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Actualités - OPINION

Les opposants se frottent les mains Un parfait chassé-croisé de Hariri avec Powell

Ils se sont rencontrés lundi à Beyrouth. Puis l’un s’en est allé échouer, peut-être, à Ramallah. Et l’autre, peut-être aussi, à Washington. Tandis que M. Colin Powell se faisait gueuler dessus par tout ce que le monde arabe compte de rugissants, M. Rafic Hariri se faisait taper sur les doigts aux States par la Banque mondiale. À cause des privatisations, qui ont un an plein de retard. Et la présence à ses côtés de ces fins spécialistes que sont MM. Fouad Siniora et Bassel Fleyhane ne lui a été d’aucun secours. Bien au contraire même, car elle l’a sans doute empêché d’ouvrir des yeux ronds pour faire mine de ne pas savoir ce dont les cadres de la Banque mondiale lui parlaient. En tout cas, nul n’est tenu d’ignorer la dure loi des marchés, surtout pas les experts en marchés de dupes. Beau joueur, fin tacticien aussi, M. Hariri a lui-même révélé la savonnade reçue, sans rien en cacher. Il se dit sans doute que de la sorte il pourra plus facilement faire comprendre aux autres joueurs du monopoly local que justement le temps des petites parties est terminé. Que le Liban est pour ainsi dire en face d’un ultimatum qu’il ne peut ignorer sans risquer de plonger à jamais dans les abysses de la nue pauvreté. Ce n’est donc pas en triomphateur que le président du Conseil va opérer son retour. Mais en Cassandre qui s’écrie : je vous l’avais bien dit ! En attendant, et en l’attendant, les opposants du cru se frottent les mains. Parce qu’à leur tour, ils avaient mis en garde contre l’inopportunité d’une visite aux States dont la réussite était rien moins que garantie. À cause de la situation régionale d’abord, du parti pris manifeste des Américains pour Sharon et de leur inquiétante impopularité (pour user d’un doux euphémisme) au niveau de la rue arabe et locale. À cause ensuite de l’impossibilité évidente d’obtenir des sous tant que le Hezbollah n’est pas neutralisé. Objectif qu’aucun dirigeant ne souhaite atteindre, tant que court le jumelage avec la Syrie. Bref, même si sur le fond, c’est-à-dire sur le problème de la récession économique, M. Hariri paraît pouvoir marquer des points à terme, pour le moment il semble avoir essuyé un revers politique. Et les opposants, dont bon nombre ne se soucient qu’assez peu de l’avenir et ne veulent voir que le bout de leur nez, se remettent à rêver d’un changement de cabinet. En oubliant cependant que pour les décideurs, qui l’ont clairement fait savoir à plusieurs reprises, c’est hors de question tant que la région virevolte sur un fil d’acier rougi au-dessus du vide. Quoi qu’il en soit, c’est vraisemblablement en pleine connaissance de cause que M. Hariri a effectué son périple. Il savait en effet qu’on allait lui parler en premier lieu des privatisations. À preuve qu’avant son départ, il avait dirigé plusieurs réunions urgentes de la commission ad hoc. Les séances étant principalement consacrées au dossier du cellulaire, qui va inaugurer en principe le cycle des privatisations. Sur le plan concret, les contrats avec les deux compagnies vont être résignés, soit à l’amiable, soit devant les tribunaux. Leurs deux licences vont être ensuite mises aux enchères, l’État gardant pour lui la troisième concession, en même temps que la téléphonie fixe, au sein de Liban-Télécom. Société dont le capital va s’ouvrir au tiers devant l’actionnariat privé. Selon des sources ministérielles, mais néanmoins informées, les participants aux réunions ont amendé les propositions du ministre de tutelle, M. Jean-Louis Cardahi. Ce qui devrait rendre bien plus difficile, d’après ces sources, l’opération de mise à plat avec les deux compagnies contractuelles, en vue d’une cession de leurs licences pour une durée de vingt ans. Les mêmes sources ajoutent qu’en cas de règlement du litige devant les tribunaux, les deux compagnies se retrouveraient avantagées par les retouches apportées au plan Cardahi. Les corrections en question compliquent le dossier, d’autant qu’elles sont pour la plupart d’ordre technique et administratif. Il n’est pas étonnant dès lors que, toujours selon les mêmes sources, le ministre concerné ait exprimé les plus grandes réserves quant à ces modifications de dernière heure. En tout cas, la balle est maintenant en pratique dans le camp de la Chambre, saisie des deux projets complémentaires des télécommunications et de la privatisation. M. Cardahi affirme, pour sa part, que son département est fin prêt pour aller de l’avant. Mais les haririens affirment que M. Cardahi a beaucoup retardé l’élaboration du cahier des charges, ce que l’intéressé dément. En rappelant qu’en tout état de cause, rien ne peut se faire tant que la loi sur les télécoms et celle sur les privatisations ne sont pas entrées en vigueur. Philippe ABI-AKL
Ils se sont rencontrés lundi à Beyrouth. Puis l’un s’en est allé échouer, peut-être, à Ramallah. Et l’autre, peut-être aussi, à Washington. Tandis que M. Colin Powell se faisait gueuler dessus par tout ce que le monde arabe compte de rugissants, M. Rafic Hariri se faisait taper sur les doigts aux States par la Banque mondiale. À cause des privatisations, qui ont un an...