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Actualités - CHRONOLOGIE

PARTIS - Un millier de nouveaux adhérents prêtent serment à la cérémonie du 66e anniversaire des Kataëb Joumblatt, Frangié et Pakradouni appellent à une plus grande intégration des chrétiens dans le monde arabe(photos)

Seul le pavillon royal au Biel était digne de servir de cadre à un moment aussi important : le chef du PSP Walid Joumblatt et le ministre de la Santé Sleimane Frangié prononçant des discours à la cérémonie pour le 66e anniversaire du parti Kataëb. Certes, les Kataëb ont entre-temps bien changé, mais l’image est quand même très forte. Surtout avec les 1 082 jeunes qui prêtaient serment en tenue blanche, faisant de ce parti le seul après le Hezbollah à avoir autant de nouveaux adhérents en cette période d’effritement politique. Place donc à l’ouverture, au dialogue et à la jeunesse, le parti Kataëb a voulu afficher sans complexes ses couleurs et sa stratégie qui porte un seul titre : le retour des chrétiens au sein de l’État, en se tournant résolument vers l’avenir. Pas question de réitérer les erreurs de l’an passé. La direction du parti Kataëb a voulu, cette année, célébrer l’anniversaire de la fondation du parti, dans un lieu neutre, en plein cœur de la capitale, comme pour bien marquer le retour aux sources, mais aussi la lente reconquête de la place prépondérante qu’occupait le parti sur la scène locale. Privilégiant un marketing à l’américaine, ballons vert et blanc, confettis et jeux de lumière, la direction a mis les petits plats dans les grands. Les quelque 5 000 personnes présentes ont même eu droit à une chanson patriotique de Micheline Khalifé, qui, à une époque lointaine, animait d’ailleurs une émission à la Voix du Liban. Sans oublier les gardes en tenue coloniale, comme lors de la fondation du parti, la troupe musicale et les chants, anciens et nouveaux, chargés de chauffer l’ambiance. Pas de présence « gênante » Bref, un mélange harmonieux de passé et de présent pour redonner vie à un parti qui veut se tourner vers l’avenir. Pendant des jours, les organisateurs ont étudié les moindres détails de la cérémonie, veillant à la synchronisation des étapes et préparant l’accueil et l’installation des invités. Pas de présence « gênante » ou difficile à assumer, ce dimanche donc. Aucun représentant des autorités syriennes, selon le chef du parti Karim Pakradouni, n’a été invité, car il s’agit d’une célébration interne. En tout cas, leur absence permet d’atténuer l’impact de certaines images récentes. De même, le député Nasser Kandil, retenu par d’autres rendez-vous, n’était pas là, ainsi que le député Michel Murr, qui a préféré laisser la vedette à son fils, le ministre de l’Intérieur, qui représentait aussi le président de la République. Le ministre Mohammed Beydoun arborait un profil assez bas, alors que les figures traditionnelles du parti étaient à l’honneur. Absent aussi le folkore des meetings « des partis nationaux » auxquels nous avons été habitués ces derniers temps, mais présents par contre les drapeaux Kataëb, les portraits du fondateur cheikh Pierre Gemayel, de l’actuel président du parti ainsi qu’un portrait du chef de l’État Émile Lahoud pour mettre en évidence les nouvelles options du parti. Une cérémonie interne donc, en quelque sorte, qui laisse toutefois une place privilégiée aux nouveaux alliés, Walid Joumblatt et Sleimane Frangié. Le chef du PSP a d’ailleurs tenu à garer lui-même sa voiture au parking avant de faire tout le chemin à pied accompagné des ministres Marwan Hamadé et Ghazi Aridi et de députés membres de son bloc. Refusant la place d’honneur qui lui était attribuée, il s’est installé dans un coin attendant son tour de prendre la parole. À 11h pile, la cérémonie a commencé avec les hymnes et la prestation de serment des 1 082 nouveaux adhérents, des jeunes vêtus de blanc, dont 8 % de non chrétiens (des chiites et des druzes), 56 % âgés de moins de 25 ans et 22 % originaires du Haut-Metn. Pakradouni ne s’est d’ailleurs pas privé de le rappeler dans son discours, misant sur la jeunesse, l’unité et la coexistence, tout en précisant toutefois que la grande majorité des nouveaux adhérents reste maronite, suscitant ainsi les applaudissements de l’assistance. Les lumières se sont éteintes pour donner plus de solennité au moment et, après le serment, Abir Najm, nouveau membre à Achrafieh, a prononcé un discours au nom des nouvelles recrues. « Nous voulons maîtriser notre destin, tourner le dos au désenchantement et à la démission, regarder l’avenir avec confiance et surtout le bâtir de nos mains », a-t-elle dit d’une voix forte et claire, parfois cassée par l’émotion. Joumblatt et la « Kornet » qui retient le patriarche en otage Premier politique à prendre la parole, Walid Joumblatt a préféré concentrer ses propos sur une vision régionale, plutôt que de se lancer dans les méandres rebutants de la politique locale. Ce qui ne l’a pas empêché de dire au passage que dans l’État actuel il y a beaucoup de sécurité et un peu d’argent. Le leader du PSP a ainsi parlé d’ouverture, d’intégration