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Actualités - REPORTAGE

UNIVERSITÉS - Un programme créé par un architecte-informaticien libanais aux États-Unis Simulation interactive : diplôme libano-américain d’informatique à l’Usek(photos)

Il n’y a pas si longtemps, l’informatique s’installait définitivement dans notre vie, et déjà, elle change de visage. Claude Comair, un architecte d’origine libanaise qui a fondé, aux États-Unis, la première université spécialisée en simulation interactive en temps réel, DigiPen, affirme que l’ordinateur a évolué d’un statut de « super calculateur » à celui d’un « simulateur » par excellence. Une évolution qu’il est impératif de reconnaître, selon lui, sous peine de se retrouver dépassé par la progression du secteur. Un programme académique de simulation en temps réel vient d’être créé à l’Université Saint-Esprit de Kaslik (Usek), grâce à une collaboration entre DigiPen et cet établissement libanais. Ce programme est ouvert aux étudiants à partir de la rentrée. La simulation en temps réel est la science informatique qui permet de visualiser des événements avant qu’ils ne se produisent, ou même bien après leur avènement. Il s’agit d’une expérience qui se déroule entièrement dans un environnement virtuel. « Ce n’est pas de la science informatique pure, ni des mathématiques, ni de la physique, explique M. Comair. C’est en fait un mélange des trois. Jusqu’à présent, ces trois sujets étaient traités par des spécialistes différents qui mettaient leurs efforts en commun. Or nous nous sommes rendus compte que les études de science informatique traditionnelle ne donnaient pas aux étudiants un bagage assez complet pour leur permettre d’utiliser toute la capacité de l’ordinateur. » Selon le spécialiste, l’informatique entre dans une ère nouvelle, dans laquelle l’ordinateur est considéré comme un outil de simulation par excellence. À titre d’exemple, un médecin peut simuler une opération chirurgicale avant de l’effectuer, pour évaluer ses chances de réussite. Même l’entrée de l’informatique dans le domaine de l’imprimerie peut être conçue comme un processus de simulation puisque, par le biais de l’ordinateur, on recrée tout un système qui nécessitait, dans le passé, une intervention manuelle à plusieurs étapes. M. Comair, ayant mesuré assez tôt l’ampleur de la transformation, a éprouvé la nécessité d’instituer un diplôme apte à former un personnel capable de soutenir les changements qui auront lieu inéluctablement d’ici à 5 ou 6 ans. D’où le succès de son université DigiPen aux États-Unis. « J’ai alors compris l’intérêt de transposer cette expérience au Liban, parce qu’il est vital pour la jeunesse libanaise d’être initiée très tôt à l’avenir de la profession, et de comprendre les besoins du marché », explique-t-il. La coopération avec l’Usek, qui est l’ancienne université de M. Comair mais qui a surtout été choisie pour des impératifs logistiques, a alors vu le jour. Pour la première fois au Moyen-Orient et à partir de la rentrée, deux doubles diplômes seront décernés conjointement par les deux institutions. Il s’agit, d’une part, d’une maîtrise en simulation interactive en temps réel, obtenue à l’issue de quatre années d’études, et, d’autre part, une licence en simulation interactive en temps réel, qui nécessite trois ans. Les cours seront donnés par des professeurs libanais et américains. Les diplômes sont reconnus aux États-Unis. Ils permettront aux jeunes de devenir non seulement de simples informaticiens, mais également des experts en fabrication de logiciel, puisqu’ils ne s’appuieront pas sur un matériel déjà existant. Cela suppose, selon M. Comair, une meilleure connaissance de l’ordinateur, même au niveau de son disque dur. Succès instantané aux États-Unis Le parcours universitaire et professionnel de M. Comair est tout sauf banal. Après le cycle secondaire, il a entamé des études de biologie à Lyon, en France, en vue de devenir médecin. Mais une rencontre avec un architecte français, Raoul Verney, qui est devenu un ami et un mentor, a totalement bouleversé sa vie, et l’a incité à suivre des cours d’architecture. Il intègre l’Usek dans cet objectif. Ce mordu d’informatique devait faire une seconde rencontre cruciale, celle d’un professeur japonais à l’Usek répondant au nom de Georges BanShoya, qui l’a poussé à concrétiser sa passion pour l’ordinateur. En 1979, il a créé son premier jeu, la « bataille navale ». Il a aussi conçu un nouveau langage informatique de simulation