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Actualités - OPINION

Hommage Lionel Gorra, un aventurier sur le chemin de la culture(photo)

Par Abdo EL-KAHI* Dans le prolongement des nombreuses activités organisées à l’occasion du Sommet de la francophonie, le club culturel La Pléïade et le club social et culturel d’Adonis organisent aujourd’hui, vendredi, à Zouk Mosbeh, une cérémonie en mémoire de trois grands penseurs et intellectuels francophones qui ont résidé à Zouk Mosbeh : l’écrivain Georges Schéhadé, le psychiatre Édouard Azouri et Lionel Gorra. La cérémonie aura lieu sous le patronage de la municipalité de Zouk Mosbeh. Un rassemblement est prévu à 17 heures devant le siège du conseil municip al, face à l’église Notre-Dame du Rosaire. Les personnes présentes se dirigeront à pied vers les domiciles respectifs de Georges Schéhadé, Édouard Azouri et Lionel Gorra afin de lever le voile sur les plaques commémoratives placées par la municipalité de Zouk Mosbeh à l’entrée des trois résidences. À cette occasion, M. Abdo Kaï, chercheur universitaire et professeur de sociologie à l’Université Saint-Joseph, nous communique un hommage à Lionel Gorra qui avait fondé au sein du ministère du Tourisme L’accueil des jeunes, un organisme placé au service des jeunes Libanais et étrangers soucieux de connaître les sites touristiques et archéologiques du pays. Lionel Gorra a été également, avec Sami Karkabé, l’un des principaux promoteurs du club de spéléologie du Liban. On lui doit aussi la promotion et le développement de la grotte de Jeïta. Je l’ai connu comme responsable du bureau de tourisme des jeunes et je l’ai retrouvé à Zouk Mosbeh comme retraité «mutant», comme il se plaisait alors à se définir; toujours aussi aventurier sur le chemin de l’altérité et de la culture, s’adressant aux jeunes, aux enfants et à tous avec une jeunesse d’esprit qui défie la durée et balaie le temps. Évidemment qu’il était francophone, avec son accent parisien défiant les intellectuels qui fréquentent le Café de Flore, boulevard Saint-Germain. Mais sa francophonie était plus spécifiquement culturelle, je dirais même spirituelle, parce qu’à travers lui, cette francophonie en arrivait à colorer sans déteindre les paysages qu’elle touchait. Elle chantait à la musique qu’elle puisait de la profondeur du Liban, cœur de l’Orient et résonnant des échos de l’Occident sur les flancs de ses montagnes. Elle s’exprimait à la lumière du siècle des Lumières, de l’école de Vienne, du théâtre classique à ses origines grecques (Sophocle) et dans ses répercussions shakespeariennes, ainsi que celles se réclamant de la langue et l’art de Molière, Racine, Corneille, ou enfin du théâtre moderne en s’arrêtant particulièrement sur Ionesco. Et le dialoguait sans faire taire, à la recherche de nouveaux arguments pour relancer l’envie de la discussion et renouer les liens entre ceux qui y participaient. Fils de Zahlé, un des hauts lieux de la Békaa, il réussissait par sa francophonie à apaiser les gémissements de ses origines et de ses racines fondatrices de son cachet culturel et de sa spécificité identitaire de départ, en les invitant à se mesurer à la hauteur de la culture à laquelle il aspirait. Cette culture se déclinait et se laissait construire, et s’emmagasiner en lui et dans son environnement sur les chemins de son voyage, un voyage qu’il a entamé étant jeune et qu’il a terminé en franchissant la barrière de la mort. Dans ce voyage, qu’il effectuait à travers ciel, mer et terre, livres, musique et art dans toutes ses expressions, il emportait toujours sa montagne, la montagne libanaise, sans oublier la plaine et les vagues qui bavardent sur les rivages qu’elles côtoient. Il transportait son Liban pour lui faire visiter le monde, l’ouvrir sur les horizons que dessinent d’autres mers et océans, et le faire accueillir sur tous les rivages par ceux et celles qui, comme lui, étaient assoiffés de brassage de langues et de cultures, parce qu’ils retrouvaient dans ce brassage, le sens de leur recherche : l’Universel et l’Humain. Dans son voyage, il apprenait aussi à son Liban, qu’il chérissait, à accueillir tous ceux qui apprécient l’escalade de ses cimes sans craindre de faire baigner leurs pieds dans les flots qui caressent les flancs de ses montagnes, transformés en falaises ou en sable doux, pour recevoir les voyageurs avec leurs idées et cultures. Devenu retraité et rêvant de poursuivre son voyage, il atterrit à Zouk Mosbeh. Il y trouve son lieu, son terroir. C’est un village qui se transforme en ville, en se désordonnant certes, mais en gardant quelques lieux cachés dans la nature, et en préservant des signes d’une culture à la recherche d’elle-même. Curieux comme il l’était, il y trouva sa maison de prédilection. Cette maison et le jardin qui l’entoure sont devenus pour lui un lieu, où la pierre s’exprime en histoire et où l’architecture raconte les récits de maçons porteurs d’un savoir-faire et d’une sagesse que le temps n’a pu user, revalorisés comme ils l’ont été par l’esprit aiguisé et l’âme noble de Lionel Gorra et de ses visiteurs et compagnons. Lionel a tout compris, en atterrissant dans cette maison. Il s’y est installé et a ouvert sa porte à tous ceux qui sont sensibles. Il y demeura en l’investissant de sa francophonie porteuse d’humanisme, d’art, de civisme et de sensibilité à la nature ainsi qu’à l’environnement. il s’y est investi effectivement lui-même, comme dans une mission, auprès des Libanais et des visiteurs étrangers. Cette maison est devenue ainsi un lieu d’accueil, où l’on se regroupait, dialoguait, pratiquait le théâtre, la musique ou autres activités artistiques, participait à des campagnes pour sauvegarder l’environnement etc., ou tout simplement assistait aux représentations, spectacles, conférences et autres. (*) Chercheur universitaire, professeur à l’Université Saint-Joseph.
Par Abdo EL-KAHI* Dans le prolongement des nombreuses activités organisées à l’occasion du Sommet de la francophonie, le club culturel La Pléïade et le club social et culturel d’Adonis organisent aujourd’hui, vendredi, à Zouk Mosbeh, une cérémonie en mémoire de trois grands penseurs et intellectuels francophones qui ont résidé à Zouk Mosbeh : l’écrivain Georges...