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Actualités - INTERVIEWS

RENCONTRE - Le secrétaire général adjoint du Hezbollah minimise la portée des menaces israéliennes Cheikh Naïm Kassem : D’accord pour la médiation d’Annan, mais des gouvernements peuvent aussi intervenir

Ce n’est pas une véritable conférence de presse qu’a tenue hier le secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem, mais une rencontre à bâtons rompus avec les correspondants de la presse étrangère en quête d’informations à envoyer à leurs médias. Discret sur les conditions pour la libération des soldats israéliens capturés samedi à Chebaa, conformément aux nouvelles directives du secrétaire général devenu la seule personne habilitée à évoquer ce thème, cheikh Kassem a quand même lancé quelques éléments nouveaux. Selon lui, les soldats ne peuvent être libérés que dans le cadre d’un échange et ceux qui affirment le contraire se trompent sur toute la ligne. En dépit des divergences sur l’interprétation de la résolution 425, le Hezbollah accepte la médiation du secrétaire général des Nations unies «s’il apporte d’Israël des propositions acceptables». Les journalistes ont eu beau tourner les questions sous toutes les formes possibles dans l’espoir de «tromper» le secrétaire général adjoint, rien n’y a fait. Pas un mot en dehors de la marge permise, mais beaucoup d’assurance et de confiance en soi. Cheikh Kassem a ainsi affirmé que les Israéliens savaient depuis deux mois que le Hezbollah préparait une opération de ce genre, mais ils n’ont pas pu l’entraver, tant la résistance était bien préparée... Beaucoup de questions sont donc restées sans réponses, mais la trentaine de journalistes conviés à cette rencontre ont eu droit à un scénario digne de films noirs américains : fouille stricte au bureau de l’information du parti puis départ par un sous-sol sans objets personnels ni pièces d’identité, dans des minibus aux fenêtres recouvertes de bâches noires vers le lieu où cheikh Kassem a tenu sa conférence. Arrivée dans un autre sous-sol où la fumée noire d’une chaudière à mazout rend la vue encore plus difficile, puis montée de marches sales et enfin arrêt au troisième étage dans une salle étouffante, aux murs recouverts de lourdes tentures vertes. C’est d’ailleurs par une petite porte dérobée, sous les tentures, que cheikh Kassem a fait son entrée, accompagné d’un traducteur et d’une bonne escorte. La famille de Obeid est restée deux ans sans nouvelles D’emblée, le secrétaire général adjoint a annoncé qu’il n’était pas question pour lui de fournir la moindre information sur l’état de santé des soldats israéliens ou sur le cours des négociations ainsi que sur les conditions mises par le Hezbollah. «La famille de cheikh Abdel-Karim Obeid est restée deux ans sans nouvelles de lui, nul ne s’en est soucié. Pourquoi nous demande-t-on plus qu’aux Israéliens ? Personne ne saura rien avant que nous ne le décidions et, en ce qui nous concerne, il s’agit d’un deal global». Les négociations ont-elles déjà commencé ? «Je dirais qu’il y a des contacts, vous voulez les appeler des négociations, libre à vous. Mais nous ne donnerons aucun détail». Cheikh Kassem a évoqué la lettre remise au Hezbollah par le représentant du CICR au Liban, M. Henri Fournier, en précisant que pour l’instant elle est sans réponse, «mais s’il y en a une, c’est sayyed Nasrallah qui vous en parlera». Des gouvernements étrangers ont-ils un rôle à jouer dans ces négociations ? «C’est possible», a répondu cheikh Kassem. Mais certaines sources du Hezbollah ont laissé par la suite entendre que la médiation iranienne avait des chances d’aboutir, tout en précisant que le ministre iranien des Affaires étrangères, qui entame une tournée à Damas et à Beyrouth, compte évoquer dans le cadre des négociations le cas des diplomates iraniens disparus au Liban en 1982 et qui, selon Téhéran, auraient été remis aux Israéliens par les Forces libanaises