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Actualités - ANALYSE

Le report des consultations suscite un malaise Entretiens Lahoud-Assad en marge du sommet arabe

La version loyaliste concernant le report des consultations parlementaires en laisse plus d’un sceptique. Même certains loyalistes n’y croient pas. «Comment, s’exclame l’un d’eux, quand l’heure est si grave, peut-on prétendre qu’il faut retarder la désignation d’un nouveau Premier ministre pour ménager courtoisement M. Sélim Hoss ? Ce dernier lui-même ne voit pas l’utilité d’un tel respect des formes et s’en lave ouvertement les mains. L’explication donnée est pour le moins maladroite, sinon mal avisée». Mais alors que les proches du régime nient qu’il y ait de l’eau dans le gaz dans les rapports avec M. Rafic Hariri, la plupart des observateurs locaux pensent que «s’il n’y avait pas problème, le milliardaire aurait été désigné tout de suite». Certains supputent cependant qu’il n’y a «sans doute pas de litige palpable, mais le chef de l’État a voulu quand même voir si les développements régionaux et le sommet arabe n’allaient pas changer les donnes sur le plan local. En permettant sinon un autre choix que M. Hariri, du moins une limitation de son pouvoir de sélection des ministres». Et de rappeler à ce propos que «les proches de Baabda n’ont jamais caché le souhait d’avoir un droit de regard sur l’attribution des portefeuilles à caractère sécuritaire ou stabilitaire, comme l’Intérieur, la Justice, la Défense et l’Information. Parallèlement, Baabda n’est sans doute pas mécontent d’entendre le président Berry soutenir que lui aussi doit être consulté et qu’il veut pouvoir désigner trois ministres ainsi que choisir leurs maroquins». En tout cas, si l’on excepte le premier cercle des partisans, la décision de report a suscité un net malaise chez les professionnels. C’est une question de confiance qui se pose : si tout est revenu à la normale dans les rapports Baabda-Koraytem, pourquoi faire attendre la désignation ? À cela un loyaliste bon teint tente de répondre en affirmant qu’on va «trop loin dans les déductions. Le chef de l’État a simplement voulu que les choses mûrissent un peu plus. Il souhaite en effet qu’on prenne un peu le temps de la réflexion, car le pays a besoin d’un gouvernement vraiment solide. Il a bien vu, avec le Cabinet Hoss, dont le bilan final n’est pas bien brillant, ce que la précipitation et les a priori peuvent donner». Cette même source se penche ensuite sur un point de détail : «Rien dans la Constitution, dit-elle, n’oblige le président de la République à entreprendre les consultations parlementaires dans des délais déterminés». Une faille qui est tout aussi exacte que techniquement regrettable, dans ce sens que si la fantaisie lui en prenait, un chef de l’État pourrait laisser indéfiniment le pays sans gouvernement effectif. Toujours est-il que cette personnalité répète que «l’entente règne avec M. Hariri. Seulement, la combinaison finale n’est pas encore au point. Et il faudra sans doute une troisième réunion pour la parachever. Il reste des détails à régler et cela se ferait à tête reposée après le retour du Caire et avant la désignation». Quoi qu’il en soit, la véritable explication du report, que très peu de politiciens évoquent, réside peut-être dans cette information : en marge du sommet arabe, le président Émile Lahoud devra avoir des entretiens prolongés avec son homologue syrien, le président Bachar el-Assad. Au programme, la situation régionale, bien entendu. Mais aussi les complexités du dossier ministériel libanais. Car les difficultés ne manquent pas et la Syrie peut aider à les surmonter. Ainsi les partisans du président Berry réclament à cor et à cri le portefeuille des Finances, en affirmant qu’il avait été décidé lors de la conférence de Taëf que désormais il serait assumé par un chiite. À part l’intérêt (c’est le mot) intrinsèque de ce département, il représente un avantage plus général, assez mal connu : tous les décrets, à part la nomination ou la démission d’un gouvernement, doivent être contresignés par le ministre des Finances, aux côtés du président de la République, du président du Conseil et du ministre directement concerné. Bien entendu, les haririens veulent les Finances pour eux. Ils font valoir que pendant six ans M. Hariri en a été titulaire, secondé par M. Siniora, sans que les amalistes protestent. Et ces derniers répondent qu’en termes de tolérance, une pratique peut être contestée à tout moment, le droit de base devant prévaloir. Encore que, par exemple, on ne voit pas trop où est ce «droit de base» en ce qui concerne la direction de la Sûreté générale, confiée maintenant pour la première fois à un non-chrétien, plus précisément à un chiite. Et cela au titre, hautement justifiable ou légitime, du changement en faveur de la compétence plutôt que de l’attribution confessionnelle. Philippe ABI-AKL
La version loyaliste concernant le report des consultations parlementaires en laisse plus d’un sceptique. Même certains loyalistes n’y croient pas. «Comment, s’exclame l’un d’eux, quand l’heure est si grave, peut-on prétendre qu’il faut retarder la désignation d’un nouveau Premier ministre pour ménager courtoisement M. Sélim Hoss ? Ce dernier lui-même ne voit pas...