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Actualités - CHRONOLOGIE

SÉCURITÉ - L’Américaine tuée à Saïda travaillait depuis deux ans au dispensaire de l’Église évangélique Bonnie Penner-Witherall aurait été filée à plus d’une reprise par son assassin(photo)

Le parquet de Saïda a engagé des poursuites contre X réclamant la peine de mort contre l’assassin de la missionnaire américaine, Bonnie Penner-Witherall, tuée jeudi dernier, dans les locaux de la mission protestante de l’Alliance, qui abritent notamment un temple, une salle de catéchisme et un dispensaire. L’enquête menée par le premier juge d’instruction de Saïda, Nadim Abdelmalak, n’avait pas encore abouti, hier en soirée, à une quelconque piste. Et l’on ignore jusqu’à présent si le crime avait des motifs personnels, religieux ou politiques. Toujours est-il que l’assassinat de jeudi dernier est le premier perpétré contre un ressortissant américain depuis la fin des événements. Dans un communiqué publié jeudi, l’ambassade des États-Unis avait appelé ses ressortissants au Liban « à demeurer vigilants ». Au cours de la journée d’hier, le mohafez du Sud, Fayçal Sayegh, qui a présidé une réunion du conseil régional de sécurité au sérail de Saïda, a souligné que « le timing du crime et la nationalité de la victime laissent penser que les criminels ont pour but de porter atteinte à la sécurité, voulant dépeindre la région comme un îlot d’insécurité, allant même jusqu’à semer la discorde (entre les habitants de la ville) ». Hier, le magistrat en charge de l’enquête qui avait, au cours des jours précédents, entendu plusieurs témoins, dont notamment l’époux britannique de la victime, Garry Witherall, qui est également missionnaire et qui s’est porté partie civile, et les amis et collègues de la jeune Américaine, qui sont des ressortissants américains et britanniques pour la plupart, a recueilli le témoignage du médecin légiste, Afif Khafaja. Ce dernier lui a communiqué les résultats de l’autopsie : Bonnie Penner-Witherall a été abattue de trois balles à la tête, tirées à bout portant, d’un revolver 7 millimètres. « Des empreintes, qui pourraient aussi bien appartenir aux personnes qui travaillent au dispensaire qu’à l’assassin, ont été également prélevées sur le lieu du crime », a indiqué à L’Orient-Le Jour le premier juge d’instruction de Saïda. Rappelons que l’assassinat avait été perpétré jeudi dernier vers 7h30 au dispensaire de l’église de l’Alliance à Saïda. Le local est situé au deuxième étage d’un bâtiment qui abrite un temple et des salles de catéchisme relevant de cette église protestante née aux États-Unis et qui est présente au Liban depuis plus de cinquante ans. « L’église de l’Alliance appartient au synode protestant libano-syrien et possède plusieurs temples et dispensaires dans diverses villes et régions libanaises, notamment à Bourj Hammoud et à Byblos », a indiqué à L’Orient-Le Jour le pasteur Samy Dagher, chargé du centre de Saïda. « C’était la crème des femmes » « Nous étions présents à Saïda avant la guerre ; durant les événements, l’organisation populaire nassérienne avait occupé le bâtiment qu’elle nous a ensuite restitué en 1995, raconte le pasteur, soulignant que le dispensaire a ouvert ses portes il y a un peu moins de deux ans, et Bonnie Penner-Witherall, qui était présente à Saïda avec son mari missionnaire, a occupé tout de suite le poste d’infirmière. » « Elle travaillait auprès de notre gynécologue, Edmond Aoun, a-t-il encore dit, relevant que la majorité des patientes est musulmane. » « Bonnie était gentille et serviable, la crème des femmes, elle ne pouvait pas avoir d’ennemis personnels « , indique-t-il, estimant que la victime aurait été filée à plusieurs reprises par son meurtrier. « Il a choisi d’agir très tôt, avant l’ouverture des épiceries et des magasins voisins, qui ouvrent boutique durant le ramadan à 9h30, et surtout avant l’arrivée du personnel ou des patientes du dispensaire », rapporte-t-il. Jeudi matin, avant d’ouvrir la porte du dispensaire à la personne qui l’avait assassinée, Bonnie, âgée de 31 ans, préparait son Nescafé. Elle n’a pas eu le temps de se débattre ou de crier. C’est à la bouche qu’elle a reçu la première balle. « La victime a apparemment ouvert la porte à son assassin qui lui a immédiatement logé trois balles à la tête, car il n’y a aucune trace de violence », avait indiqué un enquêteur jeudi dernier à l’AFP. « Le crime ne semble pas avoir de motifs personnels, il s’agit apparemment d’un acte commis par une personne débordant de sentiments antiaméricains, dans le contexte hostile aux États-Unis », avait encore relevé un officier de police, sous le couvert de l’anonymat. Interrogés par la presse, certains amis et collègues étrangers de Bonnie Penner-Witherall avaient relevé que « le dispensaire de l’église de l’Alliance avait reçu des menaces de la part de groupes islamistes radicaux ». « La fréquence de ces avertissements a augmenté, il y a environ trois ou quatre mois, et leur langage est devenu plus menaçant. Les mises en garde provenaient d’extrémistes