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Actualités - OPINION

SÉMINAIRE - Comment élever les émigrés à un niveau humainement universel Diaspora libanaise : rivalités internes ou Liban message ?

Le séminaire international que vient d’organiser à l’Université de Sydney (Australie) le Rassemblement libano-australien uni, en coopération avec le Centre des relations internationales à l’Université de Sydney, sur le thème « Comprendre le Liban d’aujourd’hui : politique, culture et société » constitue un modèle de ce qui est attendu de la diaspora libanaise pour la promotion d’une vision globale et prospective du Liban, de ses besoins et priorités. Le Liban, encore otage d’un conflit régional, demeure en effet un exemple d’unité dans la diversité dans un monde globalisé, mais ravagé par des conflits identitaires et des intégrismes. Durant les années de guerre, il y eut une prolifération de conférences et rencontres hors du Liban pour défendre la cause du petit pays. Aujourd’hui, à un moment où la reconstruction du Liban est fort incomplète dans ses dimensions humaines, sociales et, surtout, démocratiques, et quant au rôle arabe pionnier du pays, il est fondamental que la diaspora libanaise s’occupe du Liban, autrement que par la reproduction à l’étranger de rivalités partisanes et de querelles de milices et de clans. L’inauguration des travaux du séminaire par la prestigieuse Gouvernor de Sydney, Mary Bashir, originaire du Liban, et sa réception des organisateurs et des participants venus du Liban, dans le superbe palais du gouvernorat, témoignent de l’intérêt que peut susciter le Liban au plus haut niveau auprès des instances officielles et des élites libanaises soucieuses de l’avenir. L’initiative du séminaire revient au jeune Dr Charlie Moussa, neurologue, chercheur en chimio-neurologie et diplômé en sciences politiques, secondé par une équipe fort dynamique. Les communications présentées portent sur l’évolution du système consensuel libanais et ses défis (Antoine Messarra), la situation régionale du Liban (Walid Moubarak), la condition féminine et la reconstitution du tissu social libanais (Mona Khalaf), la perception de l’histoire et la construction de la mémoire collective (Ahmad Beydoun), la sociographie de la diaspora libanaise en Australie (Charlie Moussa) et l’identification nationale et communautaire avant et après la guerre et son impact sur la diaspora (Michael Humphrey). Le Liban qu’on a « quitté » Nous côtoyons aujourd’hui dans plusieurs pays, en France, au Brésil, en Australie et ailleurs, des émigrés libanais de la nouvelle génération et de l’ancienne qui transportent avec eux et reproduisent rivalités, zizanies, querelles partisanes, familiales et communautaires dans des pays d’accueil, ce qui incommode fortement l’élite libanaise porteuse d’une autre image du Liban. Des politiciens à courte vue, en tournées et visites dans des pays d’accueil, recherchent aussi la mobilisation des émigrés dans des enjeux qui, justement, sont à l’origine de l’extension du phénomène de l’émigration des jeunes Libanais. Il en est qui, en perte de légitimité à l’intérieur du Liban, vont chercher ailleurs un soutien au moyen d’une mobilisation confessionnelle. La diaspora libanaise, celle qui croit encore dans la reconstruction du Liban pluraliste et le rôle de ce pays pour une nouvelle renaissance arabe, souffre de cette tendance, se retire, dénie son appartenance à un Liban qu’elle a « quitté », mosaïque de partis rivaux, de zizanies et de querelles de clans. Cette diaspora est assoiffée d’espace public, créateur d’identité citoyenne et agent de développement. On se plaint aussi des émissions libanaises par satellites qui transmettent à des millions de téléspectateurs hors du Liban des monologues, pourtant à plusieurs voix, alors qu’il s’agit de transmettre par satellites des programmes sur le Liban profond, la société libanaise, la culture, le Festival de Baalbeck... Débat transidentitaire Les débats au séminaire de Sydney portent, entre autres, sur une perspective transidentitaire, fort pragmatique pour les Libanais résidents comme pour les émigrés. Nous sommes, nous Libanais, par expérience, las et fatigués des problèmes scientistes sur les identités, les affirmations et les conflits identitaires. Approche judicieuse certes, mais souvent loin du vécu quotidien. Dans toute interaction identitaire, il se produit – qu’on le veuille ou pas – une recréation d’autre chose, qui n’est ni tout à fait l’ego ni tout à fait l’autre. En chaque Libanais, isolationniste ou progressiste suivant la terminologie d’autrefois, il y a culturellement un maronite, sunnite, chiite, druze, grec-orthodoxe... La libanité est synthèse. Tel est aussi le cas d’Australiens d’origine libanaise, appelés à produire une synthèse créatrice qui n’est ni tout à fait australienne ni tout à fait libanaise. Appréhender le problème identitaire sous cet aspect, vécu et pragmatique, est fort enrichissant. On donne l’exemple du croissant au thym, au petit déjeuner, qui n’est ni le croissant au beurre à l’occidentale ni la «manqûshî» libanaise, mais un produit de synthèse, transidentitaire et respectueux des particularismes. Ou l’exemple du « Serwal » de Yves Saint Laurent, qui n’est ni la robe longue à l’occidentale ni le « cherwal » arabe. « Comprendre le Liban d’aujourd’hui : politique, société et culture » fut un séminaire de rassemblement à l’Université de Sydney, fondateur d’un autre type d’action auprès de la diaspora libanaise : ne mobilisons pas les émigrés avec nos conflits intérieurs, mais élevons-nous à un niveau libanais international et humainement universel. Le synode du Vatican pour le Liban, en novembre 1995, en avait donné l’exemple. Une telle perspective n’est pas incompatible avec la réclamation véhémente de l’indépendance et de la souveraineté. Au contraire, elle fonde l’indépendance et la justifie et explique la «raison d’être» du Liban, « petit pays, si important », selon Metternich. Antoine MESSARRA
Le séminaire international que vient d’organiser à l’Université de Sydney (Australie) le Rassemblement libano-australien uni, en coopération avec le Centre des relations internationales à l’Université de Sydney, sur le thème « Comprendre le Liban d’aujourd’hui : politique, culture et société » constitue un modèle de ce qui est attendu de la diaspora libanaise pour la...