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Actualités - CHRONOLOGIE

PLACE DE L’ÉTOILE - Les minibus au mazout, les enseignants et l’incident de Saïda : les trois sujets-stars des seize interventions parlementaires Gabriel Murr réclame une loi sur l’amnistie générale (photo)

La question n’était pas de savoir sur quoi les députés allaient gloser hier. Il était clair que l’on allait évoquer, pêle-mêle et avec plus ou moins de fougue (voir L’Orient-Le Jour du mardi 16 juillet), l’incident de Saïda, les chauffeurs des minibus roulant au mazout, les carrières de pierre et de sable, ou les enseignants du secondaire qui boycottent la correction des copies officielles pour cause de revendications ignorées. La question du jour était plus anecdotique. Où est-ce que Gabriel Murr allait s’asseoir ? Allait-il déloger Boutros Harb ou Georges Kassarji pour se mettre aux côtés de son parrain, Nassib Lahoud, à l’extrême gauche de l’hémicycle ? Allait-il choisir les travées à l’extrême droite, là ou s’asseoit d’habitude Pierre Gemayel, le fils de son autre parrain ? Le tout nouveau député du Metn, dont c’était hier la première présence en séance plénière, a tranché. Arrivé place de l’Étoile avec ses nouveaux collègues Mansour el-Bone et Farès Souhaid, il est monté tout au haut, à droite, s’installer près de ce dernier. Tout en muscles Plus sérieusement, c’était le discours de Gabriel Murr que l’on attendait hier. Le successeur d’Albert Moukheiber, pour son baptême, tout en muscles, dans l’hémicycle, a choisi de privilégier la politique générale. Et de commencer par évoquer les trois bases essentielles qui font l’État : « La politique, la sécurité, et l’économie. Et ce sont les deux premières qui permettent à la troisième de fonctionner. » Gabriel Murr remercie le Premier ministre pour tous les efforts qu’il fournit pour que l’économie soit relancée, qu’elle s’envole. Mais il insiste : « Tant que la politique et la sécurité ne sont pas complémentaires sur tout le territoire libanais, et pour tous les citoyens, l’économie ne fonctionnera pas », prévient-il. « Ne me dites pas qu’elle se marginalise toute seule. » Gabriel Murr anticipe les réactions. Il parle, bien évidemment, de « cette partie des Libanais, qui a tendu plusieurs fois la main (à l’État) – ne serait-ce qu’au cours de la dernière partielle du Metn, en cessant son boycottage de la chose publique – et qui n’attend qu’une chose : un appel au dialogue national, qui serait adressé à tous les Libanais. Si tous les Libanais ne participent pas à l’entente nationale, celle-ci n’existera jamais », a martelé le député élu. Idem, poursuit-il, si la sécurité n’est pas assurée sur l’ensemble du territoire. Comprendre par là, et il l’a clairement dit, que Gabriel Murr souhaite que l’armée se déploie dans tout le pays, et sans exception. « Et cette hérésie que l’on nous a pondue : que l’armée ne va pas se déployer au Liban-Sud pour ne pas protéger les frontières d’Israël... », accuse-t-il. Il raconte les images vues la veille sur son écran de télévision : les armes, en veux-tu, en voilà, dans le camp palestinien de Miyé Miyé. La question de Gabriel Murr est simple : pourquoi tous ces gens sont encore armés ? « Pourquoi les Syriens sont encore armés, les Palestiniens, certaines factions libanaises ? » demande-t-il. Son équation, aussi, est simple : tant que ce n’est pas l’armée qui possède, seule, les armes, le pouvoir de l’État sera tronqué. Ou n’existera pas. Enfin, en ce qui concerne les accusations de vol lancées à l’encontre de Michel Aoun, Gabriel Murr pose une autre question : « S’il a volé, pourquoi ne l’a-t-on pas jugé ? Et s’il n’a pas volé, pourquoi le dossier n’est-il pas clos ? » Et évoquant le retour de l’ancien Premier ministre en exil, ainsi que la libération de Samir Geaga, « en prison depuis huit ans », le député du Metn conclut : « Il est grand temps. Il est grand temps d’oublier tout le passé. De voter une loi d’amnistie générale, pour tous, un article unique et global », indivisible et indiscutable. « Nous devons tourner cette page pour arriver à réaliser une véritable entente nationale, pour pouvoir aider Rafic Hariri à mettre sur pied Paris II, les privatisations, etc. Parce