère aujourd’hui du sens qu’on lui prêtait dans les années 60», souligne M. Hachem. «Dans le cadre de la mondialisation, il faut que l’idée de la souveraineté d’un pays fasse partie intégrante du nouveau système mondial». « Les villages de Jbeil et du Kesrouan ont soif » Interrogé sur ses priorités concernant sa région plus particulièrement, il précise : «L’une de mes principales priorités pour la région (et elles sont nombreuses), c’est l’eau. Tous les villages de Jbeil et la majorité des localités du Kesrouan ont soif. Les projets, pour remédier à ce manque, doivent être nombreux et exécutés de façon moderne». Continuant sur sa lancée, M. Hachem plaide pour que le dossier de l’eau constitue désormais une source de revenus pour l’État et non plus un fardeau. Pour ce faire, après l’exécution des différents projets, il est indispensable, selon lui, de responsabiliser le citoyen sur cette question cruciale en le poussant à économiser son utilisation d’eau par l’installation de compteurs, sur base desquels la facture sera payée. Dans une seconde étape, l’eau d’irrigation pourrait provenir des eaux usées traitées dans des usines modernes. L’environnement fait donc partie de ses préoccupations ? «Il s’agit de l’une des principales priorités à prendre en compte, mais il faudrait, auparavant, assurer les besoins en eau, dit M. Hachem. Le développement des transports est également une nécessité pour mieux relier les régions entre elles. Un troisième dossier, aussi important que les deux autres, devrait être traité urgemment : celui de l’éducation gratuite et obligatoire». De qui se sent-il le plus proche politiquement au niveau national ? «Je tiens à mon indépendance politique, rétorque-t-il. Je me sens aussi proche que loin de tous les courants ou personnalités politiques. Je soutiendrai ce qui auront raison et dénoncerai ce qui auront tort». Il ajoute : «Je plaide pour la création d’un nouveau genre de partis. Je ne suis pas en faveur des partis politiques à tendance confessionnelle. Si l’on prend en considération la superficie du Liban et sa population, le nombre de partis politiques ne devrait pas y excéder les trois ou quatre au maximum, comme dans tous les pays du monde. Deux grandes formations antagonistes (à l’instar des partis social et démocrate, conservateur et travailliste, etc.), un parti vert et, peut-être, un dernier parti de centre. Ainsi, ces quatre formations seront en mesure de regrouper toutes les tendances libanaises». Ce serait à partir de là, selon M. Hachem, que le député pourra assumer pleinement son rôle qui est de légiférer dans l’intérêt du peuple qui l’a élu et du parti duquel il est issu et de contrôler l’Exécutif. «Mais nous devrions passer par plusieurs étapes avant d’atteindre une situation idéale, précise-t-il. À mon avis, il faudrait commencer par une loi électorale proportionnelle pour assurer une représentation plus équitable». Dans le cas où ce système politique basé sur de nouveaux partis serait instauré, à quelle formation pourrait-il appartenir ? «Je n’en serais pas moins indépendant», répond-il, impassible. Le nouveau député de Jbeil a-t-il un hobby, une passion ? «J’étais un passionné de natation et de lecture, répond-il. Mais récemment, je me suis pris de passion pour l’Internet. J’aime m’informer sur ce qui se passe dans le monde. Ce nouveau hobby s’est malheureusement développé aux dépens de mes anciens centres d’intérêt. Toutefois, je lis toujours durant vingt à trente minutes avant de dormir». Quelles sont ses lectures préférées ? «J’ai sacrifié les livres au profit des journaux désormais», dit-il. Il faut préciser qu’il existe un site sur Internet consacré à M. Hachem, www.abbas-hachem. com. À travers ce site, des sondages d’opinion sont effectués régulièrement et visent à faire participer le public, notamment les jeunes, aux prises de décision. Suzanne BAAKLINI
Abbas Hussein Hachem, nouveau député élu au seul siège chiite de Jbeil, affiche d’ores et déjà sa volonté de contribuer à un changement en profondeur du paysage politique libanais : d’une part, la nécessité du retour en force des vraies valeurs, fondement de toute politique et qui, selon lui, font aujourd’hui défaut. D’autre part, l’instauration d’un nouveau...