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Actualités - REPORTAGE

100 % de « oui » à la reconduction du mandat présidentiel Saddam Hussein plébiscité dans un « geste d’amour »

Bagdad - de Joanne Farchakh «Félicitations pour la présidentielle à cent pour cent. Abou Oudai, ceci est une preuve de notre amour ». Ce sont les paroles d’une chanson diffusée hier matin à la télévision irakienne, quelques minutes après la déclaration des résultats du vote. Pour les Irakiens, Izzat Ibrahim, vice-président irakien, a confirmé toutes leurs certitudes. Ils savaient que le président allait gagner les élections « à cent pour cent » des suffrages. Non pas parce qu’il y était le seul candidat, mais parce que le vote est « une preuve d’amour et de solidarité en ce temps de crise ». « Si nous avons élu Saddam Hussein, c’est pour montrer notre refus des interférences étrangères en notre politique interne. Nous voulons un président de notre sang, pas un gouverneur étranger. » Portant un vieille gallabié et la tête enroulée de son keffieh, c’est un vieil homme qui hurle ces mots au milieu de la route principale de Kerbala. Vite, très vite, les termes ont été repris par l’assemblée. Élevant leurs doigts en signe de victoire, ces derniers se sont mis à hurler des slogans à la gloire du président. « Saddam, nous t’aimons. Saddam, tu es notre père et la fierté des Arabes. » Toutefois, même en répétant ces mots, les Irakiens reconnaissent l’impact de leur choix. Maha, une enseignante dans une école secondaire, explique en ajustant son tchador qu’« en votant pour Saddam Hussein, nous décidons aussi de l’avenir de notre pays. Certes, ce dernier semble obscur et incertain, mais ce sont les Américains qui nous font la guerre. Ils veulent mettre la main sur notre pétrole, nous ne pouvons pas laisser faire sans au moins combattre. C’est une question de fierté et de loyauté envers notre pays et son président ». Selon les données officielles, onze millions quatre cent soixante mille personnes ont voté pour Saddam Hussein. Ils représentent l’ensemble des adultes du pays. Certains d’entre eux ont même signé les bulletins de vote avec leur sang, preuve ultime de leur amour. Il est logique de se demander si le nombre de buletins déposés dans les urnes a atteint ce chiffre. La réponse serait probablement affirmative, mais elle ne signifie pas pour autant que le vote a englobé toute la population. À l’école primaire de Kerbala, des électeurs n’ont pas hésité à mettre plusieurs bulletins dans l’urne dans le but d’être filmés ou photographiés. Et si la première photo n’est pas très réussie, ils referont le geste ! Et tous ceux qui n’étaient pas présents ont laissé à leurs familles, cousins ou voisins, toute la liberté du vote. Une allégeance à connotation religieuse Les résultats n’étaient pas choquants, mais l’allégeance était particulièrement singulière. Elle avait une connotation profondément religieuse et tribale. Lors de l’annonce des résultats, le vice-président, Izzat Ibrahim, a établi un parallèle entre ces élections et l’allégeance faite au prophète Mahomet par ses disciples à la veille du jihad. Pour lui, le peuple irakien a répété le geste « béni » de ses prédécesseurs. Et ceci est une preuve suffisante de la prochaine victoire. Puis il a repris des versets du Coran décrivant le rôle des « élus de Dieu » dans la protection des croyants. Cette allégeance religieuse est en fait le fruit d’une longue campagne pour le retour à la foi islamique qui a été lancée par le gouvernement irakien en 1996. Petit à petit, l’image de Saddam Hussein s’est étoffée. De président de la République, il est devenu « le sauveur de la nation » puis dirigeant des croyants. Certaines personnes voient en lui un « président à vie ». Ces termes ont été relevés dans les annotations portées sur le devoir d’une écolière de dix ans. Cette dernière a commis l’erreur de signaler que le président a été élu pour uniquement sept ans. Erreur qui lui a coûté une mauvaise note et une sévère réprimande de l’institutrice. Car en Irak, le doute est interdit. Et il est impératif de répéter le mot oui. « Oui, oui et mille oui à toi, Saddam notre chef bien-aimé » est le slogan de cette campagne électorale. Il a été chanté, hurlé, répété et écrit sur toutes les banderoles du pays. Ce slogan résume parfaitement l’histoire moderne de tout un peuple.
Bagdad - de Joanne Farchakh «Félicitations pour la présidentielle à cent pour cent. Abou Oudai, ceci est une preuve de notre amour ». Ce sont les paroles d’une chanson diffusée hier matin à la télévision irakienne, quelques minutes après la déclaration des résultats du vote. Pour les Irakiens, Izzat Ibrahim, vice-président irakien, a confirmé toutes leurs certitudes. Ils savaient...