sunnites nous demandant de cesser nos activités et de nous en aller », avait rapporté à l’agence Reuters, à l’issue de l’assassinat, une collègue de la victime. Au cours de la journée de jeudi, l’ambassadeur des États-Unis, Vincent Battle, avait rendu visite au ministre de l’Intérieur Élias Murr. À l’issue de l’entretien qui avait duré plus d’une heure trente, M. Battle s’était abstenu de tout commentaire. En soirée, la chancellerie américaine au Liban avait publié un communiqué affirmant que l’ambassade « n’a pas d’informations sur les motifs du crime » et appelant ses ressortissants au Liban à redoubler de vigilance. Peu après l’assassinat, des diplomates et des responsables de la sécurité des ambassades américaine et britannique s’étaient rendus à Saïda. « Ils ont visité le centre, interrogé le personnel et parlé aux autorités policières et judiciaires de la ville en charge de l’enquête », rapporte encore le pasteur Dagher, indiquant à L’Orient-Le Jour qu’une « assistante britannique qui occupe le poste d’infirmière ainsi que l’époux de la victime, qui habitaient tous Saïda, se trouvent actuellement à Beyrouth ». « Porter atteinte au Liban » L’assassinat avait provoqué de vives réactions dans les rangs des responsables libanais. Le Premier ministre, Rafic Hariri, qui est originaire, rappelons-le, de Saïda, avait qualifié, dans un communiqué distribué par son centre de presse, l’assassinat de « crime horrible que rien ne saurait justifier », jugeant qu’il « s’inscrit dans le cadre d’une tentative de porter atteinte aux acquis du Liban dans le domaine de la sécurité et aux efforts du gouvernement qui visent à consolider la stabilité et la confiance dans le pays ». « Le Premier ministre a demandé à tous les services de sécurité et aux organismes judiciaires concernés de mener l’enquête avec assiduité afin de dévoiler les circonstances de ce crime qui porte atteinte à toutes les valeurs humaines et religieuses du peuple libanais en ce mois sacré de ramadan, outre les tentatives de porter atteinte aux relations du Liban avec le monde », indique le texte. Les deux députés de Saïda, Bahia Hariri et Oussama Saad, ont condamné le crime, et une réunion regroupant des responsables et des dignitaires religieux musulmans et chrétiens du chef-lieu du Liban-Sud s’était tenue à la résidence de Mme Hariri à Majdelyoun. Les responsables présents ont dénoncé l’assassinat soulignant l’importance de la coexistence islamo-chrétienne à Saïda. Mais c’est un autre son de cloche que l’on entendait chez quelques dignitaires religieux de la ville. Vendredi dernier, le cheikh Maher Hammoud a déclaré qu’il ne compte pas condamner l’assassinat. Il a en revanche appelé les Libanais à recourir à d’autres méthodes pour manifester leur hostilité envers la politique étrangère des États-Unis. « Nous ne condamnons pas, mais nous voulons des méthodes différentes de celle-ci pour montrer que notre société, dans son ensemble, est hostile à la politique américaine », a-t-il dit. « Les meurtres et les attentats à la bombe visant les Américains où que ce soit (...) sont l’expression de la condamnation de la politique américaine par les musulmans », a ajouté le dignitaire, qui dit avoir prévenu à plusieurs reprises la mission chrétienne qu’elle n’avait pas à tenter de convertir des musulmans. Cité par notre confrère ad-Diyar, l’évêque grec-catholique de Saïda et de Deir el-Qamar, George Kouweiter, s’est demandé qui finance et pour quel compte travaillent certaines cellules de missionnaires protestants au Liban, notamment à Saïda. Interrogé au sujet des propos hostiles à l’église de l’Alliance, le pasteur Dagher a encore une fois rappelé qu’elle « fait partie du synode protestant libano-syrien et qu’elle est opérationnelle au Liban depuis une cinquantaine d’années ». « Si certaines parties estiment que notre financement est suspect, que des enquêtes soient menées et que l’on nous mette en prison, a-t-il ajouté, rappelant que l’église de l’Alliance, comme toutes les églises évangéliques, a une mission, nous prêchons l’amour de Dieu et le salut en Jésus-Christ. Certains même nous qualifient d’infidèles mais nous n’avons jamais fait de mal à personne », déclare-t-il encore à L’Orient-Le Jour, reconnaissant – deux jours après le crime de jeudi – que la branche de l’église de l’Alliance à Saïda « a reçu des conseils de fermer le dispensaire ». Après l’assassinat de Bonnie Penner-Witherall, le dispensaire a été fermé sine die. L’église évangélique de l’Alliance continuera à fonctionner dans la ville du Sud. Aujourd’hui à 15 heures, un office religieux sera célébré au temple de Saïda pour le repos de l’âme de Bonnie Penner-Witherall. L’enquête se poursuit. Pat. K.
Le parquet de Saïda a engagé des poursuites contre X réclamant la peine de mort contre l’assassin de la missionnaire américaine, Bonnie Penner-Witherall, tuée jeudi dernier, dans les locaux de la mission protestante de l’Alliance, qui abritent notamment un temple, une salle de catéchisme et un dispensaire. L’enquête menée par le premier juge d’instruction de Saïda,...