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Actualités - OPINION

Vie politique - Nouvelle médiation syrienne en perspective Tension persistante entre Baabda et Frangié

Comme toujours, ou presque, les conciliateurs locaux ne suffisent pas à la tâche. Et l’on songe à recourir aux bons offices du frère syrien. Les multiples démarches effectuées sur place ces derniers jours pour rabibocher M. Sleiman Frangié avec le régime ont piteusement fait long feu. Le Conseil des ministres de ce jeudi devrait donc débuter dans le même climat de malaise qui avait marqué la fin du précédent. Les loyalistes proches de la présidence reprochent au jeune leader du Nord d’avoir lancé le bouchon un peu trop loin. En critiquant directement le régime, lors d’une intervention télévisée, sans se contenter de tirer comme d’habitude des flèches de Parthe en direction des services. Qu’il accuse non seulement d’agir contre lui, mais aussi d’être derrière une rumeur de tentative d’attentat dont il aurait fait l’objet. Ne plaise à Dieu que cela fût vrai et encore heureux, pourrait-on relever, qu’il n’y ait pas eu accusation de complicité dans un tel projet criminel. Il reste vrai cependant que la charge est grave. Et que des services officiels ne peuvent s’amuser à colporter des bruits pareils, qu’il s’agisse d’un leader, d’un ministre ou de quiconque d’autre. Les loyalistes n’en disconviennent pas, mais soutiennent que M. Frangié a été mal informé, induit en erreur. Certains d’entre eux affirment en outre que dès les fracassantes déclarations de M. Frangié, ils se seraient attachés à dissiper le malentendu. Pour obéir principalement à la nouvelle règle d’or, dictée par l’urgence économique. À savoir qu’il faut ranger sur l’étagère tous les dossiers conflictuels, a fortiori quand ils opposent des responsables. Ces sources ajoutent que l’on s’est efforcé d’étudier à tête reposée les griefs comme les doléances du ministre de la Santé. En tentant du même coup d’identifier les parties qui jetteraient sciemment de l’huile sur le feu, afin d’en neutraliser l’action zizanesque, comme dirait Iznogoud. Dans cet esprit, M. Frangié a pu rencontrer, en présence de Me Joseph Arayji, ses collègues du gouvernement MM. Élias Murr et Nagib Mikati. Le leader de Zghorta a détaillé devant ses interlocuteurs de l’autre camp tous les objets de son ressentiment. En soulignant à l’envi des points qui, à son avis, démontrent qu’on veut lui livrer bataille. À des fins politiques, bien évidemment. Ce qui est un peu étrange, c’est que cette rencontre, qui a débouché sur un gentleman’s agreement de normalisation relationnelle, a eu lieu avant le dernier Conseil des ministres. M. Frangié s’est donc cru autorisé à dormir sur ses deux oreilles, pour ce qui est du projet de dispensaires périphériques qu’il a présenté au Conseil. Or il a eu la pénible surprise d’être contré par M. Jean-Louis Cardahi, éminent fidèle de Baabda. Puis de se voir refuser par le président lui-même le droit de mettre au vote ses propositions. Selon son entourage, M. Frangié ne s’est pas senti trahi à proprement parler. Mais il a pris acte du fait qu’on voulait lui rendre la monnaie de sa pièce, pour ses attaques antérieures, en gommant donc le pacte conciliatoire. Ajoutant que lui-même n’avait voulu provoquer personne, en soulevant l’affaire des dispensaires. Mais simplement légaliser la situation d’établissements qui existent depuis les années soixante-dix et se trouvent financés soit par des donations soit par des emprunts. Il fallait en outre, concluent ces sources, trancher le statut du personnel, ce qui est de la seule autorité du Conseil des ministres. Les proches de Baabda répondent de leur côté que ce qui s’est passé durant le Conseil n’avait rien à voir avec les prestations télévisées de M. Frangié et ne constituait nullement une riposte à cet égard. Le débat, à les en croire, n’avait qu’une portée objective, technique. Ainsi, M. Jean-Louis Cardahi, mais aussi M. Fouad es-Saad qui n’est pas spécialement ce que l’on appelle un homme du président, se sont interrogés sur l’opportunité économique du projet, sur son coût pour un Trésor exsangue et sur sa répartition géographique qui le démarque nettement du concept de développement équilibré. En relevant que nombre de régions, comme Jbeil par exemple, allaient en être privées. Les deux ministres ont donc insisté pour un réexamen du programme, en répétant que la facture de santé est déjà trop lourde. Et en soulignant que ces centres médicaux doivent être régulés en coordination avec le réseau d’hôpitaux gouvernementaux que le Trésor entretient. Autant donc pour les deux points de vue en présence, le climat étant maintenant à l’escalade. Selon ses partisans M. Frangié serait pris pour cible et serait exposé à diverses vexations ainsi qu’aux habituelles menaces d’ouverture de dossiers anciens, financiers ou autres. Se rapportant par exemple à la mainmise de sa milice, les Maradas, sur les cimenteries de Chekka durant la guerre. L’entourage de M. Frangié ne manque pas de riposter qu’il est lui aussi prêt à ouvrir des dossiers et qu’il n’a que l’embarras du choix, tant sont variés les exploits de ses adversaires. Un détail enfin : le camp de M. Frangié disculpe en quelque sorte dans cette affaire le président Rafic Hariri. Qui a été soupçonné par certains d’avoir encouragé M. Frangié à présenter son plan, alors qu’en réalité il aurait tenté de l’en dissuader. Au stade actuel, la tension reste si vive que les observateurs s’accordent à prédire une prochaine médiation syrienne. Comme quoi Taëf a parfois du bon. Philippe ABI-AKL
Comme toujours, ou presque, les conciliateurs locaux ne suffisent pas à la tâche. Et l’on songe à recourir aux bons offices du frère syrien. Les multiples démarches effectuées sur place ces derniers jours pour rabibocher M. Sleiman Frangié avec le régime ont piteusement fait long feu. Le Conseil des ministres de ce jeudi devrait donc débuter dans le même climat de malaise...