que sans entente nationale, il n’y aura rien de tout cela », affirme Gabriel Murr. Les donneurs de leçons La séance avait débuté un peu après 10h30, avec l’incontournable Hussein Husseini qui déclare tout de go qu’il était « du devoir » de la Chambre, au nom de sa crédibilité, de former une commission parlementaire qui jetterait toute la lumière sur celles et ceux « qui ont détourné les fonds publics ». Il se base sur le discours de Nabih Berry (qu’il prend à témoin), le 7 juillet, qui avait affirmé que « nul ne saurait dégager sa responsabilité » de l’état où en sont arrivées, aujourd’hui, les finances publiques. L’ancien n° 2 de l’État évoque ensuite « tout ce débat » qui a été fait autour du cellulaire, ainsi que le rapport de la Cour des comptes, qui fait état d’argent public perdu ou gaspillé. Autre exemple « d’atteinte à l’argent public » : la loi interdisant la circulation des voitures et des minibus au mazout, « votée sans que l’on prépare la moindre indemnisation. Et aujourd’hui, des dizaines de milliers de citoyens ont peur pour l’avenir de leurs enfants ». Les deux sujets-stars de la séance : les revendications des chauffeurs de minibus au mazout et les enseignants en grève. Et, évidemment, l’incident de Saïda – l’assassinat des trois militaires de l’armée. Un incident souvent comparé au meurtre des quatre juges en 1999. Notamment par Ali el-Khalil, qui a déclaré que l’atteinte portée aux institutions militaire et judiciaire ne met pas en péril « uniquement la paix civile, mais les fondements sur lesquels repose la nation ». Et en ce qui concerne le problème des enseignants, il s’interroge sur l’éventuelle existence d’un scénario dont le but serait de « gagner du temps et de noyer les demandes ». Quant à Nicolas Fattouche, après s’en être pris à « ces investisseurs qui viennent (au Liban) nous donner des leçons de vie ou de morale » (il évoquait évidemment, sans le nommer, al-Walid ben Talal), et après avoir souligné que l’investisseur libanais « payait les pots cassés pour la politique du gouvernement », il a posé une question, souvent remise sur le tapis par ses collègues : « Pourquoi le gouvernement a-t-il voté une loi (autorisant la circulation des vans au mazout), pour venir aujourd’hui jeter leurs propriétaires à la rue ? » Élie Aoun a été le quatrième des seize députés à intervenir. Après s’être arrêté sur la situation régionale, sur l’incident de Saïda – estimant que, comme toutes les liquidations qui l’ont précédé, ce n’était pas « un incident isolé » –, il a évoqué le dernier congrès maronite de Los Angeles. Pour dire que toutes les conséquences qui ont suivi la publication du communiqué final n’ont pas à être assumées par une seule partie : « L’État assume sa part fondamentale de responsabilités, après que sa politique eut contribué à créer le terreau idéal, qui se nourrit d’une réalité politique, sociale et économique dégénérescente », assure-t-il. Affirmant que cela ne devrait pas faire avorter les chances du dialogue, et que l’État se doit de poursuivre la réconciliation nationale, et à rectifier le déséquilibre dont souffre le quotidien politique. Après Élie Aoun, c’était au tour de Gebrane Tok, qui a indiqué que la condamnation de l’incident de Saïda « ne suffit plus », avant d’évoquer le congrès de L.A., souhaitant que les sujets à polémique soient traités sur le sol libanais, « calmement ». « Par-dessus la jambe » Sa collègue de Zghorta, Nayla Moawad, a pris ensuite la parole. Démarrant avec un sujet qui lui est cher : l’éducation. « Expliquez-moi ce qui nous restera si l’on traite la santé ou l’éducation des citoyens par-dessus la jambe ? » s’est-elle demandé. Notamment à l’adresse du ministre concerné, Abdel-Rahim Mrad. Lui reprochant d’autoriser les candidats qui n’ont suivi aucun cursus à présenter les examens du baccalauréat (s’ils ont 21 ans révolus) ou du brevet (s’ils ont plus de 18 ans). « Je ne suis pas du tout contre le fait que l’on permette aux gens qui n’ont pas fait d’études de passer des examens, mais on ne peut pas les traiter de la même façon que ceux qui ont poursuivi des études pendant au moins quatorze ans », s’insurge-t-elle. Et de condamner la triche en salles d’examen. Avant