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VIENT DE PARAÎTRE Deux lectures d’été aux couleurs libanaises

Littérature libanaise d’expression française en devanture des librairies en cette fin de saison. Deux ouvrages absolument différents, de préoccupations et de narration. Le premier est un roman intitulé «Marie-Luce Bruyère», de Georges Saad, traitant de la vie d’un étudiant en France, et le second, un essai de Raja Choueiri, ayant pour thème «Nostalgie, sagesse et folklore du Liban selon Anis Freiha». Présentation donc de deux lectures d’été aux couleurs bien libanaises. «Marie-Luce Bruyère», de Georges Saad: la vie d’un étudiant libanais en France Poète, romancier, traducteur et professeur à la faculté de droit de l’Université libanaise, Georges Saad vient de signer un premier roman, directement écrit en français, où il relate la vie d’un étudiant libanais en France avec le cortège de problèmes pour l’intégration sociale et une nouvelle identité, surtout culturelle. À travers la fiction, histoire de sonder les passions politiques et celles du cœur, il y a surtout là l’art de brosser des personnages, d’imaginer des situations et de mener rondement des dialogues pertinents. Avec Marie-Luce Bruyère (éditions Atelier de Création Libertaire, 140 pages), Georges Saad aborde, avec lucidité et sentiments à la fois, les thèmes majeurs et troublants des Libanais «en dehors» de la patrie-mère. À découvrir au fil des pages et des rebondissements d’une trame qui ne cède jamais sa «libanité», même au pays de Robespierre et de Hugo. À retenir surtout cette phrase qui en dit long sur la notion d’appartenance, par-delà style, préoccupations littéraires, formulations élégantes ou peu heureuses: «Je ne peux accepter, je crois, qu’une carte de Sécurité sociale rende un bonsaï plus joli qu’un cèdre». Fiche signalétique Georges Saad est un auteur polymorphe dont nous citons les principaux travaux: Droit: Le droit administratif, Études en droit du travail libanais. Poésie: Beyrouth-Lyon aller-retour. Roman (en arabe): Hawch el-Omara. Traduction: La poétique de la rêverie (Gaston Bachelard); Qu’est-ce que la philosophie? (Deleuze et Guattari); L’anarchisme (Daniel Guérin). «Nostalgie, sagesse et folklore du Liban selon Anis Freiha», de Raja Choueiri Sixième volet d’un parcours riche qui englobe déjà plusieurs ouvrages à caractère de patrimoine intellectuel et culturel libanais. Le cycle s’est ouvert avec Dhour Choueir ou la paix des pins pour enchaîner successivement et laborieusement avec Deir el-Qamar et Fakhreddine, Bécharré, Gibran et le gibranisme, Baskinta et Neaimeh ou la nouvelle Montagne inspirée, pour finir, il y a quelque temps, avec Le pays de Byblos-Jbeil visité par Amine Rihani. Aujourd’hui, fort de son travail de réflexion, d’annotation et de compilation, Raja Choueiri, toujours aux éditions Félix Beryte, signe un livre touffu dans la même veine que les précédents, mêlant érudition, sens de l’anecdote, documentation fouillée et analyse pertinente même si elle frise souvent de savoureuses digressions et surcharges. Nostalgie, sagesse et folklore du Liban selon Anis Freiha, de Raja Choueiri (255 pages et dernier maillon d’un cycle intitulé Terroirs littéraires du Liban), jette un éclairage (et éclairant !) sur l’œuvre et les idées (aussi bien populaires qu’académiques) de l’un de nos meilleurs hommes de plume et à qui l’on doit quelques bons petits chefs-d’œuvre, en langue arabe, dont le célèbre Isma’ ya Rida (Écoute, Rida) sans négliger pour autant Qabla an ansa (Avant que je n’oublie) et Sawaneh min taht al-kharouba (Pensées sous le caroubier). En prologue, écoutons un peu (oui, on écoute sagement tout comme Reda!) ce que l’auteur veut bien confier à propos de son projet: «Dans l’âme, le professeur était resté un montagnard villageois, imbibé jusqu’à la moelle de traditions populaires. Loin de s’en cacher, il avait fait sa spécialité académique du folklore libanais. Son intellect s’est ainsi plié à son affect. Il a dirigé ses recherches vers où le menaient ses goûts personnels, et cette inclination naturelle était alors, et déjà, taraudée par l’angoisse de la prochaine disparition de cet univers, sous les roues et les chenilles de la modernité corruptrice. En conservateur et par le crayon, Freiha a voulu sauvegarder ce qui pouvait encore l’être. Il a su parler savamment des choses populaires et parler populairement des choses savantes. Pour la simple et bonne raison qu’il a vécu personnellement les coutumes qu’il décrit… La culture de la terre libanaise est son élément naturel. Le terroir est son terrain de prédilection. Son approche est donc chaleureuse et passionnée, naturellement empreinte de sympathie. Elle est surtout gorgée de nostalgie. Nostalgie! Voilà le mot-clé de l’œuvre et de l’existence de Freiha, car c’est cela qui fait l’unité de tous les thèmes de ses ouvrages, savants fussent-ils ou destinés à une grande audience». Quelques proverbes à méditer Entre octobre et novembre, il existe un deuxième été. La belle-mère est une fièvre (al-hama hamma). Le voisin passe avant la maison (al-jar qabl al-dar). Dieu inflige et Dieu aide. Heureux celui qui possède une litière de chèvre au Liban. Le droit est avec celui qui dit vrai et non avec celui qui dit en premier. Celui qui rapporte le blasphème n’est pas un blasphémateur. Des rois, ne demande pas. Nul n’est plus cher que le fils, sinon le fils du fils. Déjeune et allonge-toi, dîne et marche. Être loin des gens est un trésor. Edgar DAVIDIAN
Littérature libanaise d’expression française en devanture des librairies en cette fin de saison. Deux ouvrages absolument différents, de préoccupations et de narration. Le premier est un roman intitulé «Marie-Luce Bruyère», de Georges Saad, traitant de la vie d’un étudiant en France, et le second, un essai de Raja Choueiri, ayant pour thème «Nostalgie, sagesse et...