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Actualités - CHRONOLOGIE

Les juristes partagés sur la candidature de Myrna Murr Aboucharaf

La candidature de Myrna Murr Aboucharaf à l’élection partielle du Metn est-elle légale? Dès l’annonce de la participation de la présidente des fédérations des municipalités du Metn au scrutin et présidente de la municipalité de Bteghrine, la question de son éligibilité s’est posée. La polémique est d’autant plus vive que la candidate est la propre fille de l’ancien ministre de l’Intérieur Michel Murr et la sœur de l’actuel ministre de l’Intérieur Élias Murr, dont le rôle en période électorale est plus que déterminant. Or, avec l’octroi du récépissé définitif qu’il a délivré, Élias Murr a admis la légalité de la candidature de sa sœur. C’est d’ailleurs ce qu’ont contesté certains juristes qui considèrent que sa décision est contraire à la loi. D’autres ont estimé cependant que les textes législatifs sont vagues, voire même contradictoires, et donnent lieu à des interprétations divergentes. Tel est notamment l’avis d’Edmond Naïm, juriste et ancien gouverneur de la Banque centrale, qui affirme qu’il s’agit là d’un problème d’interprétation des lois en vigueur, les deux textes en cause étant contradictoires. « Il existe deux textes de lois qui traitent de cette question, celui de décembre 1997 et celui de janvier 2000 qui, dans son article 30, renvoie au texte de 1997. Or, l’article 29 de la loi électorale de 2000, qui stipule le non-cumul de la fonction de députation avec celle de la présidence du conseil municipal, vient contredire l’article 22 de 1997, qui affirme qu’un président de municipalité n’est éligible que deux ans après sa démission de son poste souligne le juriste. S’il y a lieu de choisir, c’est le texte de janvier 2000 qui doit être pris en considération car c’est la loi qui a été promulguée en dernier lieu. » En d’autres termes, ajoute M. Naïm, si l’article 22 de la loi 665 de 1997 interdit aux présidents ou vice-présidents de municipalité de se porter candidats aux élections législatives avant que deux années ne s’écoulent après la fin de leur mandat ou de leur démission, la loi électorale de janvier 2000, bien qu’elle renvoie explicitement au texte de 1997, stipule que le cumul des deux fonctions sont interdits, ce qui signifie qu‘un président de conseil municipal « peut choisir entre la fonction de député et celle qu’il exerce à la tête de la municipalité ». Il s’agit d’une lacune au niveau des textes, estime M. Naïm, qui n’y voit « aucune mauvaise foi de la part du législateur ». Pour Habib Nassar, juriste et secrétaire général de l’Association libanaise pour la démocratie des élections, il existe des doutes sérieux sur la légalité de la candidature de Mme Murr Aboucharaf semble illégale, d’après la lettre des textes. « Il n’existe aucune contradiction entre les deux textes qui sont relativement clairs pour ce qui est de la non-éligibilité d’un président ou d’un vice-président de municipalité ainsi que du non-cumul des fonctions », affirme M. Nassar. En fait, les textes traitent de deux questions différentes, explique-t-il. « L’article 22 interdit l’élection des présidents et des vice-présidents alors que l’article 29 concerne uniquement les fonctionnaires municipaux », dit-il. C’est précisément sur cet article que Myrna Murr s’est fondée pour justifier sa candidature. De plus, dit-il, l’article 30 du texte de 2000 renvoie explicitement au fameux article 22 de la loi de 1997 interdisant aux présidents et aux vice-présidents de se porter candidats. « En outre, la logique de ces textes se trouve confortée par l’article 31 de la loi électorale de 2000, relatif aux élections partielles », poursuit Habib Nassar . Or, dit-il, cet article prévoit « qu’en cas de vacance d’un siège parlementaire », peuvent se présenter les fonctionnaires de première catégorie, tous les juges sans exception, les présidents des conseils d’administration des établissements publics ainsi que leurs directeurs, etc., à condition qu’ils démissionnent dans les 15 jours qui suivent la convocation du corps électoral. « Mais le texte ne mentionne pas les présidents, les vice-présidents ou les membres du conseil municipal » affirme le juriste. « Il faut comprendre l’esprit de cette loi, explique Habib Nassar, à savoir que le législateur a voulu éloigner le spectre du clientélisme. Une manière de dissuader les responsables locaux d’exploiter leurs fonctions au sein du conseil municipal en mettant les services publics ou les moyens financiers et logistiques à leur profit .» Dénonçant par ailleurs le « manque de transparence » de l’autorité administrative en charge, en l’occurrence le ministère de l’Intérieur qui a admis la candidature de Myrna Murr, M. Nassar estime qu’il incombe à cette autorité de rendre publique son « interprétation de la loi », si interprétation il y a, afin d’expliquer le fondement juridique de sa décision. Devant cette ambiguïté, certains juristes s’abstiennent de donner leur propre interprétation des textes, « par peur, disent-ils, de paraître en faveur d’une candidature contre une autre ». À ce sujet, un avocat qui a demandé à garder l’anonymat, estime que si l’on prend en considération « la logique de jure », on devrait reconnaître le droit, pour chaque citoyen, à se porter candidat et à représenter le peuple dès lors qu’il aura atteint l’âge de maturité. « Pourquoi un ministre aurait-il le droit de se présenter au élections législatives et non le président de municipalité ?» s’interroge cette source. Habib Nassar va dans le même sens puisqu’il estime que le fameux délai de deux ans requis par la loi constitue un hiatus dans le parcours politique d’un président de municipalité qui ambitionne de faire de la politique. Mais le problème ne se situe pas à ce niveau, poursuit M. Nassar, notre rôle – en tant qu’association – étant de réclamer que la loi soit appliquée. « Ce qui est exigé ici, c’est le respect du principe de légalité et par conséquent de l’État de droit afin de ne pas laisser la voie libre à l’arbitraire .» Le chemin est-il irréversible au stade actuel ? Pas tout à fait, explique M. Naïm qui précise qu’un recours en invalidation devant le Conseil constitutionnel peut être présenté « par le candidat de l’opposition, une fois les résultats publiés, mais non pas avant le déroulement du scrutin ». La balle est maintenant dans le camp des autres candidats qui peuvent, en cas d’échec face à Myrna Murr Aboucharaf, saisir le Conseil constitutionnel pour faire invalider son élection. En attendant, le débat sur la légalité de la candidature de Mme Murr Aboucharaf reste ouvert. Jeanine JALKH
La candidature de Myrna Murr Aboucharaf à l’élection partielle du Metn est-elle légale? Dès l’annonce de la participation de la présidente des fédérations des municipalités du Metn au scrutin et présidente de la municipalité de Bteghrine, la question de son éligibilité s’est posée. La polémique est d’autant plus vive que la candidate est la propre fille de...