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Actualités - OPINION

Beyrouth appréhende un automne régional orageux

Est-ce actuellement le calme (d’ailleurs relatif) qui précède la tempête ? À Beyrouth, comme dans le reste du monde arabe, on s’alarme des menaces US visant l’Irak. Et des sources diplomatiques craignent que le volcan n’entre en éruption au prochain automne. Pour baver sa lave en fusion, à partir de la Mésopotamie, sur tout le Moyen-Orient. Le danger est certain, mais peut-être pas si proche : les Américains eux-mêmes indiquent que le nettoyage n’est pas pour bientôt. Sans compter qu’au sein de l’Administration Bush, ils restent divisés sur l’opportunité d’une attaque, comme sur les moyens à mettre éventuellement en œuvre. Il n’en reste pas moins que George Bush, et c’est tout ce qui compte, est catégorique : il n’aura de cesse que de se débarrasser de Saddam Hussein. Comme disait Caton, l’ennemi est aux portes. L’ennemi étant en l’occurrence la guerre par elle-même. Aussi, commentent à Beyrouth ces sources diplomatiques, il est tout à fait urgent que les Arabes se serrent les coudes. Pour tenter de prévenir l’explosion. Et si elle devait quand même se produire, pour en amortir le choc et les retombées, autant que faire se peut. Une solidarité de prévention et de protection collective s’impose donc. Pour l’heure, ajoutent ces sources, il faut contrer les machinations combinées des USA et d’Israël visant à annihiler toute force de résistance chez les Arabes, sous le prétexte de combattre le terrorisme. Cela, soit pour imposer aux Arabes, Palestiniens en tête, une paix de capitulation ; soit pour remodeler la carte de la région à leur guise. Sur le plan local, comme le soulignent Walid Joumblatt et d’autres pôles, la phase présente est si périlleuse qu’il est indispensable de mettre de côté tout sujet de querelle entre Libanais, pour mieux parer à toute éventualité. L’entente doit dès lors être générale et ne pas se limiter au niveau des présidents. Le pays ne peut pas se payer le luxe de tiraillements politiciens ou confessionnels. Dans cette logique même, estiment des professionnels de la politique, l’État a pour devoir de rassembler. Il doit donc initier un dialogue positif entre tous. Afin de conforter la stabilité intérieure, sécuritaire autant que politique. Sans quoi, comme le relève Abdel-Halim Khaddam, le pouvoir resterait accusé de faillir à ses obligations. Dans cette optique, poursuivent ces mêmes sources, il serait inopportun de débattre de la présence militaire syrienne ou même des camps palestiniens et de l’arsenal dont ils disposent. Il faut maximaliser la coopération avec la Syrie, au nom du sort commun. En comblant toutes les brèches, notamment par une meilleure coordination sécuritaire avec les directoires des camps de réfugiés. Afin de court-circuiter les provocations des fauteurs de troubles qui servent les desseins d’Israël. Des effets dévastateurs Le tableau ainsi complété, les diplomates précédemment cités pensent qu’une action américaine contre l’Irak pourrait produire les résultats suivants : – Consécration du fait accompli de l’implantation des Palestiniens au Liban, en tout ou en partie. Parallèlement, Israël mettrait à profit les frappes US pour effectuer une opération de transfert des Palestiniens des Territoires en direction de la Jordanie et d’autres pays. – Partition de l’Irak, si Washington n’arrive pas à trouver un substitut valable au régime de Saddam Hussein. Le démembrement prendrait la forme d’une fédération ou d’une confédération pour limiter les protestations. Cette formule serait élargie à nombre d’autres États islamiques, comme le Soudan ou l’Afghanistan, pour rogner les ailes de l’extrémisme fondamentaliste. – Grave récession économique mondiale, au niveau principalement du secteur des placements financiers comme des investissements, et brutale hausse des prix du pétrole. – Mise en place d’un nouveau Moyen–Orient, stabilisé par sa dislocation, au profit des intérêts stratégiques et pétroliers des États-Unis. Les foyers dits de terrorisme seraient éteints, un sévère contrôle institué partout sur les activités des organisations fondamentalistes comme sur les programmes pédagogiques. La pax americana se substituerait aux accords Sykes-Picot. Cela étant, certains pays arabes sont paradoxalement réservés à l’égard des intentions US parce qu’ils craignent qu’encore une fois Washington n’aille pas jusqu’au bout. Il entamerait son attaque puis se retirerait de l’Irak. Les Européens aussi freinent des quatre fers. Ils rejettent l’amalgame entre la possession par l’Irak d’armes de destruction massive et le terrorisme. Et préfèrent récupérer le régime irakien. Mais le président Bush se fait visiblement un point d’honneur de compléter ce que son père avait laissé inachevé. Et de balayer Saddam. Il faut cependant se soucier des suites. À ce propos, des sources diplomatiques américaines indiquent que des efforts sont déployés en direction de l’Irak, de la Turquie et de l’Arabie saoudite. Pour leur assurer que, pas plus que l’Afghanistan, l’Irak ne sera disloqué ni, a fortiori, la région. Mais jusqu’à présent, la campagne de persuasion US ne donne rien. Tout le monde ou presque redoute les conséquences générales, ou intérieures, d’une guerre de l’Euphrate. C’est pourquoi, concluent ces sources, le salut des Libanais passe plus que jamais par leur union, sous la houlette du pouvoir. Et en étroite coordination avec la Syrie sœur. Émile KHOURY
Est-ce actuellement le calme (d’ailleurs relatif) qui précède la tempête ? À Beyrouth, comme dans le reste du monde arabe, on s’alarme des menaces US visant l’Irak. Et des sources diplomatiques craignent que le volcan n’entre en éruption au prochain automne. Pour baver sa lave en fusion, à partir de la Mésopotamie, sur tout le Moyen-Orient. Le danger est certain, mais...