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Actualités - INTERVIEWS

Sommet arabe - « Je ne voulais que la réussite » des assises, rappelle le ministre de l’Information à « L’Orient-Le Jour » Aridi : « L’idiotie d’une partie des SR est exceptionnelle » Joumblatt formel : « Nous réglerons nos comptes » après le 29 mars

D’aucuns peuvent faire, à tort ou à raison, beaucoup de reproches à Ghazi Aridi. Sauf que personne ne penserait mettre en doute sa conscience professionnelle, personne ne penserait le blâmer pour son manque de courage, de franchise ou, comme il est d’usage de le dire aujourd’hui, parce que c’est un ministre qui «n’ouvre pas sa gueule». Personne, sauf les fantômes et autres Services. Hier, c’était la goutte qui a fait déborder la jarre. Hier, au cours d’une conférence autour du rôle des ONG dans le soutien à l’intifada, Ghazi Aridi a lu un tract signé… des «Soldats de la démocratie». L’accusant, en gros, d’utiliser la liberté de la presse comme prétexte pour imposer sa clientèle et celle de ceux qu’il représente, l’accusant également, en un mot comme en cent, d’être un collabo israélien. Et qu’il n’ait pas été directement nommé n’a fait que redoubler la bêtise monumentale du papier jeté dans les rues de Beyrouth, dans la nuit de dimanche. «Permettez-moi de vous présenter le ministre libanais de l’Information (et le président en exercice du Conseil des ministres arabes de l’Information) tel qu’on le décrit dans les souterrains de certains pôles de pouvoir. Aujourd’hui, ces chauves-souris et ces vampires ont dépeint le ministre libanais de l’Information comme étant un agent israélien, délégué par eux, etc., etc. Moi je leur dis merci pour ce certificat qu’ils me donnent quelques heures avant le sommet de Beyrouth, merci pour la politique qu’ils suivent, pour leur position. Laissez-moi vous dire que c’est une médaille pour moi, une fierté. Mais pour le Liban, c’est désolant, c’est une gifle pour les valeurs, pour la morale», a dit hier Ghazi Aridi devant toutes les télévisions, locales comme régionales, avec ce franc-parler qui est le sien. Et puis Ghazi Aridi a répondu à L’Orient-Le Jour. Les «Soldats de la démocratie», on ne connaît pas encore. C’est quoi ça ? «On sait très bien qui c’est. Ce sont ceux-là même qui vont circuler entre les stands du centre de presse du sommet, ceux-là qui ont censuré Gebrane Tuéni, Talal Salmane, ou moi-même, parce que nous avions condamné le fait que les rédacteurs en chef des journaux libanais n’aient pas été conviés à la séance inaugurale». Vous avez accusé une certaine partie du pouvoir. Vous parlez de qui ? Des Services ? «Il est important d’être précis : pas tous les Services, une certaine partie des Services». Les gens fantasmaient au début, parlaient d’une grave brouille entre Ghassan Salamé et vous. «Pas du tout. Ghassan est un frère, et que Dieu lui vienne en aide. C’est le premier à être plaint : il est ligoté». Pourquoi s’en prennent-ils alors au ministre de l’Information ? «C’est à cause de toute une politique». Ils veulent vous punir ? «Ils peuvent toujours courir. Même quand je n’étais ni député ni ministre, j’étais plus fort qu’eux. Mais ils ont vu que ce ministre n’a pas marché comme ils l’ont voulu. Rappelez-vous les problèmes avec la MTV, la LBC, al-Charq el-Awsat. Pour eux, je ne lis pas ce qu’ils m’ont préparé». Ils vous ont reproché de faire votre devoir donc… «C’est ça. Je me moque royalement de ne pas faire partie de la délégation libanaise. Mais pensez que les ministres arabes m’appelaient pour des informations sur les mesures médiatiques. J’étais incapable de les aider : mon ministère était totalement tenu à l’écart, bafoué. Je leur ai envoyé des équipes, entièrement à leur disposition, je voulais que ce sommet réussisse. Deux : j’ai envoyé une liste de journalistes relevant de mon ministère, de l’ANI, pour la couverture du sommet. Ghassan Salamé m’a dit que pour certains d’entre eux, ça allait être impossible. J’ai refusé net : le délit de couleur politique est inadmissible. Ils ont pris une équipe de médias et de relations publiques à la place, même si mes journalistes, après un vrai calvaire, ont pu obtenir leur accréditation. Et puis, je ne pouvais pas ne pas proposer ma place aux rédacteurs en chef qui n’ont pas été invités. Ce banissement est une honte pour le Liban». Pourquoi n’avoir rien fait, après tout cela ? «Cela fait un mois que j’en parle au président Lahoud, à Rafic Hariri. Celui-ci ne s’est mêlé de rien. N’a rien fait, ni de positif ni de négatif. Le premier a toujours été parfait avec moi : en un an et six mois, ses mots comme ses actes ont toujours été bienveillants à mon égard. Là, il “leur” a demandé de cesser, mais ils n’en ont fait qu’à leur tête. Je ne sais pas pourquoi, cette fois, le résultat est tout autre». Mais depuis deux ans, ce genre d’exactions est devenu, malheureusement, presque banal. «C’est infâmant. Si tu es bien avec eux, si tu fais exactement ce qu’ils veulent, alors tout va bien. Mais si tu veux rester digne, tu deviens, pour eux, un agent israélien». Syndrome Toufic Hindi ? «Ils peuvent rêver. Personne ne peut surenchérir sur mon patriotisme, ou sur mon histoire. Ils sont idiots. D’une idiotie exceptionnelle. Mais il y a pire : ce qui est arrivé aujourd’hui est synonyme de faillite». Juste avant l’entretien téléphonique, Ghazi Aridi était au domicile de Walid Joumblatt. Avec tous ses collègues ministres et députés membres de la Rencontre démocratique. Qui a affiché son soutien total au ministre de l’Information (tout comme le bloc Hariri) et affirmé que tout allait être fait pour que le sommet réussisse. Et Walid bey a parlé : «Le bannissement de Ghazi Aridi est un message local qui nous est bien parvenu. Nous voilà revenus aux deux premières années du mandat (Lahoud), à la militarisation, aux “sources responsables”. (…) En ligne de mire : la Rencontre démocratique, le PSP et Walid Joumblatt. (...) Le chef de l’État a clarifié un point bien trouble à Ghazi Aridi, je n’en dirais pas plus. Mais il a dit tout à fait autre chose à un autre ministre. Où est la vérité ? Dans tous les cas, nous réglerons nos comptes après le sommet», a-t-il promis. Ziyad MAKHOUL
D’aucuns peuvent faire, à tort ou à raison, beaucoup de reproches à Ghazi Aridi. Sauf que personne ne penserait mettre en doute sa conscience professionnelle, personne ne penserait le blâmer pour son manque de courage, de franchise ou, comme il est d’usage de le dire aujourd’hui, parce que c’est un ministre qui «n’ouvre pas sa gueule». Personne, sauf les fantômes et...