d’exhorter le gouvernement à trouver une solution aux chauffeurs de minibus à mazout. « Je suis contre le mazout, mais ces citoyens-là ont des droits. Et nous les avons spoliés », dit-elle, appelant l’État à continuer à enquêter sur la mort des quatre juges à Saïda. Pour son collègue de Batroun, Boutros Harb, quand l’État veut, il peut. Il faisait évidemment allusion à l’incident de Saïda, et à la livraison du meurtrier présumé à l’armée. « Si le pouvoir avait fait montre de la même détermination dans le dossier des quatre juges, je parie que Abou Obeida n’aurait pas tué les trois militaires. Et quand je pense que c’est un repris de justice qui a livré un repris de justice », a-t-il ironisé. Rappelant qu’il soutenait la résistance des Palestiniens jusqu’à ce qu’ils récupèrent leur terre, Boutros Harb a néanmoins insisté sur le fait que « la question essentielle désormais est la suivante : comment l’État va-t-il faire pour en même temps offrir aux camps palestiniens tout son soutien pour résister et éviter qu’ils ne se transforment en îlots de sécurité – chose que refusent catégoriquement tous les Libanais ? L’État doit assumer ses responsabilités et faire en sorte qu’il n’y ait aucun dérapage qui justifierait toutes les accusations auxquelles nous essayons de faire face », a-t-il indiqué. Faisant allusion aux discours du sénateur US Bob Graham, selon lesquels le Liban est « un centre de production du terrorisme et de la violence ». Au sujet des enseignants, Boutros Harb a appelé le gouvernement à adopter la position du ministre de tutelle, Abdel-Rahim Mrad. Et en ce qui concerne les minibus au mazout, il a reconnu que le Parlement, en votant la loi sur le mazout, « a commis un crime involontaire contre ceux qui ont cru en la loi. Je propose – et il n’est pas honteux de reconnaître ses erreurs – que l’on prolonge le délai d’un an, afin de permettre aux chauffeurs de ces vans de trouver des substituts », a-t-il déclaré. Nabih Berry : « La solution, ce n’est pas le retour au mazout. Personne n’est plus attaché que moi au versement d’indemnités aux chauffeurs », a-t-il assuré, rejetant l’idée de prolongation du délai d’interdiction de rouler au mazout. Omar Karamé, l’interrompant : « Permettez-nous de débattre. » Berry : « Mais je parle. Et je dis que même s’il faut payer des indemnités dans leur totalité, faisons-le. Mais pas de retour au mazout. » Fouad Siniora manque de s’étrangler. Omar Karamé, pour une fois, le soulage : « Les chauffeurs sont opprimés à 100 %. Mais les indemnités totales grèveront le Trésor. La solution est de faire comme dans les pays européens, les pays civilisés : c’est à l’État d’importer du mazout propre, le golden fuel. Ce serait bien moins cher que de remplacer les moteurs », a insisté l’ancien Premier ministre. Et après que Mohammed Kabbara eut ensuite évoqué le problème des ordures ménagères au Liban-Nord, Hussein Hajj Hassan est revenu sur le dossier du mazout, mettant en exergue les nombreuses failles de la loi votée, et dont ont à souffrir les propriétaires des vans. Se demandant pourquoi les bus des transports en commun de l’État continuaient, eux, à circuler au mazout. Un sujet – les transports en commun –, ainsi que les poids lourds, repris par le Monsieur Environnement de l’hémicycle, le député de Aley, Akram Chehayeb. Qui devraient, selon lui, ne pas circuler intra-muros dans les villes principales du pays. « En vue de remplacer leurs moteurs à mazout par des moteurs à essence », a-t-il indiqué. Avant d’évoquer les carrières, souhaitant que la nouvelle loi, qui stipule que les permis d’exploitation doivent être accordés par le Conseil des ministres, pave la voie à la disparition du Conseil national des carrières. Mohammed Yéhia, Mohammed Kabbani, Massoud Houjeyri et Ammar Moussawi, ont pris, enfin, la parole. Ziyad MAKHOUL
La question n’était pas de savoir sur quoi les députés allaient gloser hier. Il était clair que l’on allait évoquer, pêle-mêle et avec plus ou moins de fougue (voir L’Orient-Le Jour du mardi 16 juillet), l’incident de Saïda, les chauffeurs des minibus roulant au mazout, les carrières de pierre et de sable, ou les enseignants du secondaire qui boycottent la correction...