Rechercher
Rechercher

Actualités

CONFÉRENCE-CONCERT - « Bizet voyageur » par Jean Lacouture, Jorge Chaminé et Marie-Françoise Bucquet Un homme écrasé par son chef-d’œuvre(photos)

L’association des Amis de Georges Bizet, dont font partie l’écrivain Jean Lacouture, le baryton Jorge Chaminé et la pianiste Marie-Françoise Bucquet, existe entre autres pour « atténuer une étrangeté de l’histoire », qui est de rendre hommage à « un homme écrasé par son chef-d’œuvre » (Jean Lacouture) et, dans le cas présent, Georges Bizet par son opéra Carmen. C’est ce que les trois défenseurs, chacun dans son domaine, ont fait mardi dernier, à l’amphithéâtre Aboukhater de l’USJ. L’Italie, voie de lumière Dans un exposé enlevé, l’écrivain français a fait « réapparaître Georges Bizet derrière le personnage flamboyant de Carmen », en rappelant le génie précoce de ce « Parisien né en 1838 de parents professeurs de musique, entré très jeune au Conservatoire et ayant eu comme professeurs deux maîtres, Marmontel pour le piano et Halévy pour la composition. Un enfant prodige, capable dès l’âge de 13 ans de jouer les pages les plus difficiles de Liszt, qui lui vouait une grande estime. » C’est en gagnant le Prix de Rome et en séjournant trois ans à la villa Médicis que Georges Bizet connaîtra « trois ans de bonheur, poursuit le conférencier. Tout simplement parce que le jeune homme découvre avec éblouissement le soleil d’Italie. D’une certaine manière, s’ouvre pour lui une voie de lumière. » Sang espagnol dans la vie parisienne De retour à Paris, une existence décevante, « de tâcheron », commence pour le tout jeune compositeur, qui a signé à 17 ans sa première et unique symphonie. « Gounod, qui le prend sous sa protection, l’encourage à devenir musicien de théâtre. » Cinq tentatives, qui ne lui apportèrent pas le succès attendu : Les pêcheurs de perles (1863), La jolie fille de Perth (1867), Djamileh (1872), L’Arlésienne (dont il tirera une Suite d’orchestre, qui sera la seule à faire parler de lui de son vivant) et Carmen (1875) : « Ce voyageur en esprit, explique Jean Lacouture, a fait le choix étrange de cette histoire sauvage racontée par Prosper Mérimée. Il faut dire que Manuel Garcia, chanteur et compositeur espagnol, installé à Paris, et ses deux filles, Pauline Garcia Viardot et celle qui a été surnommée “ la Malibran “, ont donné un sang espagnol à la vie parisienne du Second Empire. Bizet s’est donc informé auprès des chansons interprétées par Garcia et des compositions originales que ses éditeurs lui envoyaient par courrier. » Obscénité géniale L’échec est cuisant : le public de l’Opéra-Comique, « poudré et mondain, découvre sur scène une folle et un assassin, et tous les critiques, sauf Théodore de Banville, qui en saisit le génie, qualifient le spectacle d’obscénité. » L’opéra aura droit à 40 représentations, et le jeune compositeur, déjà malade, en mourra presque de chagrin après la vingtième soirée. Trois mois après son décès, « Carmen fait un triomphe à Vienne, conclut l’intervenant. Tchaïkovski lui prédit un triomphe à travers le monde et Nietzsche qualifie l’œuvre de “midi de la musique”. » Happy few, encore et toujours Après la conférence, le concert —une formule efficace et intéressante, qui pourrait retenir l’attention des organisateurs de festivals. Jorge Chaminé, baryton à la présence et à la stature magnifiques, accompagné de son épouse, la pianiste Marie-Françoise Bucquet, a interprété, petites explications à l’appui, 11 morceaux issus du répertoire espagnol des XIXe et XXe siècles. Manuel Garcia, mais aussi Joaquin Nin (le père de la sulfureuse Anaïs), Federico Garcia Lorca, Manuel de Falla, Francisco Alonso et, bien sûr, Bizet. Une performance exceptionnelle (les deux interprètes ont enregistré une série de disques disponibles sur le marché), qui n’aurait pas dû passer aussi inaperçue ou, du moins, qui aurait pu alerter un autre public que celui de l’éternel happy few beyrouthin. D.G.
L’association des Amis de Georges Bizet, dont font partie l’écrivain Jean Lacouture, le baryton Jorge Chaminé et la pianiste Marie-Françoise Bucquet, existe entre autres pour « atténuer une étrangeté de l’histoire », qui est de rendre hommage à « un homme écrasé par son chef-d’œuvre » (Jean Lacouture) et, dans le cas présent, Georges Bizet par son opéra Carmen....