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Actualités - REPORTAGE

Environnement - Des militants expriment leur inquiétude au sujet d’un projet de complexe balnéaire privé Journée de solidarité pour la protection de la plage populaire de Ramlet el-Baïda(photo)

La journée sportive et écologique, organisée hier sur la plage de Ramlet el-Baïda par le Rassemblement civil pour la protection du littoral (composé d’une vingtaine d’associations sociales et écologiques), a été placée sous le signe de la lutte pour la préservation de cette plage, la seule publique à Beyrouth. Salmane Abbas, coordinateur du projet, a exprimé l’inquiétude du groupe d’associations au sujet du projet de construction d’un complexe balnéaire privé de grande envergure sur cette plage. Et qui priverait, de ce fait, les habitants de Beyrouth de leur seul accès gratuit à la mer. La cérémonie d’ouverture de cette journée a été marquée par la présence d’un seul officiel, le député Atef Majdalani, représentant le chef du gouvernement, Rafic Hariri. Sur le sable, des pancartes reprenaient les principaux articles de loi sur la protection du littoral et revendiquaient le droit des habitants de Beyrouth à jouir d’une plage publique. Une de ces pancartes, portant un slogan demandant au conseil municipal de Beyrouth d’exproprier les terrains privés sur la plage, a servi de pétition signée par tous les participants. De petits panneaux de signalisation sur lesquels on peut lire « propriété privée » ont été alignés de manière à évoquer un cimetière. Le projet de centre balnéaire doté d’une marina qui suscite l’inquiétude des écologistes est toujours entouré du plus grand flou, ce qui n’a pas empêché M. Abbas de citer plusieurs faits qui, selon lui, se révèlent inquiétants. « C’est durant l’été 1998 que (l’association écologique) Green Line a obtenu une copie du projet devant conduire à la privatisation d’une grande partie de la plage, ne laissant qu’une faible superficie aux baigneurs », indique-t-il, montrant du doigt une photocopie du plan, accrochée à un tableau en bois. « En décembre dernier, l’escalier qui donnait accès à la plage ainsi que plusieurs autres installations, comme le siège du maître nageur par exemple, ont été détruits par les agents de l’ordre. D’où le fait, M. le député, que trois personnes ont dû vous aider à dévaler l’escalier de fortune pour que vous nous rejoigniez ici. » Le militant écologiste énumère ensuite les contacts effectués auprès des responsables pour remédier à la situation. « Le président du conseil municipal de Beyrouth, Abdel Menhem Ariss, nous a promis de restituer l’escalier dans les trois mois, déclare-t-il. Les trois mois sont écoulés depuis longtemps et rien n’a été fait. Nous n’avons pas non plus reçu de réponse aux messages que nous avons envoyés au mohafez. En juillet, nous avons contacté le député Akram Chehayeb, président de la commission parlementaire de l’Environnement, afin de le mettre au courant. Il nous a demandé de soulever nous-mêmes cette question auprès de la commission, ce que nous avons fait. Nous avons envoyé des lettres aux ministères de l’Environnement et du Tourisme, sans résultat. M. Chehayeb aurait dû parrainer cette journée, mais il s’est excusé au dernier moment. » M. Abbas poursuit : « Nous ne sommes pas hostiles à ce projet en particulier, mais à tout projet qui ferme l’accès de la plage aux citoyens. Beyrouth ne doit pas devenir la seule ville méditerranéenne sans plage publique. Nous demandons à la municipalité d’apposer une annotation d’expropriation sur les terrains dits privés sur le sable. À ceux qui nous disent qu’elle n’en a pas les moyens, nous répondons que cette mesure ne coûte rien. » Le député de Beyrouth prend ensuite la parole, affirmant qu’il est l’un de ceux qui ont contribué à nettoyer la plage. « Il se passait ici des activités louches la nuit, comme le trafic de drogue ou la prostitution, dit-il. On y trouvait