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Actualités - REPORTAGE

Congrès - Une mobilisation de taille pour une meilleure protection de l’enfance La répression ne sert pas les intérêts des mineurs en conflit avec la loi

Neuf organisations non gouvernementales libanaises se sont mobilisées, en collaboration avec l’Unicef, pour appeler à une meilleure protection de l’enfant, à la lumière de la convention internationale sur les droits de l’enfant et les expériences internationales dans ce domaine. À cet effet, un congrès s’est déroulé hier à la Maison des Nations unies, sous le patronage et en présence de Mme Andrée Émile Lahoud. La séance d’ouverture a été marquée par un état des lieux, une description à tous les niveaux des problèmes rencontrés au Liban, dans l’application de la convention internationale sur les droits de l’enfance et plus particulièrement dans la protection des mineurs à risques ou en conflit avec la loi. «Faut-il nécessairement opter pour la répression à l’égard de ces enfants faibles, généralement battus et opprimés, dont certains ont parfois été agressés ?», demande Georges Khadige, président de l’Union pour la protection de l’enfance au Liban (UPEL), qui insiste sur la nécessité de régler les problèmes de l’enfance en difficulté par une éducation adéquate et une réhabilitation, plutôt que par l’emprisonnement. À ce propos, Naheed Aziz, représentante régionale de l’Unicef pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, rappelle que le respect des droits de l’enfant à l’éducation, aux soins, à la protection contre les abus et l’exploitation, à un standard de vie adéquat et à une orientation appropriée contribue à éloigner les enfants du crime et représente un atout facilitant la prise en charge de ceux qui sont en conflit avec la loi. Et d’ajouter que si la justice juvénile est à l’ordre du jour, cela n’implique pas qu’il faut mettre en valeur le rôle négatif que les enfants et les adolescents pourraient jouer dans la société, lorsqu’ils commettent des crimes. «Il faut nous consacrer à donner des réponses positives à ce genre de comportements négatifs de leur part, afin de leur donner la chance de devenir des membres respectables de la société», conclut-elle. Des droits quotidiennement bafoués Le député et président de la commission parlementaire des Droits de l’homme au Liban, Marwan Farès, souligne le souci constant du Parlement d’œuvrer à améliorer les droits de l’enfant, afin de leur assurer un avenir meilleur, mais Nayla Moawad, présidente de la commission parlementaire des Droits de l’enfant, met l’accent sur la contradiction qui existe dans le pays, à ce sujet. «Certes, des lois pour la protection de l’enfance sont ratifiées. Mais les droits des mineurs sont quotidiennement bafoués, accuse-t-elle. À chaque coin de rue, des enfants mendient ou sont forcés au travail dans des conditions déplorables, au lieu d’aller à l’école. Ce qui prouve la mauvaise application des lois, dont notamment celle sur l’enseignement primaire obligatoire». Et de conclure que la protection des droits de l’enfant, tant au niveau des lois que de leur application, ne peut se faire sans les efforts conjugués de tous, car protéger les droits de l’enfance est le devoir de chacun. Le mot de clôture a été prononcé par Mme Andrée Lahoud qui a exposé les réalités de la situation sur le terrain. «Des progrès importants ont été réalisés en faveur des enfants, dit-elle, mais il reste encore beaucoup à faire au niveau de la santé maternelle et infantile, l’éducation et les handicapés, le système juridique de protection de l’enfance, la délinquance, le travail et l’environnement». «La convention juridique à appliquer pour l’enfant» a été le thème de la première séance, qui a vu la participation de Jaap Doek, président de la Commission pour les droits de l’enfant (CRC), ainsi que des magistrats Rabiha Ammache Kaddoura, Ghassan Rabah et Marlène el-Georr. Insistant sur la nécessité de différencier entre l’enfance à risque et la délinquance juvénile, tant au niveau légal que sur le terrain, le Dr Doek se prononce en faveur d’une prévention efficace non seulement au niveau de l’enfant, mais de sa famille. Il réfute, conformément à la convention des Nations unies, toute forme de détention des mineurs, expliquant que les sanctions ne sont pas appropriées et qu’elles ne servent pas les intérêts de l’enfant, car le but recherché doit être de les aider à devenir des membres actifs de la société. La prison est-elle une solution ? L’aspect de la protection juridique de l’enfant déplacé illégalement, suite à la séparation de ses parents, a été abordé par Mme Ammache Kaddoura qui a exposé des cas pratiques d’enfants devenus des otages, suite aux conflits entre leurs parents. «Si les solutions judiciaires sont possibles dans de tels cas, l’exécution des jugements est souvent difficile. C’est pourquoi, conclut-elle, les accords bilatéraux sont importants avec les pays comme la France et le Canada, alors que les parents doivent prendre en considération les droits de leurs enfants». À son tour, Ghassan Rabah dénonce les mauvais traitements, infligés dans les prisons, à l’enfance privée de liberté, et insiste sur la nécessité d’édifier un tribunal spécialisé pour juger les crimes commis par les mineurs, même si ces actions l’ont été au côté d’adultes. «La loi doit évoluer, conclut-il, dans le sens des intérêts supérieurs de l’enfant». Certes, elle ne prend pas toujours en considération les intérêts des mineurs, mais les magistrats déclarent veiller à trouver la solution la plus adéquate, dans la plupart des cas. Marlène el-Georr, quant à elle, a énuméré de nombreux cas d’enfants en danger, maltraités ou abandonnés, soulignant que la solution préconisée par la justice a privilégié les intérêts de l’enfant. L’inutilité de la répression dans la lutte contre la délinquance juvénile a été démontrée par le professeur Micha Dewinter, expert international en matière d’enfants en conflit avec la loi, au cours de la deuxième séance placée sur le thème des structures à revoir pour l’enfant. «Car, dit-il, l’enfant a besoin de dialogue et doit apprendre à jouer un rôle social. Si l’éducation joue un rôle de taille dans l’apprentissage de l’enfant à devenir un citoyen actif et responsable, la répression, elle, ne sert en aucun cas ses intérêts». Qu’il s’agisse d’institutions ou de prisons dans lesquelles sont placés les enfants en conflit avec la loi ou ceux victimes de négligence, les structures visant l’enfermement des enfants sont à revoir. «Les mineurs en conflit avec la loi et les victimes de négligence sont placés à un même niveau dans ces établissements ou ces prisons dont la mission prioritaire est leur protection, mais qui privent l’enfant de liberté», dénonce May Hazzaz, directrice de l’école de formation sociale de l’USJ. Dressant un état des lieux dans les prisons pour mineurs, le lieutenant Gaby Yammine précise que les progrès sont perceptibles quant aux conditions de détention des mineurs, ajoutant que si les garçons sont séparés des hommes, les filles, elles, cohabitent encore avec les femmes. Renée Géha Sabbagh a rappelé les lois essentielles concernant la protection des mineurs emprisonnés ou placés en institution, protection qui peut paraître dérisoire alors que ces enfants sont privés de liberté. Au terme de la journée, les représentants de différentes ONG ont exposé les nombreux problèmes rencontrés par l’enfant, dont la résolution reste pour le moins hypothétique. Anne-Marie EL-HAGE
Neuf organisations non gouvernementales libanaises se sont mobilisées, en collaboration avec l’Unicef, pour appeler à une meilleure protection de l’enfant, à la lumière de la convention internationale sur les droits de l’enfant et les expériences internationales dans ce domaine. À cet effet, un congrès s’est déroulé hier à la Maison des Nations unies, sous le...