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Actualités - CHRONOLOGIE

Environnement - L’accent est mis sur la réhabilitation des sites Le décret sur les carrières ce soir en Conseil des ministres

Après le mazout, le dossier des carrières (de sable et de pierres) semble être aujourd’hui au cœur d’un consensus politique national, au niveau des dirigeants. Lancé par le chef du Parlement, Nabih Berry, il y a quelques jours, le sujet fait l’objet d’un décret qui sera discuté aujourd’hui en Conseil des ministres. Le texte a été élaboré par une commission ministérielle, présidée par le vice-Premier ministre, Issam Farès. Cette commission a cependant tardé à s’acquitter de cette tâche qui lui avait été confiée dès le 18 octobre 2001, et qui aurait dû avoir été accomplie trois mois après cette date. Mais il semble que l’intérêt qu’on porte soudain à ce dossier épineux soit lié à une volonté politique nouvelle, indépendamment des délais non respectés. Les autorités iront-elles cette fois jusqu’au bout pour mettre un terme au chaos qui caractérise ce secteur ? En effet, il n’est pas exagéré, en matière d’exploitation de carrières, de parler de chaos. Non seulement nombre d’entre elles fonctionnent illégalement, mais les exploitants ne respectent aucune règle de protection environnementale, d’où le fait que beaucoup de nos montagnes vertes, qui faisaient jadis la beauté du pays, sont aujourd’hui défigurées, sans espoir de réhabilitation. Selon une étude du ministère de l’Environnement datant de 1997, le nombre des carrières s’élèverait à 807, dont 379 au Mont-Liban, 170 au Liban-Nord, 168 dans la Békaa et 90 au Liban-Sud. La partie du Liban-Sud libérée en 2000 a par ailleurs souffert, dès les premiers jours, des convoitises des exploitants, qui ont profité de ces espaces nouvellement disponibles pour y étendre leur influence. Les hommes politiques figurent parmi les plus grands propriétaires de carrières. Au cours d’une conférence qu’il a donnée récemment à l’espace culturel Ninar, Akram Chehayeb, président de la commission parlementaire de l’Environnement, a précisé que plus de quarante députés et ministres étaient impliqués dans l’exploitation de carrières ou en protégeaient les propriétaires ! Ce qui explique le retard dans le traitement sérieux de ce dossier... Les dégâts environnementaux causés par les carrières sont multiples. D’une part, elles contribuent à la déforestation, en l’absence d’un contrôle suffisant qui empêcherait l’établissement de carrières dans des sites boisés... dans un pays où les espaces verts ne représentent plus que 6 % de la superficie globale. D’autre part, la surexploitation des sites cause une disparition du recouvrement de terre fertile superficielle. Enfin, les explosions et le passage incessant de camions aggravent la pollution atmosphérique, ce qui a une incidence sur les maladies respiratoires et les allergies au sein des populations environnantes. Sans compter l’effet désastreux sur le paysage. Création d’un Conseil national des carrières Quoi qu’il en soit, le projet de décret d’organisation du secteur des carrières est prêt et devra être discuté ce soir, sauf imprévu, en Conseil des ministres. Toutefois, le plan directeur qui comporte la carte des régions susceptibles d’accueillir des carrières n’a pas encore été finalisé, selon les dernières informations. Rappelons qu’un premier plan directeur (jamais mis en application) avait été établi il y a quelques années par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Michel Murr. Il avait été décidé grosso modo que la seule région où peuvent être exploitées des carrières serait la chaîne de montagnes de l’Anti-Liban. Le nouveau plan directeur, dont le contenu n’a pas encore été divulgué mais qui accompagnera inévitablement la mise en application du décret, adoptera-t-il cette même solution ou bien ouvrira-t-il la porte à l’importation de sable et de gravats ? C’est là une décision qui devra être prise en Conseil des ministres. Pour ce qui est du texte du décret, il comporte plusieurs articles : le premier donne une définition des carrières et précise qu’elles ne pourront dorénavant être établies que dans les régions