le matin des seringues et autres objets pouvant compromettre la sécurité des baigneurs. Nous avons mis un terme à ces activités. » M. Majdalani affirme que « le Premier ministre ainsi que tous les députés de Beyrouth ont le souci permanent d’assurer aux habitants de la capitale une plage publique digne de ce nom ». Le député n’ayant pas abordé, dans son mot improvisé, la question du projet dont M. Abbas a dévoilé le schéma, il est interrogé sur ce point. « Je n’avais pas entendu parler de ce projet jusqu’à aujourd’hui, et c’est la première fois que je vois ce plan, répond-il. Il faudrait s’assurer des sources d’information qui sont à l’origine de ces nouvelles. Il y a beaucoup de rumeurs qui circulent, auxquelles on ne peut pas prêter crédit. » En réponse à une autre question, M. Majdalani déclare que « la réhabilitation de la plage sera terminée avant la saison prochaine », ajoutant qu’« une grande partie du sable sera disponible aux baigneurs », sans plus de précisions. Par ailleurs, le député s’est déclaré incapable de répondre à une question concernant l’augmentation du taux d’exploitation à Ramlet el-Baïda, qui est passé de 0,2 % à 2 ou 3 %, selon certaines sources. Le seul exutoire des Beyrouthins Quoi qu’il en soit, les participants à la journée sportive et écologique étaient hier au nombre de plusieurs dizaines, la plupart appartenant aux associations formant le Rassemblement comme Green Line, la Ligue des habitants de Beyrouth, l’Association Makhzoumi, le courant de Mgr Grégoire Haddad, et d’autres. Le président d’une association beyrouthine répondant au nom de « Al-Fajer al-Sadeq », Moustapha Bacha, affirme son attachement au caractère public de la plage de Ramlet el-Baïda. « Nous comptons lutter pour que ce site reste la propriété du peuple, dit-il. Je veux que mes enfants et leurs enfants puissent avoir un accès gratuit à cette plage, et non pas qu’elle devienne un privilège pour les riches. Cette plage est le seul exutoire des Beyrouthins. Comment peut-on les en priver ? » Ibrahim Kalache, secrétaire général de la Ligue des habitants de Beyrouth, ne comprend toujours pas comment, il y a trente ans, « des terrains sur le sable, depuis toujours propriété publique, ont été lotis et vendus à des particuliers ». « Nous avons soulevé le problème de la privatisation auprès des députés de Beyrouth, poursuit-il. Ils nous ont affirmé qu’ils travaillaient à faire réussir un troc entre un terrain de la municipalité, situé un peu plus haut, et les terrains qui devraient être consacrés au projet en question, dans le but de déplacer le centre balnéaire et de préserver la plage publique. » Également membre de la Ligue des habitants de Beyrouth, Sobhi Ma’az, du haut de ses 70 ans, raconte comment, à 7 ans déjà, ses parents lui demandaient de dresser une tente sur le sable et de jouer au cerf-volant, notamment le dernier mercredi d’avril, celui qu’on appelle le mercredi de Job. La légende veut que le prophète Job, malade, ait été guéri par l’eau de la plage de Ramlet el-Baïda. « Les festivités populaires en cette occasion ont repris dès la fin de la guerre », raconte Sobhi. « Si on interdit l’accès de cette plage aux Beyrouthins, c’est une partie de leur histoire qu’on aura occultée. » La journée écologique et sportive a comporté des activités comme le volley-ball, le mini-football, des parties de palette et de Frisbee, un concert, une session sur la musique de rue, une pièce de théâtre et une compétition de châteaux de sable. L’entrée à ce festival, financé par l’association Green Line, était gratuite. S.B.
La journée sportive et écologique, organisée hier sur la plage de Ramlet el-Baïda par le Rassemblement civil pour la protection du littoral (composé d’une vingtaine d’associations sociales et écologiques), a été placée sous le signe de la lutte pour la préservation de cette plage, la seule publique à Beyrouth. Salmane Abbas, coordinateur du projet, a exprimé...