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Actualités - REPORTAGE

SANTÉ - Démarrage du congrès des pédiatres francophones avec une conférence de la psychologue Danielle Rapoport Informer l’enfant malade, une nécessité

L’enfant malade a le droit de savoir. Mais que lui dire ? Et quand le dire ? C’est au cours de la première journée du 33e congrès de l’association des pédiatres de langue française, qui se déroule au campus des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, que Danielle Rapoport, psychologue à l’hôpital Trousseau à Paris, a abordé ce thème concernant tant l’enfant malade, que son pédiatre et sa famille. «Nous sommes convaincus que l’enfant a le droit d’avoir accès à l’information médicale qui le concerne», affirme Danielle Rapoport. Cette conviction découle du changement profond du regard que la société française pose sur l’enfance. Un changement qui a profondément amélioré et humanisé l’accueil des enfants, tant dans les hôpitaux que dans les crèches et pouponnières, depuis les années 75 et qui a débouché sur une véritable prise de conscience dans les années 80-85. Ne pas trop en dire Certes, remarque la psychologue, si on reconnaît aujourd’hui l’évidence et le bien-fondé du droit de savoir de l’enfant malade, «les choses ne sont pas si simples et il n’existe pas de recette toute faite sur les choses à dire ou à ne pas dire». Car, reprend-elle, «ce bien-fondé se heurte à la complexité des situations rencontrées, tant médicales que familiales, et à la spécificité des besoins de chaque enfant, selon son âge, son développement ou son histoire». Aussi est-il indispensable, parallèlement à l’information médicale donnée aux parents, «de s’adresser directement à l’enfant, mais sans en faire trop et jamais durant trop longtemps», prévient Danielle Rapoport. «Quant au silence autour de l’enfant malade, pire que la dissimulation, dit-elle, citant la psychologue Nicole Alby, il aggrave son angoisse et ne protège que les adultes». Donner une information médicale à l’enfant dépasse les définitions conceptuelles du dictionnaire. En effet, il s’agit de partager des connaissances avec lui, ses proches et son pédiatre, ce dernier représentant un précieux relais de l’information hospitalière. Un partage dont la dimension émotionnelle n’est jamais exclue et qui n’est pas toujours évident. «Parfois, remarque la psychologue, la situation est tellement complexe qu’on préfère ne rien dire à l’enfant. On dit alors avec ses yeux, son sourire et son cœur, et on laisse à l’enfant le soin de comprendre». Mais l’information médicale est bénéfique car elle répond aux besoins spécifiques de tout enfant, précise Mme Rapoport. C’est la raison pour laquelle l’âge de l’enfant ne doit pas faire obstacle ou donner prétexte à un non-dit. Aussi est-il nécessaire de connaître la dimension spécifique de son niveau de compréhension. «Avant l’âge de 4 ans, note-t-elle, l’enfant est psychologiquement fragile à une hospitalisation accompagnée de traitements douloureux, car il ne peut en comprendre l’intérêt. Son sentiment de sécurité et sa confiance viendront de la continuité qui s’établit entre les soignants et les parents, qui deviennent son véritable porte-parole». Comprendre ce qu’il ressent Petit à petit, l’enfant va commencer à poser des questions sur les mécanismes de sa maladie. Le «pourquoi», le «parce que» apparaissent avec l’apparition de la relation de cause à effet. De plus, s’il acquiert progressivement le sens de la responsabilité, il accède aussi au jugement moral et à la culpabilité. «Il va se croire fautif, responsable de sa maladie ou du chagrin qu’il cause à ses parents». La vigilance est nécessaire, à ce stade, les médecins et les psychologues pouvant soulager l’enfant et l’aider à dépasser sa culpabilité. À partir de 7 ans, ayant atteint l’âge de raison, l’enfant peut accepter des explications plus complexes, mais il n’est pas pour autant raisonnable. On doit s’attendre à des régressions possibles, à des exigences passagères, car il s’attend que son entourage reconnaisse ce qu’il ressent profondément et qu’il l’en soulage. Et Danielle Rapoport d’évoquer l’enseignement de la psychanaliste Françoise Dolto, précisant que si l’information médicale tient compte du vécu ressenti par l’enfant, elle sera un facteur d’expérience positive, de difficultés surmontées, de confiance en autrui. De même, elle met en garde, toujours selon Françoise Dolto, contre «l’excès d’explications, ce bain de paroles, vide de ce ressenti, vide de cette complicité. Ce serait parler pour ne rien lui dire. Mais il est difficile de trouver le juste milieu», conclut-elle. Alors que l’information médicale demande une certaine formation des professionnels qui la transmettent à l’enfant, la sensibilisation est à présent inscrite dans l’évolution des pratiques, notamment en France, note la psychologue. Mais qu’en est-il des cultures orientales, demande le docteur Carlo Akatchérian, notamment au Liban, où les parents refusent souvent d’informer leur enfant malade, préférant plutôt lui donner de fausses informations ? Le non-dit est très différent d’une culture à l’autre, répond Mme Rapoport, et peut parfois même sauver la situation, ajoutant que l’enfant a la capacité d’intégrer les tabous et les interdits posés par sa culture.
L’enfant malade a le droit de savoir. Mais que lui dire ? Et quand le dire ? C’est au cours de la première journée du 33e congrès de l’association des pédiatres de langue française, qui se déroule au campus des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, que Danielle Rapoport, psychologue à l’hôpital Trousseau à Paris, a abordé ce thème concernant tant...