Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Opinion Les rafles du 7 août : des violations en cascade des droits de l’homme

Nous recevons du Dr Élie Abouaoun, membre du comité directeur (Paris) de l’association Nouveaux droits de l’homme – International et chargé de mission au Liban, l’opinion suivante dont nous publions des extraits : « Les rafles du 7 août 2001 resteront gravées dans la mémoire de beaucoup de citoyens libanais comme un exemple frappant de la violation par le Liban de ses engagements internationaux. Le Liban a contribué, par l’intermédiaire de feu Charles Malek, à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il ne reste de cette contribution que les archives des Nations unies et les souvenirs cités par les contemporains de Charles Malek. La société libanaise, à quelques exceptions près, a décidé d’oublier Charles Malek, de piétiner ses idées et d’adopter un tout autre système de valeurs, basé soit sur la servitude, soit sur le pouvoir de la force, soit sur les deux à la fois. « L’opposition à la politique du gouvernement », « l’exercice d’une pression publique sur le gouvernement », « l’incitation à manifester », « l’utilisation des écrits et des publications non autorisés par le gouvernement » : telles sont quelques-unes des accusations portées contre les personnes arrêtées en août 2001. Pourtant, la Déclaration universelle des droits de l’homme, votée par le Liban, stipule dans son article 19 que « tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression ». Dans un régime démocratique, les actes dont ont été accusées ces personnes ne peuvent entraîner une action en justice puisqu’ils font partie des droits de toute personne et des composantes essentielles de la vie démocratique. Les restrictions imposées aux réunions et manifestations pacifiques doivent émaner exclusivement de la loi et non de décisions arbitraires. Pour ce qui a trait aux événements d’août 2001, ni les autorités militaires ni les autorités judiciaires n’ont été en mesure d’affirmer que les manifestants avaient des armes ou pouvaient menacer l’ordre public. Toutes les mesures répressives prises à l’encontre des manifestants ont, par conséquent, été arbitraires. Des arrestations illégales En ce qui concerne les circonstances des arrestations et des conditions de détention, force est de relever que la majorité des arrestations du 7 août 2001 (et des jours suivants) était illégale. L’armée libanaise ne fait pas partie de la « police judiciaire » en charge des arrestations, selon la loi libanaise. De plus, ces arrestations n’ont pas eu lieu sur base de mandats d’arrêt (comme le stipule la loi), mais d’une manière arbitraire et massive, en contradiction avec l’article 9 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui interdit l’arrestation arbitraire. Quant aux conditions de détention, aucun cas de torture grave n’a été signalé, mais les autorités ont procédé à des traitements dégradants et humiliants. Elles ont eu recours à de « légères pressions physiques » (pour reprendre le terme utilisé par les autorités elles-mêmes) afin d’extorquer des aveux. Ces traitements et les « légères pressions physiques » sont considérés comme des actes de torture par la « convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » (que le Liban a signée et ratifiée). En effet, dans son article premier, la convention définit le terme « torture » comme étant « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux ». Dans l’alinéa 2 de l’article 2, il est précisé que « aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture ». Et l’article 3 d’affirmer que « l’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture. » Au niveau de l’équité des procès La capacité du tribunal militaire à assurer un procès équitable est hypothétique. Les membres (militaires) de ce tribunal sont soumis aux ordres de leurs supérieurs hiérarchiques, qui, eux, ne font pas partie du corps judiciaire. Il y a donc enchevêtrement entre le pouvoir judiciaire et le commandement armé. Quelles que soient les compétences des juges, un même tribunal qui examine entre 60 et 90 cas par jour ne peut être équitable. Ce n’est pas l’intégrité personnelle des juges qui est en cause, mais plutôt la capacité de ces juges à être indépendants et équitables. Conformément aux normes internationales de la justice équitable, l’existence d’un tribunal militaire, avec des prérogatives de juger des civils, n’est pas justifiée dans un régime démocratique. Le principe de l’égalité de tous devant la loi, consacré par la Déclaration universelle des droits de l’homme (article 7) et le pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 14), a été bafoué lors des événements d’août 2001. Ainsi des fonctionnaires publics, qui ont été pris en flagrant délit en train de tabasser des civils non armés, n’ont pas été jugés conformément aux engagements internationaux du Liban. Même si ces personnes ont été punies (suivant une procédure interne et propre aux forces armées), il n’en demeure pas moins qu’elles doivent être jugées par un tribunal indépendant et en vertu de principe de l’égalité de tous devant la loi. Les autorités ont avoué les multiples infractions et « erreurs » lors des événements d’août 2001. Dans ce cas, comment faire pour assurer aux victimes de ces infractions et erreurs leur droit à la réparation, conformément à l’article 9 du pacte international relatif aux droits civils et politiques qui stipule que « tout individu victime d’arrestation ou de détention illégale a droit à la réparation » ? Nous espérons obtenir non seulement une réponse à une telle interrogation, mais surtout des actions qui garantissent une séparation totale des pouvoirs, le renforcement de l’application des lois et le respect des instruments internationaux des droits de l’homme. La société civile a le devoir d’agir et de « provoquer » ces actions. »
Nous recevons du Dr Élie Abouaoun, membre du comité directeur (Paris) de l’association Nouveaux droits de l’homme – International et chargé de mission au Liban, l’opinion suivante dont nous publions des extraits : « Les rafles du 7 août 2001 resteront gravées dans la mémoire de beaucoup de citoyens libanais comme un exemple frappant de la violation par le Liban de ses...