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Actualités - ANALYSE

Un Noël sous les néons

 Albert, qui en savait un bout sur les valeurs humaines, disait à ses enfants, citant Anatole France : «Merci mon Dieu de m’avoir créé pauvre, car tu as créé en moi le désir». Albert aurait eu cent ans s’il avait vécu. D’ailleurs, qui lit encore Anatole France ?. Poke et Mon ? Ah non ! Poke à Noël et je te laisse désirer Mon pour ton anniversaire. Ah bon, c’est un seul mot ? Alors ça va. Comment, ils sont plus de cent cinquante ? On fait semblant que les bras vous en tombent. Vous savez bien qu’il règne de nos jours, sur les rêves des petites têtes, un père Noël pervers que rien n’assouvit. Même les jouets ne se suffisent plus à eux-mêmes : ils sont soit progressifs, soit complémentaires, soit assortissables à l’infini. Normal : ils prétendent reproduire la vie, sa tête, ses rêves d’adultes faillibles et jamais assez parvenus. Et la vie, c’est vaste. Et Noël est cruel depuis qu’il est traduit en termes économiques par un bref cycle de «reprise». Dès novembre les anges en tubes et les étoiles ampoulées balisent votre voie vers la «reprise» Viens et suis-moi, dit le néon, et l’on y va tête basse, hallucinés. Alors, chaque pièce qui tinte sur le comptoir inflige à l’électrocardiogramme plat de notre économie un imperceptible soubresaut : miracle de Noël. Noël approche. Encore un petit effort, les lumières clignotent de plus belle, la scie pousse le volume, et en cadence : Jingle bells, Les anges dans nos... fils électriques et surtout n’oublie pas mes petits souliers usés de courir les courses, au premier arrivé sous le sapin ! Maudit sapin de la reprise qui finit par vous reprendre un jour. Maudit sapin qui vous fait oublier Noël. La naissance d’un tout petit. Deux mille et une années que l’on célèbre «naître» avec à chaque fois un petit pas de plus dans le néant. On est à deux doigts de vous resservir, et tant pis, on vous la ressert : Heureux temps où l’on attendait la fête. Où la fête était le jour béni d’une trêve. Trêve pour s’aimer, trêve pour manger ensemble un repas de fête avec des plats qu’on ne pouvait pas servir les autres jours de l’année. Parce que la volaille n’avait pas fini de grossir, et tout ça. Petite Marie, en ce temps-là je t’aurais bien offert, enveloppé avec amour et serré au creux de mes deux mains ce fruit de Noël où se cachent un métal précieux et un habitant des cieux. Tu l’aurais désirée, cette orange. Tu en aurais savouré le parfum et la couleur et j’aurais vu briller tes jolis yeux. Fifi ABOUDIB
 Albert, qui en savait un bout sur les valeurs humaines, disait à ses enfants, citant Anatole France : «Merci mon Dieu de m’avoir créé pauvre, car tu as créé en moi le désir». Albert aurait eu cent ans s’il avait vécu. D’ailleurs, qui lit encore Anatole France ?. Poke et Mon ? Ah non ! Poke à Noël et je te laisse désirer Mon pour ton anniversaire. Ah bon, c’est un...