qui seront fixées ultérieurement dans le plan directeur. Par ailleurs, l’un des points les plus importants du décret porte sur la création, au sein du ministère de l’Environnement, d’un Conseil national des carrières, présidé par le ministre (ou, en cas d’absence, par le directeur général) et formé de représentants des ministères des Travaux, de l’Intérieur, de l’Énergie, de la Santé, de la Défense, des Finances, de l’Agriculture et de la Culture. Ce conseil sera chargé de définir les conditions générales d’exploitation des carrières, d’accepter ou de rejeter les demandes de permis, etc. Même si c’est le mohafez qui octroie les permis, la décision du conseil reste finale et incontournable. Selon certaines sources bien informées, il s’agit là d’une avancée cruciale par rapport aux textes juridiques précédents puisque l’autorité de décision a été centralisée, et que, de cette façon, tous les permis devront obligatoirement passer par le ministre de l’Environnement, ce qui, en pratique, n’était pas le cas jusque-là. L’obtention d’un permis suppose la présentation d’un grand nombre de documents dont la nature a été précisée dans le décret. L’un des principaux documents que doit fournir l’auteur de la demande est une étude sur l’écosystème entourant le site et sur l’impact environnemental de la carrière sur son entourage. Ce qui semble être une lacune, cependant, c’est que le texte ne précise pas qui sera chargé d’effectuer cette étude (société privée, institution gouvernementale...). Le futur exploitant devra aussi préciser par quelle méthode il compte traiter les déchets qui résulteront de son entreprise, et les mesures qu’il prendra pour minimiser les dégâts sur le site et pour le réhabiliter après la fin des travaux, selon les critères et les délais qui lui auront été fixés à la base par l’autorité qui lui a octroyé le permis. Il faut préciser que ce n’est pas la première fois que la question de la réhabilitation des anciennes carrières est soulevée, mais qu’un simple coup d’œil sur les sites abandonnés prouve à quel point cette mesure n’a jamais attiré l’attention des exploitants. Par ailleurs, au cas où des vestiges archéologiques, des fossiles végétaux ou animaux ou des grottes naturelles sont découverts sur le site, le propriétaire de la carrière devra ordonner l’interruption immédiate des travaux et notifier de sa trouvaille le mohafez et la Direction générale des antiquités dans un délai de quinze jours. C’est au mohafez que revient également la pénalisation des contrevenants, mais les membres du Conseil national des carrières ont tous un droit d’observation et de supervision sur les carrières. Des sources officielles interrogées se félicitent de cette mesure qui assure la multiplicité des parties responsables du contrôle, ce qui ne pourrait, selon elles, que renforcer la sécurité dans ce domaine. Par ailleurs, dès la date d’adoption du décret, toutes les carrières illégales devront être fermées. Les carrières légales situées dans les régions fixées dans le plan directeur bénéficieront d’un délai administratif de deux mois avant leur fermeture. Leurs propriétaires devront présenter de nouvelles demandes suivant les critères évoqués dans le texte du décret. Ceux qui ne présentent pas de demandes verront leur entreprise définitivement fermée. Enfin, le Conseil des ministres peut donner exceptionnellement son approbation pour un permis d’exploitation d’une carrière qu’il jugerait indispensable à la construction d’un projet d’utilité publique. Les principes évoqués dans le texte du décret ne sont certes pas nouveaux. Reste à savoir, comme le fait remarquer, sceptique, l’expert Wilson Rizk, interrogé sur la question, « si le gouvernement décidera de passer à l’acte cette fois, parce que ces belles paroles sont restées lettre morte dans le passé ». S.B.
Après le mazout, le dossier des carrières (de sable et de pierres) semble être aujourd’hui au cœur d’un consensus politique national, au niveau des dirigeants. Lancé par le chef du Parlement, Nabih Berry, il y a quelques jours, le sujet fait l’objet d’un décret qui sera discuté aujourd’hui en Conseil des ministres. Le texte a été élaboré par une commission...