de l’époque. De même, un rôle allemand pourrait être envisagé, un ancien responsable allemand de la sécurité ayant déjà participé à un échange entre les Israéliens et le Hezbollah. En réponse à une question, le secrétaire général adjoint a estimé que l’opération de Chebaa a fait l’unanimité au Liban et si les Israéliens savaient qu’elle aurait lieu, les autorités libanaises devaient aussi le savoir. Au moins dans les grandes lignes. Pour les autorités, il s’agit du droit légitime des Libanais d’obtenir la libération de leurs prisonniers en Israël. D’ailleurs, toutes les divergences avec le secrétaire général des Nations unies viennent de là. «Lorsqu’en juin M. Annan a déclaré que la résolution 425 avait été appliquée par Israël, nous n’étions pas d’accord avec lui. Pour nous, et pour le gouvernement libanais, tant que les hameaux de Chebaa sont encore occupés, tant que des Libanais sont encore détenus en Israël et tant que les résultats de l’occupation israélienne de la Palestine continuent de se faire sentir au Liban par la présence des réfugiés palestiniens, on ne peut considérer que la 425 a été appliquée et nous pouvons donc utiliser notre droit légitime à la résistance». Le rôle de la Syrie Malgré tout, cheikh Kassem a estimé que, si M. Annan est porteur de propositions israéliennes acceptables pour nous, sa médiation sera la bienvenue. Mais des sources proches du parti ont laissé entendre qu’il faudrait aussi que M. Annan demande à rencontrer sayyed Nasrallah pour écouter son point de vue. En réponse à une question, cheikh Kassem a nié que le Hezbollah ait informé les Syriens de son intention de mener cette opération et, selon lui, la Syrie n’interviendra pas dans les négociations, «car tout le monde est conscient que la partie qui négocie a besoin d’une certaine liberté de manœuvre». Cheikh Kassem a ensuite minimisé l’importance des menaces israéliennes, affirmant qu’elles sont surtout destinées à l’opinion publique israélienne. «Je crois que Barak est conscient de ce que signifierait une agression contre le Liban. Il ne peut en assumer les conséquences surtout avec l’intifada en Palestine et l’enlèvement des trois soldats». Prié de préciser la portée des missiles que possède le Hezbollah, maintenant que ses hommes se trouvent à la frontière, cheikh Kassem a déclaré : «Vous aurez l’occasion de la mesurer et de photographier les dégâts, lorsque nous en enverrons si Israël mène une quelconque agression contre le Liban». Revenant sur l’opération de Chebaa, cheikh Kassem a déclaré qu’elle a été minutieusement préparée pendant deux mois, mais que le Hezbollah a joué sur le timing, «afin qu’il soit en harmonie avec l’intifada en Palestine». Il a répété que le Hezbollah ne fournirait aucune indication sur les contacts en cours pour ne pas compromettre l’échange. Mais il a ajouté que sa formation n’a même pas encore publié les noms des trois soldats capturés. «Ils pourraient être différents de ceux qui circulent dans la presse». Prié de préciser les raisons de l’opposition du Hezbollah au déploiement de l’armée au Liban-Sud, cheikh Kassem a déclaré que le Hezbollah ainsi que l’État libanais considèrent que, si l’armée libanaise se déploie le long de la frontière, elle sera responsable de toute infraction sur cette portion de territoire et servira ainsi de force de protection pour les Israéliens. Ce qui est hors de question tant que des points litigieux demeureront en suspens. «C’est pourquoi, le gouvernement a préféré envoyer des forces de sécurité chargées de protéger les citoyens libanais, non les Israéliens». Scarlett HADDAD
Ce n’est pas une véritable conférence de presse qu’a tenue hier le secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem, mais une rencontre à bâtons rompus avec les correspondants de la presse étrangère en quête d’informations à envoyer à leurs médias. Discret sur les conditions pour la libération des soldats israéliens capturés samedi à Chebaa,...