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Actualités - REPORTAGE

Créatifs...Philippe Skaff, enfant terrible de la pub(photo)

Ce monsieur à la gâchette facile a sûrement quelque chose de Billy the Kid. Son intolérance ou son franc-parler. C’est peut-être pour cela qu’on l’a surnommé l’enfant terrible de la publicité. Il a préféré remplacer son pistolet – abandonné au vestiaire – par le choc des images et le poids des mots qu’il affiche devant des yeux détournés, comme pour les obliger à voir. Philippe Skaff vend des slogans pour vivre et des principes pour vivre mieux. e Billy the Kid à d’Artagnan, Philippe Skaff s’est souvent amusé à troquer des costumes différents dans le but de séduire, d’abord, car il adore cela, et de servir ses causes, souvent rattachées à un civisme perdu dans des villes défigurées et dans une passivité quasi générale. Ses campagnes préférées et qui sont devenues une affaire personnelle parlent d’environnement, de racisme, de peine de mort ou encore des droits de la femme. Surtout, elles accusent : «Je suis un ambassadeur du changement vers le meilleur. Je ne suis pas un révolté sans cause et je déteste les critiques passives» ; elles dénoncent sans détours et presque en beauté. De Billy, il aurait donc gardé l’art, du chevalier la manière. En artiste qu’il se revendique d’être et qui change souvent d’apparence, il aime bien surprendre et «semer la confusion» ; en parfait Gémeau, il aime bien les extrêmes. Un «pur et dur», comme il se qualifie, qui dérange, car il est souvent là où l’on ne l’attend pas et jamais comme on l’attendrait. Ce matin, pourtant, Philippe Skaff nous reçoit en Philippe Skaff et dans son rôle préféré, maître en son domaine, son refuge où le beau – selon – lui est présent dans le cadre, l’architecture des bureaux, la conception des lieux et jusque dans l’air frais – de la montagne – qu’on y respire. Une barbe de plusieurs nuits blanches assortie d’un pantalon-veste-polo noirs, il a l’air tout droit sorti de ses longues insomnies où la nuit, dit-on, porte conseil. «Je n’aime pas dormir, c’est une perte de temps». Sourire. «Je me réveille tous les matins heureux». Une valise toujours sur la détente trône dans ce bureau très personnalisé, attendant son prochain départ, tout de suite, demain. Philippe Skaff vit entre deux idées, deux projets, deux pays et deux fonctions qu’il mène en parfaite coordination, il est en même temps président directeur général et directeur créatif de Grey Worldwide. «J’ai crée le businessman d’abord. J’ai construit la coquille qui permet à l’artiste de s’exprimer et qui le protège». Itinéraire L’enfant terrible de la pub adore les mots. Il pourrait parler des heures et d’une voix monocorde de tout ce qui le passionne, inconfortable sur cette chaise qui freine son impatience. Et ce surnom, d’abord, dont il semble secrètement fier. «J’ai pris des chemins plutôt que l’autoroute pour arriver là où je suis». Des détours qui passeront par le Canada, Hong Kong, l’Australie et Dubaï et qui le mèneront à Beyrouth en 1987 où il fonde CSS (pour Camp, Saadé et Skaff), qui deviendra très vite CSS and Grey. Après avoir installé ses antennes un peu partout dans le monde, Koweït, Djeddah, Dubaï, Le Caire, son agence devient Grey Worldwide. «Le Liban reste la tête, les muscles sont régionaux. On ne peut pas importer une culture». L’enfant terrible qui écrivait des histoires et des pièces de théâtre à l’âge de neuf ans est devenu, naturellement, un homme terrible qui avoue en toute franchise : «J’ai eu tellement d’aventures amoureuses dans ma vie, et deux divorces à mon compte, je n’ai pas réussi mes examens… Je suis soit un idéaliste qui continue à l’être, soit un fou. Je refuse l’hypocrisie». Avocat des causes perdues, il a quitté ses études de droit en milieu de première année, lorsque son professeur lui confirme qu’un bon avocat pourrait, pourquoi pas, défendre un meurtrier. Politicien à sa façon propre, il mène un discours libre qui passe par des images où la créativité demeure le stimulus. «Pour être un bon créatif, il faut s’intéresser à tout et à rien. Ne pas se prendre au sérieux mais prendre son travail au sérieux. Être très généreux. Pour qu’une publicité soit réussie, il faut qu’elle soit aimée d’abord, puis comprise. Qu’elle puisse établir, avant tout, un pont émotionnel avec l’audience». Sa dernière révolte a pris la forme d’un livre, La République du Béton, quatre ans de rêve, un an et demi de travail sur le terrain et des centaines de photos illustrant la laideur de notre pays, défiguré par la main de l’homme. «Le but était d’abord de créer un choc psychologique en visualisant l’échelle du désastre et puis de commencer à chercher les solutions». Terrible, Philippe Skaff, qui se compare volontiers à un oignon, épluché après avoir abandonné un moment sa carapace ? Pas si terrible que ça, puisqu’il a même réussi à nous faire sourire. Carla HENOUD
Ce monsieur à la gâchette facile a sûrement quelque chose de Billy the Kid. Son intolérance ou son franc-parler. C’est peut-être pour cela qu’on l’a surnommé l’enfant terrible de la publicité. Il a préféré remplacer son pistolet – abandonné au vestiaire – par le choc des images et le poids des mots qu’il affiche devant des yeux détournés, comme pour les...