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Actualités - OPINION

La pilule du lendemain

C’est bien triste. Encore une fois, les Libanais ont la preuve qu’ils ont applaudi trop tôt. Lorsque le président de la République a promis aux membres de Kornet Chehwane qu’il allait parrainer l’indispensable dialogue national, lorsqu’il a ainsi fait montre de sa détermination à se rapprocher des représentants politiques des (très) nombreux chrétiens de l’opposition, tous s’étaient félicités. Signal d’autant plus positif que personne, à l’exception de quelques pierrots lunaires, ne s’imaginait qu’Émile Lahoud allait remettre le moins du monde en question les relations libano-syriennes telles qu’elles se présentent depuis près de douze ans. Il n’empêche, tout a porté à croire que la volonté de créer une nouvelle dynamique politique entre loyalistes et opposition commençait de poindre. Des vœux ridicules, pieux, et bien illusoires. Il y a quelque chose de pourri au royaume du Liban. À peine née, à peine conçue, cette volonté-là a été trucidée. Avortée. Et avec elle, le peu d’espoirs qu’avaient gardé les Libanais – eux n’ont pas oublié qu’il n’y a que le politique qui puisse sauver l’économique. Si personne ne doute que ces espoirs, sans le président Lahoud, n’auraient jamais pu exister, personne non plus n’ignore désormais que sans lui, cet avortement n’aurait certainement pas pu avoir lieu. Sans lui, la décision de museler sine die la MTV n’aurait jamais pu être appliquée. Les faiseurs d’anges s’appellent, notamment, Michel Murr et Élias Murr (l’actuel ministre de l’Intérieur, qui ne semble avoir aucun scrupule à voir les hommes dont il est le patron, les FSI, se comporter comme de véritables brutes). Les Libanais peuvent leur dire « mabrouk ». Il est clair, d’abord, que Michel et Élias Murr semblent incapables de supporter ne serait-ce qu’un instant que le chef de l’État (le beau-père du second) puisse se rapprocher des chrétiens de l’opposition. D’ailleurs, ce concept de bons et de mauvais (hommes politiques) chrétiens est actuellement très à la mode : Rafic Hariri, lui aussi, s’enorgueillit d’avoir « ses » chrétiens. Ces manœuvres petitement politiciennes, ces corridas avec mises à mort entre loyalistes et opposants peuvent sans doute paraître sinon de bonne guerre du moins universellement usuelles. Mais que le clan de l’ancien « superministre abadaye » n’ait aucun scrupule à suicider, encore une fois, tout un pays pour régler, solder, leurs comptes avec leur frère et oncle, et qu’ils en convainquent le n° 1 de l’État, voilà qui est inouï. Un président de la République – en l’occurence Émile Lahoud – sait que ses concitoyens n’attendent qu’un geste de lui. Attendent et espèrent de lui d’être non seulement le parrain du dialogue national, mais l’ultime défenseur de la souveraineté, de l’indépendance, de la démocratie, des libertés publiques, de l’égalité devant la loi. Plus encore, l’accoucheur d’une véritable coexistence entre l’ensemble des Libanais. Sauf que le président Lahoud semble avoir oublié que si tout homme d’État – aussi honnête ou intelligent fût-il – rate monumentalement son mandat, ou le réussit brillament, c’est bien à cause (ou grâce à) ses « conseillers ». Maintenant que l’ego surdimensionné de Michel Murr et de sa famille a été satisfait – mais dans quel pays vivons-nous... –, Émile Lahoud se doit de se souvenir qu’il est le seul à même de redresser le pays, d’en redorer l’image. De se souvenir et de le faire : en accélérant au plus vite la réouverture de la MTV. Et en changeant de conseillers. Pour ressusciter le dialogue. Ziyad MAKHOUL
C’est bien triste. Encore une fois, les Libanais ont la preuve qu’ils ont applaudi trop tôt. Lorsque le président de la République a promis aux membres de Kornet Chehwane qu’il allait parrainer l’indispensable dialogue national, lorsqu’il a ainsi fait montre de sa détermination à se rapprocher des représentants politiques des (très) nombreux chrétiens de...