tridimensionnelle, le VU, avant de se rendre au Japon pour y terminer ses études. Il y a affiné son invention, qui ne manque pas alors d’attirer l’attention de la firme Nintendo. Celle-ci l’a embauché peu après aux États-Unis. C’est en 1991 qu’il a mis au point le plan de création d’un institut de technologie spécialisé en simulation, grâce à une collaboration entre l’entreprise DigiPen (qu’il avait déjà fondée) et Nintendo. L’institut est enregistré en 1994 au Canada, et reçoit une autorisation de Washington en 1996. Le succès est impressionnant. «Nous recevons 80000 demandes de candidature chaque année, mais nous n’en acceptons que 150, explique-t-il. Notre capacité d’absorption est limitée parce que les professeurs qualifiés dans cette spécialisation sont peu nombreux et difficiles à trouver. Mais nous avons lancé un programme DigiPen qui est aujourd’hui enseigné dans plusieurs écoles aux États-Unis. » L’idée de faire profiter le Liban de son expérience est venue naturellement à M. Comair, vu qu’il est de nationalité libanaise et diplômé de l’Usek. Mais ce ne sont pas les seules raisons qui l’ont poussé à implanter son programme dans son pays d’origine, où il a aussi ouvert une branche de l’entreprise DigiPen, qui emploie actuellement une quarantaine de personnes. « Le Liban fournit une main-d’œuvre très qualifiée et créative, souligne-t-il. Cette main-d’œuvre, si elle est proprement dirigée, pourrait créer des logiciels et des jeux adaptés, dans leur contenu, à la culture et au goût des peuples du Moyen-Orient, au lieu de se suffire de logiciels copiés de l’Ouest. Ce sont des services que notre pays pourrait fournir à la région. » De nouveaux services impliquent la création d’emplois. « Jusqu’à présent, nous avons surtout éduqué et diplômé des personnes qui n’avaient d’autre choix que d’émigrer, dit-il. Or nous pouvons encourager ces jeunes cerveaux à exercer leurs talents localement. Voilà pourquoi il est important que le Liban soit appelé à jouer un rôle innovateur par l’exportation d’un logiciel adapté. » Pour plus d’informations concernant les concours d’entrée et l’enregistrement, il faut contacter l’Usek ou la branche de DigiPen au Liban, en la personne de Samir Abou Samra, au 03/614633. Informatique et amusement vont de pair Claude Comair est aussi l’auteur d’un programme informatique appelé « Project Fun », conçu par lui aux États-Unis, en collaboration avec Nintendo, mais exécuté au Liban il y a deux ans par la branche de DigiPen sous le nom d’« Al Qalam al-Elektroni » (ou « Le crayon digital »). Ce programme donne la possibilité à ses utilisateurs de créer leurs propres logiciels, particulièrement des jeux. Il s’agit d’une manière intéressante d’initier les jeunes à la programmation et aux moyens de résoudre des problèmes de logique dans l’ordinateur. Ce programme a connu un vif succès dans le monde. « Pour la première fois au Liban, nous avons été les auteurs d’un produit vendu aux masses », souligne M. Comair. « C’est un succès dont il faut tirer les leçons », poursuit-il. Le programme peut être loué pour 30 dollars par an, avec toutes les versions disponibles. Sessions estivales d’initiation à l’informatique pour les élèves DigiPen s’est lancé dans la formation d’étudiants universitaires, sans pour autant négliger l’éducation scolaire. Chaque année, aux États-Unis, un programme d’été est prévu pour les élèves du cycle secondaire. Les candidats se rendent aux centres de DigiPen (basés dans différents États) pour y apprendre la programmation tout en s’amusant. Même si l’objectif évident du programme est de permettre aux adolescents de créer leur propre jeu, les apports effectifs sont multiples : des notions de mathématiques et de physique sont inculquées à l’élève de manière agréable, ce qui facilite l’assimilation. Ce programme a été instauré au Liban aussi, à partir de cet été. Une soixantaine d’élèves libanais ont assisté aux sessions durant dix jours, à raison de six heures quotidiennes. Cela fait 60 heures d’initiation à l’informatique sans efforts, puisque l’élève, à travers le jeu, devient mieux apte et plus disposé à apprendre. Suzanne BAAKLINI
Il n’y a pas si longtemps, l’informatique s’installait définitivement dans notre vie, et déjà, elle change de visage. Claude Comair, un architecte d’origine libanaise qui a fondé, aux États-Unis, la première université spécialisée en simulation interactive en temps réel, DigiPen, affirme que l’ordinateur a évolué d’un statut de « super calculateur » à celui d’un «...