dans le monde arabe, au lieu de rester dans « la Kornet », qui, selon lui, retient le patriarche maronite en otage et veut le transformer en partie alors qu’il ne l’est pas, au lieu de laisser les chrétiens s’épanouir dans leur environnement, affirmant leur identité arabe et leur longue histoire de coexistence avec les musulmans, comme l’a voulue l’Exhortation apostolique. Joumblatt a évoqué, devant l’assistance qui retenait son souffle, craignant une des sorties assassines du chef du PSP, un rêve qui le hante, dans lequel il voit les peuples arabes opprimés enfin libérés de leurs chaînes, descendant dans les rues pour dénoncer les humiliations que leur fait subir l’Administration américaine. « Imaginez, a-t-il dit, que nous puissions tous ensemble, paysans, ouvriers, étudiants, enseignants, artisans, syndicalistes, pilotes etc., nous opposer à la privatisation, aux banques et au FMI. Sommes-nous devenus si impuissants que nous réprimons les manifestations, par crainte des étudiants et du dialogue ? Un jour viendra où les frontières seront abolies et les fronts unifiés (...) Que le passé soit une leçon pour l’avenir. » Frangié et l’appui au président Lahoud Le ministre de la Santé, Sleimane Frangié, a de son côté insisté sur la justesse des choix de l’actuelle direction du parti, même si, a-t-il précisé, ils lui font perdre un peu de popularité. Frangié a réitéré son appui au président de la République, pour sa politique arabe, ajoutant qu’en suivant cette voie, même si elle est difficile, le Liban peut sortir de sa crise. Karim Pakradouni a pris la parole en dernier, commençant par s’adresser aux nouvelles recrues qui seront baptisées « session Maurice Gemayel ». « Vous êtes le présent et l’avenir, leur a -t-il déclaré, alors que d’autres veulent rester dans le passé, nostalgiques d’une gloire révolue. Préservez l’unité du Liban, sa souveraineté et son indépendance, protégez ce pays comme un message de coexistence dans l’équilibre et l’équité et ne le laissez pas se fondre dans les fédérations ou les confédérations. Soyez solidaires de vos camarades et n’oubliez pas les anciens, surtout Boutros Khawand, disparu il y a dix ans et dont nous essayons toujours de connaître le sort, mais aussi Élie Hobeika dont l’État doit découvrir les assassins. » Propos que la délégation du parti al-Waad a longuement applaudis. Le chef des Kataëb s’est ensuite adressé à l’assistance, précisant que le Liban sans les chrétiens ne serait plus le même, tout comme l’arabité sans le Liban. Tout en affirmant qu’il n’est plus inquiet pour l’avenir du pays, Pakradouni a confié ses angoisses pour celui des chrétiens. « Et c’est un problème qui concerne aussi tous les Libanais et les Arabes. » Pakradouni a rappelé que dès 1993 les Kataëb ont procédé à une autocritique, difficile et parfois blessante. « Nous nous sommes posé des questions qui font mal et nous sommes arrivés aux conclusions suivantes : il est dans l’intérêt des chrétiens de ne plus se lancer dans des aventures externes, mais au contraire de favoriser l’entente, malgré les sacrifices que cela entraîne. Il est aussi dans leur intérêt de ne pas détruire les institutions publiques, de combattre la corruption, le confessionnalisme et l’extrémisme, de cesser de boycotter l’État, de ne pas accepter une pacification avec Israël qui entraînerait un conflit interne et l’implantation des Palestiniens, de ne plus considérer la Syrie comme un ennemi, mais au contraire d’aider à l’assainissement de ses relations avec le Liban, en considérant que la présence d’Émile Lahoud et de Bachar el-Assad est une chance pour améliorer les relations entre les deux pays. De même, il n’est pas dans l’intérêt des chrétiens de s’isoler du monde arabe, mais ils doivent rappeler qu’ils sont originaires de cette région. » D’où l’idée de la tenue d’un congrès des chrétiens arabes. Pakradouni a enfin annoncé que le parti prépare un projet politique, basé sur la déclaration universelle des droits de l’homme, le document d’entente nationale et l’Exhortation apostolique et sur trois principes fondamentaux : l’entente prônée par Pierre Gemayel, l’unité du territoire, voulue par Bachir Gemayel et la modernité des institutions, prévue par Maurice Gemayel. C’est donc pratiquement un nouveau parti que veut lancer Pakradouni, débarrassé de ses vieux démons et résolument tourné vers l’avenir, en misant sur la jeunesse. « On ne peut pas construire le futur avec ceux qui restent plongés dans le passé, prisonniers de leurs frustrations et rêvant de nouvelles guerres », a ajouté le chef du parti en privé, avant de raccompagner ses invités. La cérémonie est terminée. Il reste maintenant à concrétiser les beaux discours. Scarlett HADDAD
Seul le pavillon royal au Biel était digne de servir de cadre à un moment aussi important : le chef du PSP Walid Joumblatt et le ministre de la Santé Sleimane Frangié prononçant des discours à la cérémonie pour le 66e anniversaire du parti Kataëb. Certes, les Kataëb ont entre-temps bien changé, mais l’image est quand même très forte. Surtout avec les 1 082 jeunes qui...