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Actualités - OPINION

Le sempiternel litige entre durs et modérés bat son plein

Un mot connu, attribué tantôt à Néron tantôt à Dali, tous deux précurseurs du show off médiatique : «En bien ou en mal, peu importe, pourvu qu’on parle de moi». Aujourd’hui, il faut bien le reconnaître, l’éclat vedettarial du président Nabih Berry dépasse les modestes frontières nationales. Grâce à ses prises de position sur le report du sommet arabe de mars, qui mettent en émoi la Ligue dans toutes ses composantes. Surtout après l’accès de fièvre provoqué par la résurgence de l’affaire Sadr. Le président de la Chambre a beau s’en défendre, en affirmant que ses observations sur l’inopportunité du sommet n’ont rien à avoir avec le cas Kadhafi, les chancelleries ne peuvent s’empêcher de faire le lien entre ces deux questions. D’autant plus volontiers que M. Berry est à la tête du mouvement Amal, porte-flambeau naturel de la cause de l’imam, son fondateur. Pareillement, nombre d’observateurs continuent à estimer, malgré les dénégations bis de l’intéressé, que son attitude concernant le sommet reflète les préoccupations de Damas. Car, tout à fait à l’instar de M. Farouk el-Chareh qui n’en fait pas mystère, M. Berry pense qu’une conférence qui déboucherait sur des résolutions insipides comme celles de la dernière réunion de la Ligue au niveau des ministres des AE desservirait gravement la cause arabe. Pour lui, comme pour le chef de la diplomatie syrienne, il est erroné d’omettre de mentionner l’intifada palestinienne ou la résistance libanaise, comme cela s’est produit dernièrement au Caire et risque de se reproduire au printemps à Beyrouth. En bref, on retombe là dans le perpétuel conflit entre colombes et faucons. Il y a deux ans, lors d’un Conseil tenu déjà à Beyrouth, MM. Amr Moussa (qui était à l’époque ministre égyptien des Affaires étrangères) et Farouk el-Chareh s’étaient accrochés au sujet de la résistance libanaise. Le premier exigeait la publication d’une proclamation officielle d’arrêt des opérations sur le terrain en cas de retrait israélien du Sud comme de la Békaa-Ouest. Et le ministre syrien lui répliquait qu’il n’était pas possible de faire une déclaration d’intention, d’abattre une telle carte, tant que l’on ne serait pas fixé sur le retrait, sur ses conditions exactes et sur son étendue. Coupant la poire en deux, la réunion s’était soldée par un communiqué insistant pour l’application de la 425. Tout dernièrement au Caire, la Syrie et l’Irak se sont retrouvés dans une même tranchée pour s’opposer à l’Égypte et à la Jordanie sur la façon de traiter les retombées régionales de la situation issue des attentats du 11 septembre comme des événements dans les Territoires. Comme on sait, les deux pays baassistes ont prôné de fermes résolutions arabes ordonnant la rupture de toute relation avec Israël. En promettant du même coup à l’intifada palestinienne un soutien sans faille. Les deux États modérés ont pour leur part fait valoir qu’on doit tenir compte des nouvelles donnes internationales. Ce qui implique à leur sens la suspension de l’intifada, pour permettre le redémarrage des négociations et le sauvetage du processus de paix, sous l’égide des États-Unis. Ajoutant au passage que la partie palestinienne elle-même ne réclamait pas un appui à l’intifada mais à son Autorité légale incarnée par Arafat. Autorité qui a besoin d’être épaulée diplomatiquement aussi bien que financièrement pour faire face aux fortes pressions politiques et économiques qu’elle essuie. Pour tout dire, lors de la conférence du Caire, l’attitude pondérée adoptée par la délégation palestinienne a fait pencher la balance en faveur du camp des modérés. Ils ont donc emporté la palme, le communiqué de clôture s’abstenant de mentionner l’intifada pour réserver ses attentions à la ligne Arafat, critiquée par les durs comme défaitiste. Les deux camps campent depuis lors sur leurs positions respectives. Ce qui risque de compromettre le sommet de Beyrouth, si un accord n’intervient pas avant mars sur la teneur des résolutions finales. Vue sous l’angle locale, la question qui se pose aujourd’hui est simple : quelle position le Liban, pays hôte, compte-t-il afficher ? Va-t-il insister pour un appui soutenu à la résistance libanaise jusqu’à la libération des hameaux de Chebaa ? Une telle revendication, c’est évident, provoquerait de fortes dissensions au sein de la Ligue comme d’ailleurs à l’intérieur du pays même. C’est sans doute là l’une des raisons qui conduisent M. Berry à prôner le report de la conférence, dans l’espoir d’un changement positif des données régionales d’ensemble. Ce qui signifierait en l’occurrence une décompression des fortes relances américaines en direction d’Arafat. Mais aussi et surtout, dans l’optique berryiste présumée, un allégement de la pression exercée sur Damas comme sur Beyrouth pour la neutralisation du facteur atout qu’est la résistance libanaise. Il s’agirait donc de gagner du temps. Mais il semble peu probable que les choses changent après la fin mars si elles ne l’ont pas fait avant. Émile KHOURY
Un mot connu, attribué tantôt à Néron tantôt à Dali, tous deux précurseurs du show off médiatique : «En bien ou en mal, peu importe, pourvu qu’on parle de moi». Aujourd’hui, il faut bien le reconnaître, l’éclat vedettarial du président Nabih Berry dépasse les modestes frontières nationales. Grâce à ses prises de position sur le report du sommet arabe de mars, qui...