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Actualités - OPINION

Les tensions au sein du pouvoir obèrent le Trésor

Le graphique en dents de scie des relations entre les présidents, plus souvent conflictuelles qu’harmonieuses, conduit nombre de politiciens à plaider pour une nouvelle règle du jeu institutionnel. Cela essentiellement au nom d’un intérêt national tout à fait vital. Car ces bras de fer épisodiques coûtent cher à un Trésor déjà exsangue. Et rendent extrêmement difficile le traitement de la crise socio-économique. Ainsi, le gouverneur de la Banque centrale, M. Riad Salamé, tout en se disant confiant dans les capacités du pays et dans la force intrinsèque de son économie, ne peut s’empêcher de condamner ces « tiraillements qui affaiblissent la confiance en suscitant des perspectives négatives sur le plan économique ». Ce haut fonctionnaire sait de quoi il parle : à chaque joute, l’institution qu’il dirige doit larguer des dizaines de millions de dollars pour protéger la livre. Dont une éventuelle dévaluation serait une catastrophe. La fonte par à-coups des réserves en devises signifie également que l’État ne peut plus en disposer pour réaliser des projets vitaux. Ni pour assurer ce développement équilibré des districts que le président de la République, M. Émile Lahoud, a défendu lors de sa tournée dans la région déshéritée du Akkar. Les querelles entre les présidents devraient cesser d’alimenter la polémique sur le cellulaire, sur la prochaine présidentielle, ou sur tout dossier à venir, pour que l’entente retrouvée permette aux finances publiques de retrouver un second souffle. Dans ce cadre, un ancien responsable souligne que la cohabitation ne doit pas être maintenue à coups de tranquillisants syriens. Et qu’il faut réguler les rapports entre les présidences, notamment au sein de l’Exécutif, sur des bases aussi constantes que claires. À son avis, il ne suffit pas d’en référer à l’arbitrage des institutions ou de la Constitution. Car ce texte fondamental commande que l’on recoure au vote en cas d’impossible règlement à l’amiable, ce qui ne gomme pas les tensions ambiantes, bien au contraire. D’autre part, observe cette personnalité, on ne peut pas non plus s’en remettre à la Chambre. En effet, on l’a vue souvent se dédire, sous des pressions déterminées, pour abroger en moins d’une semaine des lois votées à une écrasante majorité. Prouvant ainsi, si besoin était, qu’elle est tout ce qu’on veut sauf souveraine, maîtresse de ses propres décisions. Au Conseil des ministres, relèvent certains, il existe une majorité qui vote comme le veut le Premier ministre. Au Parlement, la majorité se fonde sur la coalition de trois blocs principaux et la minorité n’y peut rien changer. Pour l’ancien responsable cité, il n’y a pas de mal à cela, du moment que le système est démocratique. En effet, note-t-il, les élections législatives ont produit une Assemblée qui a donné à M. Rafic Hariri une forte majorité ministérielle. Tout en installant les trois grands blocs mentionnés, qui font pencher la balance sur le vote de tout projet place de l’Étoile. Dès lors, si l’on voulait renverser la vapeur, il aurait fallu tenter de faire invalider les résultats des législatives par le Conseil constitutionnel, ce qui n’a pas été fait. Ou alors réclamer la dissolution de la Chambre, ce qui aurait été vain, puisque les conditions légales n’y sont pas. D’où un constat élémentaire : il faut faire avec ce que l’on a. En attendant de corriger le tir, si le pays n’est pas satisfait, à l’occasion des prochaines consultations populaires. Cependant, pour ce professionnel, la règle tacite du consensus ne doit pas être toujours aveuglément suivie. En effet, dit-il, lorsque l’on s’abstient de recourir au vote en Conseil des ministres, pour ne pas braquer la minorité qui perdrait, on finit par paralyser l’État et le pays. Mais comment faire pour éviter un climat de défi ? La source citée préconise en réponse l’adoption de pratiques parallèles à l’exercice de la Constitution. En précisant qu’il faut clairement s’entendre sur le caractère tout à fait exceptionnel et provisoire de ces mesures, qui ne doivent pas devenir un précédent. Car la Constitution doit rester au-dessus de toute coutume. Cet accord en marge des textes se détaillerait comme suit : – Au bout de deux ou trois séances de débat infructueux, les sujets qui fâchent seraient tranchés par un vote en Conseil des ministres, mais à la majorité des deux tiers. Étant entendu d’avance que la minorité s’inclinerait de bonne grâce et ne ruerait plus ensuite dans les brancards. – Les séances du Conseil présidées par le chef de l’État auraient lieu désormais, par égard pour la première présidence, à Baabda. – Dans le même esprit de promotion, l’ordre du jour ne serait plus simplement communiqué au chef de l’État par le Premier ministre, mais mis au point avec son assentiment préalable. – En outre, le président de la République devrait avoir le droit de convoquer le Conseil à titre exceptionnel, sur des sujets bien précis, sans en référer au Premier ministre. – En revanche, lors de la formation du gouvernement, le Premier ministre désigné aurait quartier libre, dans des délais déterminés. Cela pour éviter tout conflit avec le chef de l’État, étant donné que c’est le président du Conseil, et lui seul, qui doit répondre du gouvernement devant la Chambre. Émile KHOURY
Le graphique en dents de scie des relations entre les présidents, plus souvent conflictuelles qu’harmonieuses, conduit nombre de politiciens à plaider pour une nouvelle règle du jeu institutionnel. Cela essentiellement au nom d’un intérêt national tout à fait vital. Car ces bras de fer épisodiques coûtent cher à un Trésor déjà exsangue. Et rendent extrêmement difficile...